Des «coups» ont été échangés ce mardi au tribunal. (Photo : Christophe Olinger)

Des «coups» ont été échangés ce mardi au tribunal. (Photo : Christophe Olinger)

Suite et fin, mardi, devant le juge siégeant en matière de référé, Thierry Hoscheit (vice-président du tribunal), de l’examen des assignations à tiroirs que l’assureur Bâloise Vie Luxembourg et la holding Leyne Strauss-Kahn, sa filiale de gestion d’actifs Assya Asset management et leur principal actionnaire, Thierry Leyne, se sont lancées depuis le début du mois d’août.

Bâloise avait tiré en premier en réclamant le rachat immédiat pour un peu plus de 2 millions d’euros de titres du groupe LSK, présidé par l’ancien directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn. Un premier contrat de 2011 de gestion d’actifs conclu entre l’assureur luxembourgeois pour ses fonds dédiés et Assya ayant montré des dépassements par rapport aux investissements qui étaient prévus et une surexposition des actifs investis dans le groupe LSK, ce qui pose certaines questions de déontologie et de droit financier, Bâloise avait demandé le rachat du portefeuille. Ce que LSK avait alors, avec la garantie personnelle de l’homme d’affaires franco-israélien Thierry Leyne, consenti dans un second contrat de septembre 2013.

Arsenal juridique

Face à des retards répétés de paiement, Bâloise a exigé, fin juillet, le rachat immédiat de ses titres, notamment en raison de craintes pour le recouvrement d’une créance présentée comme certaine, liquide et exigible de 2 millions d’euros. Début août, elle a saisi le tribunal d’un référé provision dans un premier temps, puis de procédures de saisie-arrêt sur trois comptes de LSK et de sa filiale au Luxembourg, paralysant ainsi le fonctionnement de cette dernière. Parallèlement à ces actions, la compagnie d’assurance vie a également fait procéder à des saisies sur les titres de Thierry Leyne, caution du contrat, dans la holding LSK.

LSK, Assya et Thierry Leyne avaient à leur tour contre-attaqué devant le tribunal des référés en faisant saisir des comptes de l’assureur, après que ce dernier a traîné à honorer une facture de quelque 53.000 euros liée à des frais de gestion sur les actifs. La facture a été honorée dans l’intervalle, ce qui n’a pour autant pas empêché LSK de maintenir la procédure et de produire devant le juge, particulièrement bien informé de son dossier, une quantité impressionnante de documents. Et par ailleurs de remettre en cause, dans une assignation en nullité au fond, le contrat de rachat signé en septembre 2013.

Doutes sur la valorisation de LSK

L’un des points sensibles abordés lors de l’audience de mardi fut celui de la valeur des titres LSK détenus par son actionnaire principal. Car Bâloise veut s’entourer de la garantie qu’à la fin des procédures judiciaires contre son gestionnaire qui risquent de durer deux ans, sinon davantage, les titres qu’elle a fait saisir, en plus des trois comptes en banque, vaudront encore le montant de sa créance de 2 millions d’euros.

Rien n’est moins sûr pour l’étude Vilret & Associés qui la défend. «Nous avons des doutes sur la valeur, car l’action ne cesse de chuter, 46,32% sur un an», a fait savoir l’un des avocats en mettant en question la valorisation avancée par Thierry Leyne, détenteur de 33% du capital de LSK (environ 2,7 millions de titres), soit un montant de 21,6 millions d’euros au cours de 8 euros. L’action LSK cotée sur Alternext pointait encore au-dessus de 16 euros début octobre 2013, mais est tombée autour de 8 euros cet été et les ordres d’achat ne sont pas légions, selon les avocats. Ils en veulent pour preuve les propositions d’achat à 2,17 euros le titre, avec un maximum de 7 euros, ce qui fait bien sûr planer des doutes sur l‘opinion que les marchés se font de la valeur.   

Doutes sur les titres de LSK

Aussi, Bâloise estime ne pas pouvoir retenir une valorisation de 8 euros de LSK: «Il n’y a pas d’acheteur à ce prix là», ont assuré ses avocats. «2 euros, c’est la valeur qu’on peut retenir», ont-ils ajouté. Pour rappel, dans le contrat signé en septembre 2013, LSK, Assya et Thierry Leyne s’étaient engagés à racheter leurs propres titres placés dans le portefeuille de l’assureur pour un prix unitaire de 13,80 euros.

Par provocation, les avocats de l’assureur ont demandé à leur confrère de l’étude MMS, qui assure la défense de LSK et consorts, de leur dire les montants que le groupe avait sur ses comptes ayant été saisis auprès de Banque de Luxembourg, Bil et VP Bank au Luxembourg. Le secret bancaire, même en cas de saisie-arrêt, ne leur permet pas de le savoir. «Je n’ai pas envie de le dire, et je n’ai pas mandat de le dire», leur a répondu l’avocat Me Patrice Mbonyumutwa.

«Faire tomber» Thierry Leyne

L’avocat a toutefois voulu répliquer sur la valorisation des actions de Thierry Leyne dans LSK: 35 millions d’euros au cours le plus haut et encore 4,3 millions d’euros au cours de 2 euros. «On dépasse de loin le montant de la créance», a-t-il fait valoir en demandant la levée des saisies.

L’audience de mardi a par ailleurs permis d’apprendre, de de la bouche Me Patrice Mbonyumutwa, qu’Assya avait géré une quarantaine de fonds pour le compte de Bâloise et que la filiale de LSK en gérait encore une trentaine. On peut légitimement s’interroger pour combien de temps encore. «Il y a manifestement des problèmes de trésorerie dans le groupe et le cours de LSK s’effondre, d’où la saisie des comptes bancaires et des titres de Thierry Leyne. Il n’y a plus aucune certitude de la valorisation du groupe LSK. Leyne voulait récupérer les titres, il a surendetté», a asséné Me Karine Vilret.

«On veut le faire tomber», lui a répliqué Me Patrice Mbonyumutwa.

Le délibéré est prévu le 3 octobre prochain.

Ces affaires tombent évidemment bien mal, à l’heure où LSK s’apprête à lancer, à partir de sa banque à Genève, un fonds d’investissement avec comme but de récolter 2 milliards de dollars sur les marchés. Le lancement est programmé, dans l’idéal, en janvier 2015, rapportait récemment un article du Monde.