La santé des marchés de l’acier et les décisions d’ArcelorMittal continuent à souffler le chaud et le froid sur la Grande Région. Si la rentrée n’a encore rien apporté au Luxembourg, les sites de Liège (2000 emplois dans la balance) sont menacés par un retrait du plan d’investissements. Et Hayange-Florange gronde en attendant des nouvelles qui tardent à rassurer.
ArcelorMittal tient dans ses mains le sort de milliers d’emplois dans la Grande Région. Si le cas des sites luxembourgeois – avec en tête Rodange-Schifflange, toujours en léthargie – n’est pas encore revenu sur le tapis, d’autres bassins vacillent, en Lorraine et en Wallonie.
C’est le cas surtout de Liège, bastion sidérurgique historique. La phase à chaud était déjà condamnée, causant une première lame de fond. La deuxième lame a des airs de séisme profond.
Investissement retiré, 2000 emplois menacés
« La menace est mise à exécution », tonnent les syndicats wallons. Dans la balance des négociations de plan social pour la fermeture de hauts fourneaux du bassin liégeois, ArcelorMittal avait mis un plan d’investissement de 138 millions d’euros. Et cela met en péril tout le reste de la filière présente dans la région.
La direction d'ArcelorMittal a décidé de retirer son plan industriel pour la phase à froid de Liège et d'arrêter la prise de commande pour les produits du fer-blanc, manifestement suite à des négociations tendues avec les syndicats quant à la fermeture de la phase à chaud. Selon ArcelorMittal Liège, la phase à froid représente plus de 2.000 emplois.
Les syndicats en appellent à la Région wallonne, toujours actionnaire d’ArcelorMittal, et à l’Etat fédéral. Pour eux, il y a non seulement un coup porté à la « procédure Renault » - loi mise en place en Belgique pour baliser les fermetures d’entreprises avec licenciements collectifs, depuis 1998 - mais aussi, voire surtout, une rupture de confiance envers le partenaire industriel.
L’acier indispensable
Didier Van Caillie, professeur en stratégie d’entreprise à HEC-Ecole de Gestion de l’Université de Liège, explique à l’agence Belga : « Dans l'acier, ceux qui seront toujours là dans 5 ou 10 ans sont ceux qui investissent, notamment dans les facteurs d’économies d'énergie et dans les technologies non polluantes (…) Ce type d'investissements représente justement une part substantielle de l'enveloppe de 138 millions d'euros prévue dans le plan industriel d'ArcelorMittal ».
Le professeur Van Caillie souligne, dans son analyse, qu’il y a un nombre important d'outils en Europe qui sont en sous-capacité. « Ils sont plus ou moins partiellement sous cocon, à la suite d'une crise économique de plus en plus longue, de plus en plus dure et qui frappe de plus en plus les éléments sensibles du tissu économique. C'est aussi une grande faiblesse du bassin liégeois, il n'est plus considéré comme une pièce maîtresse », observe-t-il. Selon l’expert, la sidérurgie en Wallonie « n'est certainement pas un des leviers sur lesquels on peut capitaliser pour le futur mais cela reste une activité de base et tout tissu économique a besoin de l'industrie pour fonctionner. Or au sein de l'industrie, l'acier est un élément indispensable. »
La Fensch mobilisée
En Lorraine, c’est le même combat. Les ArcelorMittal de Florange-Hayange mènent des actions quotidiennes pour manifester leur colère. Ils continuent de réclamer depuis l'été 2011 le rallumage des hauts-fourneaux P3 et P6 d'Hayange et craignent leur arrêt définitif accompagné d'un plan social qui pourrait toucher 1500 salariés.
Toute la Vallée de la Fensch tremble et est mobilisée, depuis des mois. Lundi, l'intersyndicale a bloqué les voies qui alimentent les lignes de production du site de Florange. L’Etat est aussi appelé à soutenir la sidérurgie lorraine, comme s’y était engagé le candidat Hollande. Certains annoncent la venue à Florange, en fin de semaine, d'Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif.