Paul Schuh, directeur de l'ILR, se voit contester sa décision sur les tarifs d'interconnexion. (Photo: archives / paperJam)

Paul Schuh, directeur de l'ILR, se voit contester sa décision sur les tarifs d'interconnexion. (Photo: archives / paperJam)

Dans un communiqué de presse diffusé ce mardi, l’Institut luxembourgeois de régulation annonce que les opérateurs de communication Orange Luxembourg et Tango ont engagé devant le Tribunal administratif des recours en annulation contre un règlement du 6 janvier 2014. Ce texte a mis en place une tarification provisoire sur les tarifs de terminaison d’appel, autrement dit sur les prix que se facturent entre eux par minute les opérateurs lorsque leurs clients appellent le numéro d’un opérateur concurrent.

Le recours d’Orange avait été révélé par paperJam.lu le 31 mars dernier, après que la société a vu sa demande de sursis des mesures du règlement incriminé rejetée par la juridiction administrative. Parallèlement à ce référé, Orange avait engagé un recours en annulation sur le fonds du dossier, mettant en cause le tarif de 0,98 centime d’euro imposé de façon unilatérale par le régulateur, soit une baisse jusqu’à 90% des prix qui étaient jusqu’à présent pratiqués. Pour Orange, ce niveau de prix, même provisoire, en attendant la détermination de tarifs définitifs qui n’interviendront pas avant le mois de juillet prochain, posait la question de sa survie, alors que les opérateurs ont tous été affectés par les nouvelles règles du jeu sur le roaming en Europe, qui ont considérablement rogné leurs marges bénéficiaires.

Tarif acceptable

Un mois après les recours d’Orange (introduits le 4 mars), c’est au tour de Tango d’entrer dans la contestation: selon l’ILR, son recours en annulation a été introduit le 9 avril, soit plus de trois mois après la publication du règlement litigieux au journal officiel, ce qui risque de poser un petit souci de recevabilité.

Tango, dans la consultation de marché ayant précédé l’adoption du règlement sur la terminaison d’appel, avait lui aussi sévèrement contesté la pertinence des tarifs imposés par l’ILR, l’accusant de faire payer aux opérateurs le prix de son inertie pendant plus de six ans. En effet, c’est suite à un avis motivé de la Commission européenne, qui pointait du doigt l’absence de régulation sur les prix de terminaison d’appels et d’analyse du marché du mobile, que le régulateur luxembourgeois a fait bouger les lignes en décrétant le prix de 0,98 centime d’euro, appliquant ainsi une baisse pouvant aller jusqu'à 90% par rapport aux tarifs jusque-là en vigueur.

La détermination de ce tarif s’appuyait sur un benchmark très controversé, couvrant sept marchés (Danemark, Espagne, France, Pays-Bas, Portugal, Suède et Royaume-Uni), sans tenir compte de la taille du Luxembourg, qui est l'une de ses principales spécificités.

Dérèglement majeur du marché

L’ILR avait tranché en déterminant un coût unitaire de 0,0098 euros (0,98 centime d’euro) par minute la terminaison d’appel sur base du calcul d’une moyenne des coûts unitaires des sept pays pris en compte. Tango avait proposé un tarif «acceptable» de 1,29 centime d’euro, mais sa proposition ne fut pas retenue.

Ces tarifs ont été fixés à titre provisoire, le temps de boucler une nouvelle analyse du marché (la dernière remontait à 2006) et de mettre en place un nouveau modèle de coût adapté au marché luxembourgeois.

Selon des experts de la firme Marpij, qui avaient été appelés par Orange dans le cadre de son litige avec l’ILR, la baisse brutale (jusqu’à 90%) des prix des terminaisons d’appel «pourrait entraîner un dérèglement majeur et irréversible du marché luxembourgeois».