Sylvain Cottong (Strategybuilders) (Photo : Olivier Minaire)

Sylvain Cottong (Strategybuilders) (Photo : Olivier Minaire)

Améliorer son service est un impératif pour développer son entreprise. Les méthodes du service design peuvent permettre de renouveler l’expérience utilisateur, pour conquérir de nouveaux clients.

Monsieur Cottong, le service design est une approche qui semble jeune, mais lorsque l’on voit la littérature sur le sujet, les premières réflexions datent déjà. Son développement est-il lié à des raisons particulières ?

« C’est une question de terminologie et d’état d’esprit. Les pays scandinaves ont déjà développé des modèles et méthodes de service design il y a presque 30 ans. Ce qui est nouveau, c’est qu’une nouvelle génération de designers s’intéresse davantage aux méthodologies appliquées à des processus à côté du design traditionnel de produits et de communication. En plus, nous vivons dans une société de services depuis plusieurs décennies déjà, au regard de la partie services dans les PIB de la plupart des pays industrialisés : 70 % et plus. Or, les services ont longtemps été délaissés par l’innovation et le design pour diverses raisons. Aujourd’hui, on connaît des marchés saturés où la rétention de clientèle est devenue plus importante que l’acquisition d’une nouvelle clientèle. Et cette rétention ne se réalise que grâce à des clients très satisfaits. Pour qu’ils soient satisfaits, il faut que le service qu’ils ‘achètent’ résolve effectivement leurs problèmes et qu’en plus le service journey leur offre une bonne expérience, voir une expérience exceptionnelle. Les entreprises sont donc amenées à consacrer beaucoup plus d’attention au customer experience management : le service design – et les outils qu’il offre – est la méthodologie par excellence pour le réaliser.

Les entreprises luxembourgeoises sont-elles sensibles à ces approches ? La dimension multiculturelle du pays rajoute-t-elle à l’intérêt – et à la complexité – de la démarche ?

« Ce n’est pas un mystère que le Luxembourg n’a pas toujours été un havre de l’innovation et ce n’était d’ailleurs pas son business model. Aussi, nous savons par diverses études que la culture du service dans le commerce luxembourgeois n’est pas suffisante, et que beaucoup de résidents luxembourgeois dépensent une grande partie de leur argent à l’étranger. Mais il faut faire la différence entre le service B2C, représenté surtout par le commerce local, et les services B2B, dont le Luxembourg est un exportateur important. Les services B2B ne sont bien évidemment pas très visibles du grand public, mais la qualité de l’expérience procurée par ces services est tout aussi importante pour le succès économique des entreprises qui les offrent. Vu l’importance des services exportés dans le PIB du Luxembourg, ce domaine n’est donc absolument pas à négliger.

Quels sont les pièges de la démarche ? Peut-elle être appliquée partiellement ? Quels en sont alors les risques ?

« La démarche ne présente pas de piège en soi. Elle est précisément conçue pour éliminer les offres de services qui ne correspondent pas aux attentes réelles des clients, de rendre les services existants plus attrayants et de développer de nouveaux services innovants (et donc de réaliser une croissance durable) basés sur les bons choix. Un piège potentiel peut résider dans le fait qu’il s’agit par définition d’une approche multidisciplinaire et transversale en entreprise et que, par conséquent, les compétences et expériences des équipes d’un projet de service design devront donc refléter ce caractère multidisciplinaire. Comme souvent, les risques sont plus humains que méthodologiques. »