Le studio TV (Photo: Olivier Minaire)

Le studio TV (Photo: Olivier Minaire)

Mardi 15 septembre. 16 h. Le premier générique est lancé. paperJam.TV existe pour le public, qui découvre la nouveauté sur le canal 49 du bouquet Télé des P&T (qui compte quelque 20.000 ména­ges abonnés), ou en live streaming sur Internet, via l’accès www.paperJam.TV.

Jingle. Jean-Michel Gaudron, à l’écran, salue les téléspectateurs, puis commence à donner les news. Dans les bureaux et les couloirs de Maison Moderne, maison mère de la nouvelle chaîne, on retient son souffle.

Quelques invités, de la presse luxembourgeoise notamment, suivent l’apparition dans un silence religieux, depuis une salle de réunion devenue théâtre un jour de première. Le reste du personnel ou presque s’est rassemblé un peu plus loin, devant deux écrans. Les autres sont pour la plupart mobilisés en coulisses, dans le studio, au maquillage, pour l’accueil des invités. Et même au catering. Car, c’est dit, comme il y a embouteillage dans les locaux, on fera sauter quelques bouchons pour célébrer l’événement. Une vraie naissance…

Au sortir de cette première demi-heure de programmes, avec deux invités en direct, Alain Berwick (RTL) et Pit Hentgen (Lalux), Aurélien Picca, le réalisateur, peut souffler : tout s’est (pratiquement) bien passé. « Quel stress ! La dernière répétition dans les conditions du live était nickel. Ici, évidemment, il a fallu jongler avec les petits impondérables techniques. »

Pas vraiment le temps de savourer le moment présent, car le debriefing est déjà commencé pour faire en sorte de repérer ce qu’il est possible d’améliorer et de perfectionner.

« Le bon moment pour le faire »

Pour paperJam, en tous les cas, une nouvelle aventure commence. Car lancer une télévision lorsqu’on est un magazine print établi depuis 11 ans et reconnu comme un support de référence sur son segment, ne constitue pas, en tant que tel, une évolution naturelle et immédiate. Mais c’est justement parce que paperJam s’est, très vite dans son existence, positionné en tant que média économique et financier, et non comme un simple magazine, qu’il n’y a rien de surprenant à ce que ce pas soit désormais franchi.

Et même si paperJam.TV a été conçue à partir d’une feuille blanche, le projet n’est pas pour autant parti de rien. « Dans l’esprit des gens, paperJam n’est plus seulement un magazine, mais bien une marque média multicanaux qui occupe une place dans le quotidien de 40.000 à 50.000 personnes au Luxembourg et dans la Grande Région, explique Mike Koedinger, fondateur et CEO de Maison Moderne. L’émission de télévision correspond à ce besoin d’informer chaque jour de travail, du lundi au vendredi, mais aussi d’inscrire davantage encore paperJam comme une marque média. Dans une conversation télévisée, nous pourrons transmettre de l’expression corporelle et de l’émotion. Cela offre donc une dimension supplémentaire. »

Depuis près de quatre ans, paperJam diffusait déjà régulièrement des interviews vidéo (plus de 800 au total) sur son site Internet. Il était temps de passer à l’étape « production pure ». paperJam.TV, aujourd’hui, constitue ce que Mike Koedinger appelle « un laboratoire médiatique ».

Progressivement, paperJam.TV va prendre son rythme de croisière, dans le sillon tracé par le magazine print. « Nous partons sur une base modeste, mais ambitieuse quand même, souligne Jean-Michel Gaudron, directeur des rédactions paperJam et rédacteur en chef de paperJam.TV. Nous restons dans le contenu paperJam pour l’essentiel, avec une ligne éditoriale économique et financière qui peut aussi être décalée. L’objectif est évidemment de coller à l’actualité et d’apporter un traitement différent de cette information, un traitement plus proche, plus immédiat dans la diffusion. Mais un traitement professionnel, avec nos journalistes, pour un contenu maison. »

Dans un premier temps, tous les jours ouvrables, paperJam.TV proposera entre 20 et 30 minutes de programmes originaux, produits dans le studio aménagé dans les locaux de Maison Moderne, à Bonnevoie. Un journal, présenté par M. Gaudron, et des interviews en direct sur le plateau, des reportages enregistrés, des chroniques, des rubriques régulières et... des publicités, rythmeront ce créneau qui sera ensuite repris en boucle jusqu’au lendemain. Pour compléter le tout, un écran partagé fait défiler les offres d’emploi de paperJam.jobs, ainsi que les flux d’informations (Bourse de Luxembourg, informations économiques, contenu de la newsletter et du site paperJam.lu). Progressivement, le programme sera étoffé, avec des retransmissions d’événements en live ou la diffusion de talk-shows.

Print, web, TV : la gamme de diffusion est désormais complète pour paperJam. « Avec la démocratisation des moyens de production et de distribution, on ne peut plus se permettre de ne pas avoir de chaîne télévision », estime le producteur indépendant Fred Neuen, qui a accompagné la genèse du projet paperjam.TV en tant que consultant externe. « C’est le bon moment pour le faire, renchérit Philippe Baudet, fondateur de PAD Media & Services, société spécialisée dans la mise en œuvre de solutions audiovisuelles, et partenaire du projet. Il y a deux ou trois ans, cela aurait été sans doute trop tôt. Et dans un an, il y aura sans doute beaucoup de monde sur le créneau. »

Le concept de départ n’a rien, en lui-même, de révolutionnaire : partir de la qualité visuelle et éditoriale du support print paperJam pour, ensuite, l’adapter à l’audiovisuel, tout en mettant une petite touche ambitieuse supplémentaire via la présentation d’un journal quotidien. « Avec une TV, on communique évidemment différemment, note M. Neuen. Le rapport est plus direct, et donc plus émotionnel, entre Maison Moderne et son audience. Il nous sera ensuite possible, avec des logiciels précis d’analyse d’audience, de peaufiner le produit final et d’ajuster l’offre aux envies du spectateur. »
Au moment où la lampe rouge « On Air » s’allume au-dessus de la porte des studios de paperjam.TV, c’est une véritable petite usine technologique qui se met en branle pour permettre d’assurer à la fois la retransmission en direct des émissions qui seront réalisées depuis Luxembourg-Bonnevoie, mais aussi leur mise à disposition en mode VOD (Video On Demand), afin de pouvoir les visionner à n’importe quel moment de la journée ou de la nuit. Télévision et Internet sont les deux premiers supports de diffusion de cette chaîne, en attendant une extension d’accès via iPhone et iPad.

« Fou, mais excitant »

La mise en œuvre de la plate-forme technique s’est faite en collaboration avec l’Entreprise des P&T et Niche Guardian. Les premiers fournissent l’infrastructure de base d’hébergement et de diffusion, via l’utilisation du logiciel TVTools sur lequel l’opérateur historique s’appuie pour développer son offre Corporate TV. Les seconds apportent la solution Kiss, qui rendra possible l’accès aux programmes en mode VOD et l’extension de la diffusion du signal vers les terminaux mobiles iPhone et iPad. Derrière ses claviers et ses écrans, le réalisateur Aurélien Picca aimerait bien avoir une paire d’yeux et quelques mains supplémentaires pour pouvoir tout mieux contrôler. « Il y a beaucoup de paramètres, de maillons dans la chaîne technique, de production et de diffusion. Tout doit fonctionner ! »

Le défi est permanent et il a commencé dès le début de l’été, lorsqu’il a fallu tout créer et tout équiper. Là où il y avait un local vide, il y a désormais un studio équipé en moyens de diffusion HD. Sa mise en place a nécessité évidemment des aménagements, un renforcement des capacités informatiques, une supervision et même une imagination de tous les instants pour faire en sorte que tout passe, avec la vitesse et la sécurité requises, sans perturber le travail habituel de tous les autres métiers de Maison Moderne, dont les activités n’ont pas diminué pour autant.

Conrad Heron, manager IT chez Maison Moderne, lui, ne compte pas ses heures depuis trois mois. Et sa débauche d’énergie ne se calmera qu’avec un signal impeccable, un lancement réussi, des prompteurs qui ne lâchent pas le présentateur, une incrustation coordonnée des news de la rédaction sur l’écran partagé, jusqu’au générique de fin millimétré... avant que ne reparte la boucle sur le canal 49 de la Télé des P&T.

Au générique de cette formidable aventure, il y a donc du monde. L’habillage visuel et sonore s’est appuyé sur une série de compétences, internes et externes, pour aménager l’espace, tirer des câbles, dessiner et créer le studio, parfaire l’isolation phonique, animer le logo de paperJam, apporter un éclairage dynamique dans une pièce à huis clos, créer des jingles, des transitions pour les espaces publicitaires, connecter et tester tous les réseaux, enregistrer des teasers (bandes annonces)… sans oublier le maquillage et le démaquillage des présentateurs et invités qui seront en plateau.
« Franchement, c’est un défi un peu fou, mais c’est très excitant, confie M. Picca. On sera en live pour la plus grosse partie de la boucle, ce qui est un choix éditorial, pour la spontanéité. C’est évidemment une difficulté technique supplémentaire, un travail sans filet, très rigoureux dans l’approche des personnes qui seront face caméra, notamment sur le respect strict du timing. »

paperJam.TV diffusera aussi, après le journal et les invités de la rédaction, des reportages réalisés lors de workshops ou d’événements divers. Et, en attendant l’assurance technique de pouvoir retransmettre en direct des événements – comme une table ronde ou un talk-show – depuis les endroits les plus divers – et pas nécessairement équipés en moyens de diffusion Internet suffisants –, lesdits événements feront l’objet d’une captation pour être intégrés dans la production mise en boîte à Bonnevoie.

Vafa Moayed (Deloitte), Rachel Gaessler (Chambre de Commerce), Robert Dennewald (Fedil) ou encore Paul Hammelman (ACA) se sont succédé en plateau les jours suivants. La machine est lancée. paperJam.TV ne demande qu’à crever l’écran. Une nouvelle aventure médiatique commence.

 

 

Design - « L’important, c’est ce qu’on voit à l’écran »

C’est au cœur même des locaux de Maison Moderne, à Bonnevoie, que le studio TV a été conçu, à partir d’une feuille blanche. Georges Zigrand (IntegratedPlace) est intervenu sur ce projet en tant que designer indépendant. « C’est la première fois que je me lançais dans la conception d’un studio TV, mais j’ai fait pas mal de scénographie et de projets d’expos et de musées un peu partout, à Londres par exemple. Ces expériences ont été intéressantes, mais ce qui est pertinent en matière de studio TV, c’est ce qu’on voit à l’écran. Bien sûr, il faut que le studio soit bien, qu’il ait une gueule. Mais le plus important, c’est ce qu’il y a à l’écran. Cela donne un cahier des charges très différent d’un autre projet. C’est très spécifique. »
Dans un espace assez réduit, l’idée directrice a été de perturber l’échelle. « Beaucoup de choses se passent visuellement pour aboutir, grâce à des astuces, à un aspect plus large et plus grand. À l’écran, on n’a pas l’impression d’être dans une petite pièce, plutôt dans un espace aéré et large. Constitué de la répétition du logo paperJam, notre arrière-plan est statique, mais il devient un écran animé grâce à des jeux de lumière. »