12 heures. Il aura fallu 12 heures de négociation pour que les ministres européens de l’Emploi et des Affaires sociales pour se mettre d’accord, lundi à Luxembourg, sur la délicate réforme de la directive dite Bolkestein de 1996 sur le travail détaché. Seules la Pologne, la Hongrie, la Lituanie et la Lettonie ont finalement voté contre le texte, soit les pays d’origine d’une large majorité des travailleurs détachés en Europe.

«Le compromis d’aujourd’hui nous permet d’avancer dans ce dossier complexe et sensible, a estimé Nicolas Schmit (LSAP), ministre de l’Emploi, dans un communiqué envoyé vers 22h45 lundi soir. Il s’agit de respecter le principe d’égalité de rémunération pour un même travail à un même endroit, comme le propose la Commission européenne. Nous devons à cet effet renforcer les coopérations entre les États membres pour lutter contre les fraudes et établir la confiance mutuelle.»

Exception pour le secteur des transports

Promesse de campagne du président de la République pour restaurer le principe d’une «Europe qui protège», la question du travail détaché était devenue au fil des mois symbole des inégalités entre États membres. Le compromis validé lundi met donc l’accent sur plusieurs aspects dont le principal tient dans la limitation à 12 mois de la durée du détachement des salariés. Du moins officiellement, puisque le compromis signé laisse la possibilité aux entreprises de demander une extension de détachement de six mois supplémentaires, à condition toutefois de «motiver» la demande auprès de l’État d’accueil.

En revanche, cette règle ne s’appliquera pas aux salariés du secteur des transports, du moins tant qu’un accord sur un texte européen spécifique définissant les règles sociales dans ce secteur ne sera pas mis en place – ce qui ne devrait pas être le cas avant 2019, voire 2020. Une dérogation arrachée par plusieurs pays dont l’Espagne, le Portugal ou la République tchèque, dont le transport routier notamment possède un poids conséquent dans leur économie.

2,05 millions de travailleurs détachés

Soutien de la position française, le Luxembourg est parvenu à décrocher son objectif, à savoir aboutir à un «compromis le plus large possible» lors de cette réunion du 23 octobre, dernier créneau possible pour que la réforme de la directive soit définitivement adoptée avant la fin de la législature de la Commission Juncker. De son côté, la commissaire européenne aux Affaires sociales, Marianne Thyssen, s’est félicitée d’un «accord équilibré», qui devra désormais être débattu au Parlement européen pour une adoption probable d’ici l’été prochain.

Les États membres de l’UE souhaitent se donner trois ans pour transposer la réforme des règles européennes dans leur législation, et un an encore pour les mettre en application. Selon les derniers chiffres disponibles, datant de 2015, ce sont quelque 2,05 millions de travailleurs européens qui ont été détachés dans d’autres États membres. Un chiffre en hausse de plus de 40% par rapport à 2010.