En 2016, Pit Hentgen a quitté son poste de directeur général de Lalux pour se concentrer sur la présidence du conseil d’administration. Mais il n’a pas quitté les affaires pour autant. Il reste à la tête de la Compagnie Financière La Luxembourgeoise, l’actionnaire historique de la compagnie d’assurances, qui investit aussi dans d’autres projets.
Il est cette année à la sixième place d’un classement dans lequel il fait figure d’habitué. Il fait d’ailleurs partie des rares décideurs à avoir figuré trois fois au top 10 (2006, 2014 et 2018). «C’est probablement lié à la société que je représente, un des derniers groupes avec d’importants capitaux luxembourgeois», admet-il avec une certaine humilité.
Mais pour se présenter, l’homme énumère une liste de mandats quasi interminable, qui ne laisse aucun doute sur son influence. «Vu mes fonctions dans une société comme Lalux, qui est respectée sur la Place, j’ai été considéré comme quelqu’un de méritant et on m’a proposé des sièges dans certains conseils d’administration.»
De l’influence, pas de pouvoir
Pour Pit Hentgen, l’influence n’est pas naturelle, elle s’exerce dans l’intention d’atteindre un but. «Avoir de l’influence, c’est pouvoir accéder aux personnes qui ont de l’expertise, qui prennent part aux processus décisionnels et qui ont besoin d’informations suffisantes afin d’atteindre leurs objectifs.» En tant que responsable d’une grande entreprise, il admet apprécier l’avant et l’après dans les réunions officielles ou les conseils, qui lui prennent désormais l’essentiel de son temps. «C’est toujours un temps productif et intéressant.»
La situation du Luxembourg est évidemment particulière et favorise les connexions entre décideurs politiques ou économiques. «Parfois, nous nous connaissons depuis le lycée ou l’université. Le Luxembourg, en tant que ville-État, rend les choses plus faciles grâce à la proximité. Les informations utiles sont faciles à obtenir et les gens vous écoutent.»
L’influence est plus importante que le pouvoir.
Pit Hentgen, président et directeur général du groupe d’assurance Lalux
Même si Pit Hentgen apprécie cette influence qu’il peut avoir sur le cours des affaires, il ne revendique pas de pouvoir. «L’influence est plus importante que le pouvoir. Le fait que ma parole ait pu prendre plus de poids avec le temps convient mieux à ma personnalité.» Président de la société Lafayette qui gère le patrimoine de l’archevêché, il est aussi proche de la direction du groupe média Saint-Paul, également détenu par l’archevêché. Sans cacher non plus son soutien au CSV.
Agir sur le cours des choses est un objectif que Pit Hentgen revendique également pour la Compagnie Financière La Luxembourgeoise. «Nous avons une attitude citoyenne, nous replaçons toujours nos intérêts par rapport au contexte luxembourgeois. Nous ne voulons pas aller contre les intérêts de la société dans laquelle nous évoluons.»
Des valeurs héritées de son grand-père, Aloyse Hentgen, son père, Robert, et son oncle, Jules Pauly, les pères du groupe familial fondé en pleine reconstruction du pays en 1920, après la Première Guerre mondiale, avec le concours de l’État. Il partage d’ailleurs les commandes avec son cousin François Pauly, l’ancien patron de la Bil.
Confiant pour l’avenir du pays, il estime pourtant que le Luxembourg ne va pas pouvoir continuer à afficher éternellement des croissances insolentes par rapport à ses voisins, bien qu’elles soient nécessaires au maintien des prestations sociales. La concurrence et les jalousies mettent le pays sous pression et risquent de lui faire perdre peu à peu ses avantages. «L’industrie des fonds, qui a pris le relais de la banque privée, est très solide. Les prochaines attaques la viseront. D’autres grandes Places nous envient et vont tenter de nous prendre du business.»