Paperjam.lu

 

Nous avons rencontré le directeur général d'Editus, Jo Labar, et les responsables des ventes, Nicolas Van Moffaert, et du marketing Internet, Samuel Dickes. Trois hommes à la tête d'une entreprise qui réussit bien dans la convergence de l'ancienne et de la nouvelle économie, avec comme finalité la rentabilité.

Quand est-ce que, selon vous, "Monsieur Tout-le-Monde" n'aura plus recours à vos annuaires imprimés pour n'utiliser que les versions disponibles gratuitement sur Internet?

Jo Labar: En 2100 peut-être? L'imprimé a encore de beaux jours devant lui. Chaque média a sa spécificité, ses avantages. Il y aura toujours des adeptes qui préféreront feuilleter un livre plutôt que de rechercher une information sur un petit écran.

Si nous sommes d'accord sur le fait qu'une "Révolution Internet" a eu lieu au niveau mondial, quelles en étaient pour vous les étapes principales au Luxembourg?

Samuel Dickes: En 1996, l'avènement des fournisseurs d'accès à Internet commerciaux qui ont ouvert la voie à un usage plus large de ce nouveau média.

Toujours en 1996: Europe Online. Même si l'opération s'est soldée par un échec, elle a permis de provoquer une prise de conscience de l'existence d'Internet auprès du grand public et des médias au Luxembourg.

Et en 1999, le lancement de l'Internet gratuit a motivé un nombre important de propriétaires de PC à se connecter à Internet.

Editus a, sans aucun doute, contribué d'une façon significative à l'utilisation d'Internet comme outil de communication et de promotion auprès des entreprises grand-ducales. Vous avez choisi d'offrir une vaste gamme de produits et optez pour un prix d'entrée très bas, suivant le modèle confirmé par vos annuaires imprimés. Pourrions-nous parler de véritable "évangélisation'?

Jo Labar: Notre vocation est d'être une source d'information générale pour le grand public. C'est l'esprit de nos annuaires imprimés, et c'est dans ce même esprit que nous concevons notre approche Internet. Nous partons du principe que dans un avenir proche chaque entreprise et chaque professionnel devront avoir leur site Internet. Notre ambition est de rassembler tous ces sites de façon à pouvoir donner dans tous les cas une réponse à l'internaute qui cherche une information.

Avec 10% de son chiffre d'affaires (soit dit en passant: 520 mios de Luf au total) réalisé par la publicité sur Internet, Editus semble voir confirmé son modèle des revenus. Les annuaires en ligne offrent, en effet, toute une série d'applications publicitaires en plus du simple bandeau, ou encore du sponsoring de rubriques ou de jeux. Des micro-sites voient le jour, le référencement bat son plein avec la possibilité d'acheter d'innombrables mot-clés,? Toute entreprise, aussi petite et aussi locale soit-elle, peut désormais être présente sur le web. Quelles tendances constatez-vous aujourd'hui par rapport aux différentes formes de publicité et aux divers types d'entreprises?

Nicolas Van Moffaert: Depuis le début, les produits-phares ont été les bandeaux et les micro-sites. On constate actuellement d'une part une évolution vers un besoin de personnification des sites (on doit faire du sur-mesure), et d'autre part une diversification des bandeaux avec des positionnements différents et des fonctionnalités nouvelles. Une autre tendance très nette est la demande accrue de sponsoring.

Monsieur Labar, quand estimez-vous que le marché de la publicité sur Internet sera à maturité? Quelle importance représentera-t-il dès lors?

Jo Labar: Dans 5 ans, et à ce moment-là, selon nos estimations, nous devrions avoir multiplié notre chiffre d'affaires par 10.

Est-ce que la certification de la mesure d'audience des sites Internet est pour vous un atout majeur et, si oui, pourquoi?

Samuel Dickes: Oui parce qu'il faut être transparent pour l'annonceur. S'il décide d'investir dans une campagne publicitaire, il doit disposer de chiffres certifiés par un organisme indépendant. Il est trop facile d'annoncer des sources d'audience parfaitement invérifiables.

Qu'attendez-vous concrètement de votre alliance stratégique avec la régie IP? Se réunir pour dicter les règles du marché, ou nettement augmenter le chiffre d'affaires? Et: quelle place accordez-vous aux autres régies online ? Que pensez vous par exemple du dernier arrivé qu'est beWeb?

Nicolas Van Moffaert: IPL et Editus sont complémentaires par la clientèle visée et par la panoplie de sites en régie. Par cette alliance, il s'agit de présenter une offre représentative du marché luxembourgeois à un annonceur voulant faire une campagne nationale. À deux, IPL et Editus sont incontournables. Le succès des autres régies dépendra de l'audience qu'ils parviendront à obtenir.

Est-ce que la publicité restera pour Editus la seule source de revenus de vos produits Internet? Des entreprises comme Netcom visent, en revanche, l'ensemble des modèles de revenus: publicité, e-commerce, accès fixe et mobile... Quelle est votre stratégie commerciale à court, à moyen et à long terme?

Nicolas Van Moffaert: Nous sommes à la base des vendeurs d'espaces publicitaires dans des annuaires que nous éditons et nous pratiquons le même métier sur Internet. Cependant au fur à mesure que l'on avance, on s'éloigne du modèle "papier" et de nouvelles pistes sont explorées. L'e-commerce sera, bien entendu, un élément de notre stratégie dans les semaines ou mois à venir.

Dans ce contexte, que pensez-vous du projet de loi de Monsieur le Ministre Biltgen sur la protection de données à caractère personnel'

Samuel Dickes: Editus a une position favorable par rapport à tout texte de loi qui protège d'une façon utile la vie privée des internautes. Nous avons, depuis toujours, eu une politique de non-commercialisation des données privées des gens.

Récemment, vous semblez aussi intéressés à créer une communauté autour de vos sites, ou comment peut-on interpréter l'offre soudaine d'adresses e-mail gratuites? Offre qui d'ailleurs a été appuyée par une solide campagne publicitaire?

Samuel Dickes: Le trafic est la clé du succès. L'e-mail gratuit permet d'attirer sur nos sites des internautes réguliers.

Editus est une maison d'édition fortement spécialisée. Avec le rachat du portail Luxweb et l'arrivée de son fondateur Samuel Dickes dans votre management, vous vous êtes également engagés à créer davantage de contenu. A quoi peut-on s'attendre?

Jo Labar: En effet le contenu va continuer à s'étoffer. Après la météo, les programmes de cinéma, nous avons lancé www.cultureweb.lu, un magnifique site sur toutes les manifestations culturelles, événements à caractère folklorique ou d'intérêt général. Nous avons à l'étude des développements sur des sujets comme le sport, l'automobile, l'immobilier?

Internet signifie, bien entendu, aussi un élargissement des marchés et, par cette même occasion, l'apparition de nouveaux concurrents. Le quasi-monopole actuel risque-t-il d'être menacé par la mise en place d'annuaires à caractère européen, voire mondial' Ou pensez-vous intégrer des réseaux existants ou futurs?

Jo Labar: Des annuaires sur le net, il y en a beaucoup et il y en aura davantage sans doute à l'avenir. Tout le problème est l'exactitude de l'information, donc sa mise à jour quotidienne, et en finalité, la rentabilité.

Aujourd'hui, vos annuaires sont déjà présents sur les portails WAP des deux opérateurs. Mais à quelle échéance l'Internet mobile jouera-t-il réellement un rôle important? Serait-ce dès le printemps 2001 avec l'augmentation de la bande passante avec l'introduction du GPRS, ou ne serait-ce qu'en 2003 lors de l'introduction de la téléphonie mobile de la troisième génération (UMTS)?

Jo Labar: Les avis sont partagés. Nous sommes assez sceptiques, sauf pour des applications de base: rechercher un numéro de téléphone, peut-être consulter un programme de cinéma ou un résultat sportif. Le marché décidera, et de toute façon, nous serons présents.

Dans l'e-Europe, le Grand-Duché jouera un rôle prépondérant, dit-on. Vrai ou faux? Ou, posons la question autrement: quels sont, selon vous, les principaux atouts du Luxembourg pour devenir un acteur-phare du projet "e-Europe", et quelles sont ses faiblesses?

Samuel Dickes: Il n'est pas sûr du tout que le Grand-Duché sera capable de recréer le succès qu'il connaît dans d'autres secteurs, en créant simplement quelques lois favorables au monde Internet. Il y a eu un gaspillage de temps important avant de voter les textes de lois sur le commerce électronique, et beaucoup d'autres régions en Europe font actuellement des efforts importants afin d'attirer les entrepreneurs de e-commerce.

Néanmoins, il y a une série d'autres atouts traditionnels qui mettent en valeur une fois de plus le pays: localisation géographique, infrastructures modernes, présence d'un hub de cargo aérien, plurilinguisme ?

Pour finir, je vous prie de me permettre une question personnelle: Quel est votre dernier achat réalisé sur Internet?

Jo Labar: Un livre: "La longue route" de Moitessier sur www.bol.fr.