Donato Rotunno: «Je préfère les questions aux réponses, la provocation au discours.» (Photo: archives / paperJam)

Donato Rotunno: «Je préfère les questions aux réponses, la provocation au discours.» (Photo: archives / paperJam)

Le paysage audiovisuel luxembourgeois a bien changé en 20 ans et Tarantula fait partie des pionniers du secteur. «On avait de l’audace, de la jeunesse, de l’insouciance, de l’énergie, de la rage parfois, du bagout… sans doute un peu de talent aussi quand même», se souvient Donato Rotunno, fondateur et responsable de la société.

À l’époque donc, son rêve était de «créer des films dans un territoire presque vierge» et pour cela, rien de tel que de monter sa propre société de production. L’idée avait été de monter un réseau de quatre sociétés du même type dans différents pays européens, portant toutes le nom de l’araignée mythique du sud de l’Italie supposée plonger sa victime dans un profond état de léthargie dont seule une danse frénétique pouvait la tirer. Chacune était indépendante et se promettait de coproduire des films ensemble.

«Dès le départ, c’était un concept politique et philosophique fort avec une stratégie autour d’un seul nom et d’un seul logo.» Le rêve initial a pris du plomb dans l’aile et seul Tarantula Luxembourg et Tarantula Belgique subsistent aujourd’hui, volant chacun de leurs propres ailes, mais ne s’interdisant aucune collaboration. «Il y a eu des moments difficiles, très difficiles. Mais mettre un genou à terre, cela fait partie du parcours. Ce qui est grave est de mettre les deux ou de ne pas en tirer les conséquences.»

Progressivement, Donato Rotunno s’est passionné pour le travail du producteur, a appris à connaître et à maîtriser les rouages de l’industrie cinématographique luxembourgeoise et européenne. «Je pense que l’infiltration est plus efficace que la confrontation», avoue-t-il.

Une stratégie qui s’est avérée payante au vu du parcours de la société. «Depuis quelques années, l’équipe de Tarantula est forte et soudée. C’est un peu un clan, une famille, malgré les écarts d’âges entre nous», se félicite le producteur dont les choix sont toujours discutés, réfléchis, analysés avec sa petite équipe. «Le rôle du producteur ne se limite pas à celui de banquier, il doit porter une vision, une philosophie. Moi je préfère les interrogations aux réponses…»

Les rencontres et les relations humaines

Frères d'exil, sorti en 2005 Nue propriété, sorti en 2006 L'amour caché, sorti en 2007 Sous le figuier, sorti en 2012 Une part du ciel, sorti en 2002

S’il refuse de citer l’un ou l’autre film comme jalon de son parcours de producteur, estimant que «ce sont les rencontres et les relations humaines qui constituent les jalons», on ne peut pas l'éloigner de son travail de réalisateur. L’ambitieux et très personnel projet «Terra mia – Terra nostra» est à ce titre le «plus important projet de [ma] vie, à la fois le plus personnel et celui qui m’a rapporté le plus de réactions». Démarré en 1998, puis en 2012, le film s’interroge sur l’identité, les racines à travers le parcours du réalisateur et de sa famille. «Je n’aurais pas pu faire ce film si je ne l’avais pas produit moi-même. J’ai joui d’une liberté totale.»

Aujourd’hui, Tarantula fête donc ses 20 ans, avec la projection du film Secrets of War qu’il a coproduit avec les Pays-Bas. «Une belle réussite, car c’est un film pour enfant qui interroge tout le monde et qui a déjà fait une belle carrière en festival.» L’anniversaire se poursuivra avec une fête au CarréRotondes. «Je ne voulais pas d’un anniversaire sous forme de lauriers ou d’hommage. C’est une fête pour célébrer une étape.»

20 Years of TARANTULA from Tarantula Luxembourg on Vimeo.

Au-delà de cette journée, c’est toute l’année qui verra cet anniversaire être célébré: sorties de plusieurs coproductions importantes (Le chant des hommes, La volante), présentation d’un livre, réalisation et production du film Dreams have a language, coréaliséavec l’artiste Sylvie Blocher, «une nouvelle expérience, une nouvelle remise en question» et, dès samedi, présentation du nouveau film de Donato Rotunno, Baby(a)lone, produit par Iris Production.

Le chant des hommes, sorti en 2015

Et la suite? Le producteur et réalisateur travaille d’arrache-pied à l’écriture d’un nouveau film avec l’auteur Jean Portante. «Sara Sara a obtenu du soutien en Allemagne, au Luxembourg et en Italie. C’est important de réfléchir avec une dimension internationale.» Donato Rotunno veut que l’on considère les producteurs luxembourgeois comme des partenaires: «l’outil d’aide à la production doit être utilisé pour promouvoir des histoires, quel que soit le passeport de ceux qui les portent.»

www.tarantula.lu