Le four actuel du site d’Esch-Belval est alimenté par 12 types de mitraille différents, pour une capacité totale de 170.000 tonnes et la température y atteint 1.600 degrés. Un nouveau four sera installé en 2024, pour un investissement de 55 millions d’euros. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

Le four actuel du site d’Esch-Belval est alimenté par 12 types de mitraille différents, pour une capacité totale de 170.000 tonnes et la température y atteint 1.600 degrés. Un nouveau four sera installé en 2024, pour un investissement de 55 millions d’euros. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

Pour marquer la nouvelle année, ArcelorMittal a fait le point sur ses projets en cours et à venir le 25 janvier. Le groupe industriel qui possède cinq sites à Luxembourg a un objectif en vue: réduire de 35% ses émissions de carbone d’ici 2030.

Roland Bastian, head of country Luxembourg, a introduit la cérémonie des vœux mercredi 25 janvier en rappelant ce à quoi devait faire face le secteur industriel dans un contexte de crise énergétique dont le monde n’est pas encore sorti. Il relève trois tendances dans la sidérurgie.

À commencer par la décarbonation, puisque «la production d’acier est responsable pour 6 à 7% des émissions de CO2 anthropogéniques dans le monde». , moyennant notamment 130 millions pour ses sites luxembourgeois de Belval et Bissen. Roland Bastian note ensuite l’émergence d’une nouvelle complexité dans le secteur, faisant observer que les États semblent revenir de la globalisation, un phénomène qui s’est accentué depuis la guerre en Ukraine. La tendance est à la création de marchés locaux pour sortir de la dépendance d’une région primoproductrice.

Ce qui amène à la troisième tendance: repenser tout le système de connexions entre producteurs et distributeurs. «Le monde aura toujours besoin d’acier, un acier neutre en carbone. Cependant, depuis 30 ou 40 ans, il n’y a pas eu assez d’investissements dans les infrastructures, notamment ferroviaires. Les autres pays commencent à y remédier, nous devons rester compétitifs et cela passera par un fort soutien de l’Union européenne.»

Un moteur de l’économie 

En 2023, la consommation mondiale d’acier devrait connaître sa troisième récession annuelle sur les quatre dernières années avec une baisse de 1,9% (c’était -3,5% en 2022). Pour le 3e trimestre 2022, le groupe annonce avoir réalisé un bénéfice d’exploitation à 2,7 milliards de dollars (contre 5,2 milliards au 2e trimestre), plaçant le bénéfice d’exploitation sur 9 mois à 12,9 milliards. Les chiffres de l’année entière seront annoncés plus tard, en février. «L’énorme volatilité et beaucoup d’incertitudes poussent nos clients à retarder les commandes», analyse Roland Bastian, «heureusement, notre cash flow est resté positif à 1,1 milliard de dollars et la dette a diminué pour atteindre 3,9 milliards, notre meilleure performance depuis la crise de 2009.»

Alors que les marchés de la construction (34% des parts de marché), de l’automobile (18%), puis de la mécanique (14%) constituent les trois quarts de la consommation d’acier en Europe, Roland Bastian a rappelé que les usines luxembourgeoises travaillent essentiellement pour la construction. Les cinq sites du sidérurgiste (Esch-Belval, Differdange, Rodange, Dommeldange et Bissen) y emploient 3.420 personnes issues de 64 nationalités différentes. 1,9 million de tonnes d’acier y ont été produites en 2022 (mais la capacité en temps «normal» est de 2,2 millions de tonnes). À noter que 95,4% de matériaux sont recyclés dans la production d’acier liquide.

Dans l’Union européenne, nous rencontrons des blocages pour trouver des subsides. Ce qui risque de ralentir nos projets.
Roland Bastian

Roland Bastianhead of countryArcelorMittal Luxembourg

Le groupe estime donc qu’il contribue à l’économie luxembourgeoise à hauteur de 364 millions d’euros. «Nous avons des projets d’investissements lourds pour atteindre nos objectifs. Pour cela, nous avons besoin de fonds publics, car nous ne pouvons pas tout autofinancer. Or, au sein de l’Union européenne, nous rencontrons des blocages pour trouver des subsides. Ce qui risque de ralentir nos projets», s’inquiète le patron luxembourgeois.

Des investissements pour booster la performance et la décarbonation

55 millions d’euros vont être investis dans un nouveau four à arc électrique sur le site d’Esch-Belval. Le four actuel dispose d’une capacité de 170.000 tonnes, en deux prises de mitraille (résidus de métaux issus de déchèteries et de ferrailleurs qui alimentent le four) et une fournée, dont la température monte à 1.600 degrés. Le nouveau sera en mesure de fournir 15% de capacité supplémentaire et d’alimenter ainsi une nouvelle production (acier pour les rails de trams et de trains) depuis le laminoir de Belval.

«L’efficacité énergétique et l’empreinte CO2 seront améliorées. Nous pourrons augmenter la capacité et l’autosuffisance en acier pour alimenter le laminoir de Rodange», précise Pierre Jacobs, CEO de LPL (branche Long Products d’ArcelorMittal à Luxembourg). Les quatre sites de LPL réalisent 25% des ventes de la branche Produits longs du groupe en Europe et comptent deux aciéries, quatre laminoirs et une station de réparation et maintenance. Un système de dégazage sous vide et une réorganisation de la coulée continue font que le projet coûtera globalement 100 millions d’euros, avec une mise en service estimée en 2024.


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Lorsque l’offre en énergie verte sera disponible, le nouveau four pourra être alimenté en hydrogène, ou par davantage d’induction électrique issue d’énergies renouvelables. Un projet de collaboration avec le List (Luxembourg Institute of Science and Technology) prévoit aussi de réutiliser la chaleur produite par les fumées pour créer du chauffage ou de l’électricité qui serait réinjectée dans le réseau urbain local.