Les élections sociales vont désigner dans les entreprises les délégués du personnel et permettre le renouvellement de l’assemblée de la CSL.   (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne/Archives)

Les élections sociales vont désigner dans les entreprises les délégués du personnel et permettre le renouvellement de l’assemblée de la CSL.   (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne/Archives)

Les élections sociales se tiendront ce 12 mars 2024. Élections au pluriel, car les votants voteront à deux reprises: une première fois pour la mise en place des délégations du personnel dans les entreprises et une deuxième afin d’élire les membres de la Chambre des salariés au niveau national. 

En juin 2022 s’est ouvert avec une séquence électorale qui s’achèvera ce 9 juin avec les élections européennes, le point d’orgue ayant été dernier. Mais d’ici juin, une autre échéance, moins médiatique, mais tout aussi importante aura lieu le 12 mars: celle des élections sociales. Des élections au pluriel, car les électeurs vont voter pour la mise en place des délégations du personnel dans les entreprises de plus de quinze salariés et aussi pour renouveler l’assemblée plénière de la Chambre des salariés (CSL). Assemblée qui compte 60 membres – tout comme la Chambre des députés, ce qui est en soi assez symbolique – et dont les pouvoirs restent méconnus.

Dans l’imagerie populaire, la CSL, c’est avant tout la formation continue des salariés. Mais pas que… La CSL est une instance qui compte dans la vie politique, bien nantie en moyens tant humains que financiers et qui est associée à la procédure législative via les avis qu’elle rend. C’est une spécificité luxembourgeoise: chaque fois qu’un projet ou qu’une proposition de loi ou encore un règlement grand-ducal touche à un secteur professionnel dont les intérêts sont défendus par l’une des cinq chambres professionnelles que compte le pays – à savoir outre la Chambre des salariés, les chambres de commerce, des métiers, d’agriculture et des fonctionnaires et employés publics –, la ou les chambres concernées doivent rendre un avis.

Avis soigneusement analysés et souvent repris tout ou en partis par les ministères concernés ou par le biais d’amendements parlementaires. La CSL peut aussi directement faire des propositions au gouvernement pour les objets qui rentrent dans son champ de compétence.

Un outil méconnu de participation à la vie politique

Alors que les questions récurrentes de la représentativité de la Chambre des députés face à la démographie du pays et de la participation des étrangers au processus démocratique du pays ne débouchent sur aucune proposition concrète, l’élection à la CSL est assurément un instrument de participation des non-nationaux et des non-résidents à la vie publique. Un instrument largement ignoré… , seulement 32,6% des salariés avaient participé à l’élection. Et si le taux de participation des frontaliers aux élections précédentes a toujours été largement inférieur à celui des résidents, ces derniers restent faiblement mobilisés.

En marge de l’interview qu’il avait accordée en décembre à Paperjam, interview qui était, le Premier ministre, (CSV), avait été interrogé sur la question de la participation des non-Luxembourgeois à la vie publique du pays. Et si cette participation et cette intégration passe pour lui par l’apprentissage de la langue et par l’adoption largement ouverte de la nationalité luxembourgeoise, il constatait, pour le regretter, que si les non-résidents et les non-nationaux «sont très présents dans les entreprises, ils le sont beaucoup moins dans les organes représentatifs des organisations patronales qui sont quand même encore largement dirigées par des Luxembourgeois».

«Je veux aller à leur rencontre», ajoutait-il. «J’ai dit que je serais aussi le Premier ministre des non-luxembourgeois et je me sens dans cette situation. Ce sont eux qui contribuent au développement économique et social de notre pays et je leur en suis très reconnaissant. Mais cette gratitude n’est pas suffisante, donc je veux les entendre.» De ce point de vue, les chambres professionnelles sont un bon terrain d’entente. «47% de notre population active est constituée de frontaliers et presque la moitié de nos résidents qui sont des étrangers. C’est une particularité dont il faut tenir compte dans l’action politique, encore plus que par le passé. Les associer davantage à la chose publique est un défi énorme. Je chercherais tous les moyens pour les associer davantage et je suis ouvert à toute bonne suggestion.»

Vote par correspondance

Pour en revenir à l’élection du 12 mars, l’assemblée de la CSL est actuellement dominée par l’OGBL qui compte 35 représentants – et 37 depuis que le syndicat a absorbé la FNCTTFEL, le syndicat des cheminots qui avait obtenu deux représentants lors des élections de 2019. Viennent ensuite le LCBG (18 mandats), l’Aleba (4 mandats, tous dans le groupe 4 services et intermédiation financiers) et Syprolux (1 mandat).

Cette année, neuf organisations syndicales sont en lice. Avec par ordre de numéros de liste le LCGB (1), l’OGBL (2), l’Aleba (3), le FGFC – Gewerkschaft vum Gemengepersonal (4), Syprolux (5), le SEA – Syndicats des employés du secteur de l’aviation (6), la NGL-SNEP (7), la CLSC – Confédération luxembourgeoise des syndicats chrétiens (8) et la Neutrale Verband Gemeng Lëtzebuerg N.V.G.L. (9).

Tous les salariés, apprentis, retraités et demandeurs d’emploi, indépendamment de leur nationalité ou de leur lieu de résidence, sont membres de droit de la CSL. Soit un corps électoral théorique de plus de 600.000 personnes. Quasiment le double du corps électoral appelé aux urnes pour l’élection des députés (286.739 électeurs inscrits).

Les électeurs vont recevoir entre janvier et février – et au plus tard le 26 février – par courrier simple les bulletins de vote correspondant à la catégorie socioprofessionnelle des votants. Il en existe neuf: sidérurgie (5 sièges), autres industrie (8 sièges), construction (6 sièges), service et intermédiation financiers (8 sièges), autres services (14 sièges), administration et entreprises publiques (4 sièges), santé et action sociale (6 sièges), agents actifs et retraités de la CFL (3 sièges) et retraités (6 sièges). Les syndicats actifs dans ces différents secteurs y présentent leurs candidats.

L’électeur peut voter pour une liste, soit répartir ses voix sur différents candidats. Le vote se fait par correspondance et les électeurs ont jusqu’au 12 mars, jour du dépouillement, pour renvoyer leurs bulletins à l’adresse qui leur sera indiquée.

8.857 délégués du personnel

Pour ce qui est de l’élection des délégations du personnel, le vote se fait physiquement le 12 mars. Il est organisé par les entreprises selon un calendrier bien précis. Et si l’abstention et la marque des élections à la CSL, l’élection des délégués du personnel mobilise plus. En 2019, selon les chiffres de l’Inspection du travail et des mines (ITM), 3.359 entreprises ont mis en place une délégation du personnel et 8.857 délégués avaient été désignés. Dont 58,65% sans étiquette politique.

La mise en place des délégations du personnel n’est obligatoire qu’à partir d’un certain seuil d’effectif calculé sur une période de référence: au moins 15 salariés sur 12 mois. Ici du 1er février 2023 au 31 janvier 2024.

Dans les entreprises occupant moins de 100 salariés, le scrutin s’effectue d’après le système de la majorité relative. Dans les entreprises occupant au moins 100 salariés, le scrutin s’effectue suivant les règles de la représentation proportionnelle.

Pour être électeur, il faut être salarié de l’entreprise, avoir 16 ans accomplis et travailler depuis six mois au moins dans l’entreprise au jour de l’élection.

Pour être éligible il faut être salarié de l’entreprise, être âgé de 18 ans accomplis, travailler d’une façon ininterrompue pendant les 12 mois précédant le premier jour du mois de l’affichage annonçant les élections et être soit luxembourgeois, soit être autorisé à travailler sur le territoire. Les parents et alliés jusqu’au quatrième degré du chef d’entreprise, les gérants, les directeurs et le responsable du service du personnel de l’entreprise ne sont pas éligibles.