Selon EY, la mobilité évoluée des talents peut devenir un levier stratégique contre la pénurie de main-d’œuvre, à condition d’être alignée sur les objectifs organisationnels et soutenue par la technologie. (Photo: Shutterstock)

Selon EY, la mobilité évoluée des talents peut devenir un levier stratégique contre la pénurie de main-d’œuvre, à condition d’être alignée sur les objectifs organisationnels et soutenue par la technologie. (Photo: Shutterstock)

Dans son enquête «Mobility Reimagined», EY veut montrer que la mobilité des talents peut aussi être un levier intéressant pour combler les pénuries de talents. À condition que les organisations abordent cette opportunité de la bonne façon…

Dans un paysage économique instable, en Europe et ailleurs, et compte tenu d’une pression constante sur les coûts, les entreprises doivent faire face à un autre défi de taille: la pénurie de talents. Et selon EY, la mobilité – à condition qu’elle soit «évoluée», c’est-à-dire basée sur des services ou des technologies avancés pour améliorer et transformer les déplacements des travailleurs – pourrait résoudre bien des problèmes.

C’est ce que soulignait l’OCDE dans son rapport sur les compétences au Luxembourg en 2023, lorsqu’elle identifiait la mobilité internationale des talents comme un axe stratégique pour répondre aux pénuries de compétences. Ou encore le rapport du Conseil national de la productivité qui mettait en évidence l’impact de la mobilité des travailleurs sur la compétitivité du pays.

Dans son rapport publié fin avril, EY décortique le sujet en interrogeant plus de 1.000 professionnels. Le Big Four identifie plusieurs points essentiels à prendre en compte pour élaborer une stratégie de mobilité des talents en phase avec le monde actuel, ses défis et ses besoins. «Les organisations doivent considérer la situation actuelle comme une opportunité de repenser la mobilité en toute confiance face à un avenir incertain.»

EY donne ainsi des raisons concrètes de se pencher sur la question, comme la démographie, dont les évolutions «ont créé un déséquilibre entre les âges sur un marché du travail mondial où la population active est aujourd’hui plus nombreuse qu’elle ne le sera dans un avenir proche». Autre point d’attention à prendre en compte, le développement de l’intelligence artificielle générative qui engendre des changements dans le monde du travail, avec des salariés qui ne se sentent pas toujours prêts à les maîtriser à l’avenir.

Mais cette GenAI est aussi décrite par les répondants à l’enquête d’EY comme une opportunité pour combler les lacunes en matière de talents. Elle doit être adoptée comme «une étincelle disruptive pour obtenir un «avantage talents» et exige des organisations qu’elles alignent leurs modèles opérationnels de mobilité sur des objectifs commerciaux et de talents plus larges afin de «constituer des effectifs plus résilients et plus compétents».

Ainsi, pour EY, efficacité et agilité sont les mots d’ordre. «Parmi les employeurs, seuls 52% déclarent qu’il est facile pour leur organisation de trouver les talents internationaux nécessaires à leurs besoins, et 74% affirment qu’il faut plus d’un an pour pourvoir les postes à responsabilités». Ainsi, la mobilité de la main-d’œuvre peut être une solution pour déplacer les talents là où ils sont le plus nécessaires et accélérer la croissance d’une organisation.

Une approche en cinq étapes

Pour les entreprises qui souhaiteraient utiliser efficacement le levier de la mobilité en ce sens, EY souligne l’importance d’aligner la stratégie de mobilité sur les objectifs organisationnels et de gestion des talents. D’ailleurs, 90% des employeurs interrogés par EY y voient un avantage, mais ils sont toutefois 70% à ne pas y parvenir, en raison de «l’isolement des autres fonctions, d’un manque d’échange continu de données et d’inefficacités liées à un modèle opérationnel décentralisé».

EY suggère alors une approche en cinq étapes:

- aligner la stratégie de mobilité de la main-d’œuvre aux objectifs organisationnels plus larges;

- utiliser la mobilité pour attirer, retenir et développer les talents;

- étendre l’automatisation et la numérisation des processus de mobilité;

- faire preuve d’agilité et de flexibilité afin de pouvoir proposer des expériences de mobilité personnalisées selon les travailleurs;

- opter pour le co-sourcing ou l’externalisation de certains processus de mobilité.

Dans son rapport, EY met en avant les fonctions de mobilité évoluées, soit l’ensemble des services numériques, outils RH et politiques organisationnelles qui facilitent, optimisent ou accompagnent les déplacements professionnels, les changements de poste ou les reconversions des salariés. Elles concernent aussi bien la mobilité interne (dans l’entreprise) que géographique ou sectorielle (sur le marché du travail). «Les fonctions de mobilité évoluées sont 3,7 fois plus susceptibles de dire que leur fonction contribue à résoudre les pénuries de talents à moyen terme, 1,8 fois plus susceptibles de dire que la mobilité contribue de manière significative à stimuler la croissance de l’entreprise et 1,7 fois plus susceptibles de dire que la mobilité contribue de manière significative à renforcer la résilience organisationnelle», détaille le rapport.

Une façon (aussi) de réduire les coûts

Ces fonctions de mobilité plus évoluées – en plus de répondre aux enjeux d’attraction et de rétention des talents – ont aussi un intérêt sur le plan financier, puisque «96% des professionnels de la mobilité ont indiqué chercher à réduire leurs coûts», note EY. Certains employeurs privilégient l’externalisation ou un fournisseur pour la gestion de la paie, des démarches liées à l’immigration ou pour les impôts multijuridictionnels.

Le recours à la technologie n’est pas non plus une option dans la mise en place de politiques de mobilité, puisque «le nombre de professionnels de la mobilité utilisant régulièrement l’IA générative est passé de 22% l’an dernier à 35% cette année» et parce que «plus de trois employeurs sur quatre déclarent utiliser l’IA générative de trois manières ou plus pour mettre en œuvre leur programme de mobilité». Cela peut aller de la simple rédaction de mails à un usage plus pointu, comme la surveillance des affectations des employés, la signalisation de risques liés à l’immigration, la conformité d’un profil à un poste. Ce qui implique de former les professionnels de la mobilité à ces technologies.

Mais déployer la mobilité de la main-d’œuvre, au-delà des avantages, comporte aussi quelques risques que les organisations ne doivent pas sous-estimer. En guise d’exemple, EY cite les risques liés à la fiscalité, aux lois d’immigration, à la rémunération ou encore à la cybersécurité.