Relooking, suite. Bientôt quatre ans après son rachat par l’entreprise d’asset management , le centre commercial Belval Plaza continue sa mue à Esch-Belval. Depuis ce jeudi 7 décembre, il détient une carte supplémentaire dans sa manche: une plaine de jeux indoor.
Baptisée Hello Kids by Kouki, l’infrastructure s’étend sur 400 mètres carrés, en lieu et place de l’ex-zone snacking et ticketing du multiplexe Kinepolis. Aux manettes, Zoé Taillebe. Sous l’intitulé Kouki Kids, l’entrepreneuse française de 34 ans gère sa propre société, enregistrée depuis un mois. Population visée, les 4-12 ans. Le montant de l’investissement engagé par Firce Capital n’a pas été dévoilé.
«Nous avons une fréquentation à l’année de 7,5 millions de visiteurs. Mais sur ces 7,5 millions de personnes, il n’y a pas que des acheteurs. Ajouter ce genre d’offre transforme encore davantage nos visiteurs en acheteurs», décrit le directeur du centre commercial, Thierry Debourse.
Rester sur place pendant que leurs rejetons s’éclatent ou en profiter pour aller faire du lèche-vitrines, les parents ont le choix. Quatre salariés s’occupent des enfants, de leur sécurité et des locaux. Pour deux heures d’amusement, le billet d’entrée s’élève à 10 euros. Cette plage de deux heures fait écho à la durée moyenne d’une visite au Belval Plaza, de l’ordre de 1h20.
Zigzag, le pionnier
Hello Kids rejoint la liste d’une demi-douzaine d’acteurs présents sur le créneau de l’«indoor playground» au Luxembourg. Ancienne diplômée d’école de commerce, la Belge Stéphanie Vanhove en est la pionnière. En 2008, quatre ans après le lancement par ses soins, à Bertrange, d’une franchise The Little Gym dédiée à la pratique sportive – mais «non compétitive» – des tout-petits, elle plonge dans l’aventure Zigzag. À un numéro de rue de The Little Gym. «Les ouvriers sur le chantier me disaient: ‘Il y a des gens qui sont venus voir les travaux. Ils ont prétendu qu’ils allaient faire la même chose. Mais en mieux.’» Les projets d’alors n’ont pas tous abouti ou survécu. Mais quinze ans après, Zigzag est toujours là, fidèle au poste, sur 900 mètres carrés et deux niveaux.
«On n’a rien inventé, le concept existait déjà depuis une vingtaine d’années aux États-Unis», rembobine l’entrepreneuse et mère de trois enfants. «À l’époque, j’avais découvert l’enseigne Atomic Kids, à Arlon. J’avais trouvé ça génial. Mais ce n’était pas un lieu où, personnellement, je me serais posée pour ouvrir un livre. Le volume sonore, ce n’était pas confortable. Je souhaitais un espace où les parents s’y retrouvent aussi.»
En 2004, Stéphanie Vanhove, dans la vingtaine, avait ramé avant de dégoter un toit où faire prospérer son rêve The Little Gym. Seul le chef d’entreprise Pierre Federspiel, à la tête de la société éponyme de chauffage et sanitaires installée dans la même artère, lui avait tendu la main. Rien d’aussi compliqué avec Zigzag. «Pierre Federspiel en personne est venu me solliciter lorsque le bâtiment [qu’elle occupe actuellement] a été disponible. Précédemment, il avait accueilli une imprimerie et un concept d’ameublement pour enfants. ‘Vous n’avez pas envie de lancer quelque chose?’, m’a demandé Pierre Federspiel. Il en avait marre d’avoir des business faisant faillite.»
Zigzag, qui fonctionne avec huit équivalents temps plein, a réalisé 680.000 euros de chiffre d’affaires en 2022 (contre 200.000 euros l’année précédente, post-Covid). Ses revenus proviennent pour deux tiers de l’organisation de fêtes d’anniversaire. Créneau porteur. Au Belval Plaza, celles-ci peuvent être couplées à une séance de ciné à Kinepolis.
Trois jours sur sept
«Ce n’est pas une activité commerciale comme les autres. L’enfant est au centre de l’attention, mais il faut également plaire aux parents», décrit le propriétaire de l’enseigne Yoyo, Steve Darné. Père de famille, le gérant de la holding conçue avec son ex-associé , a la main sur une vingtaine d’adresses existantes ou en gestation, dans des domaines d’activité allant de la restauration (majoritairement) à l’immobilier. À Howald, Yoyo et son millier de mètres carrés au sol emploie entre 15 et 20 salariés selon les périodes de l’année, pour un chiffre d’affaires 2023 attendu autour des 2 millions d’euros.
Son petit «plus»: la restauration, avec une cuisine autant que possible «faite maison». Steve Darné en avait ras-le-bol de la junk food servie dans les lieux de loisirs où il conduisait ses filles lorsqu’elles étaient en âge de porter des couettes. Le business est atypique: «On paye un loyer pour sept jours, avec de la fréquentation pendant trois jours seulement. Il arrive que l’on travaille à perte», pointe-t-il.
Par comparaison, l’espace Hello Kids d’Esch-Belval est mieux loti. «Contrairement aux autres, on ne va pas fonctionner de manière ponctuelle, durant les vacances et les week-ends. Nous, on a un business model continu. Il y a entre 25 et 30.000 visiteurs par jour et le samedi, cela monte à 45.000. Pour autant qu’elle soit bien positionnée, l’activité est pérenne du fait de ce flux permanent», résume le directeur du centre commercial, Thierry Debourse.
Steve Darné en convient: «Aux États-Unis, on est sur la tendance des ‘family entertainment centers’. C’est plus dur à développer au Luxembourg. Mais l’idée, c’est de fidéliser les clients.» Raison pour laquelle le patron de Yoyo s’attelle à une proposition complémentaire avec l’ouverture d’un lieu pour les plus grands, combinant escape game, bowling et karaoké, entre autres défouloirs. Ça s’appellera le Strike. Comme une passerelle entre les âges, Yoyo et le Strike seront voisins. Rendez-vous en avril 2024.
Marge et frais d’entretien
«Le marché est dynamique, mais c’est un micro-marché», note Laurent Payen, dirigeant d’ADJ, la marque commerciale dédiée à l’espace francophone de la société espagnole Entretenium, l’un des rares fabricants d’aires de jeux intérieures en Europe. Dans son portefeuille, des clients tels que Burger King, Decathlon, Leclerc ou Subway.
«Le marché de l’extérieur est énorme [grâce notamment aux commandes des collectivités, nombreuses à aménager leurs parcs et jardins]. Or, les acteurs de l’extérieur ne font pas d’intérieur et ceux de l’intérieur font assez peu d’extérieur», remarque le spécialiste, dont la zone de chalandise englobe le Benelux. «Pour une plaine de jeux, la dette senior est de 7 ans. Au-delà, la marge explose», explique-t-il.
Le catalogue des innovations évolue peu au fil du temps. Ce sont plutôt les lignes budgétaires consacrées aux réparations et au remplacement de matériel qui sont en mouvement. «Sans compter la main-d’œuvre, j’y consacre 50.000 euros à l’année», calcule le gérant de Yoyo, Steve Darné.
Pour sa part, Hello Kids by Kouki s’est appuyé sur l’expertise du français Bleu & Associés, habitué à travailler à l’international (Benelux, Allemagne, Italie, Maroc, Égypte). Le cabinet a assuré, entre autres, la réalisation d’un double filet tendu de plusieurs dizaines de mètres de long probablement unique en Europe de par ses dimensions, tricoté sur mesure.
Avec cette plaine de jeux, Belval Plaza ambitionne d’asseoir son positionnement de «mini-ville dans la ville». «Le retail se transformant, l’apport de services constitue de plus en plus une plus-value pour un centre commercial», ajoute Thierry Debourse. Après Hello Kids, deux ouvertures sont épinglées à l’agenda. Une grande enseigne de sportswear est sur le point de boucler l’occupation d’une surface de 1.200 mètres carrés (mais l’identité du magasin n’a pas encore filtré), tandis qu’en octobre 2024 sera accessible le ‘food hall’ de 1.600 mètres carrés ayant demandé entre 12 et 15 millions d’euros d’investissement. «Le ‘food hall’, ce sera la cerise sur le gâteau.»
Ne reste plus qu’à trancher: le resto, avec ou sans les enfants?