Merci de vous présenter Virginia.
Virginia Strong . «Je m'appelle Virginia. Je viens d'Atlanta, en Géorgie, mais j’ai vécu un peu partout : en Malaisie, en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Espagne, à Londres, au Viêt Nam… et maintenant au Luxembourg. Je suis arrivée ici en mars 2019 pour rejoindre Amazon. À l’époque, je travaillais dans leurs bureaux londoniens et je faisais la navette chaque semaine: je logeais au Novotel, je descendais la colline le long de l’Alzette, passais devant le Melusina pour rejoindre les bureaux de Clausen. Un jour, je me suis dit que plutôt que de prendre l’avion toutes les semaines, autant m’installer ici. J’avais deux jeunes enfants, alors je me suis dit: allez, cap sur le Luxembourg!
Et quelles ont été vos premières impressions lors de ces visites?
«Comme je l'ai dit, je passais par Grund et Clausen... donc mon impression du Luxembourg était que c'est une jolie boule à neige européenne que l'on secoue. Sauf qu'il n'y a pas de neige. Mais c'est ainsi que je le décris toujours. C'est comme une belle petite ville dans une boule à neige. Qu'il s'agisse du Melusina ou d'un festival du vin à Remich, on retrouve cette belle et mignonne Europe. C'est ce que j'ai vu à chaque fois que j'ai voyagé ici. C'était à l'époque où les bureaux d'Amazon se trouvaient à Clausen, et non à Kirchberg... je n'ai donc pas ressenti ce genre d'ambiance d'entreprise.
Pouvez-vous préciser ce que vous entendez par "mignonne européanité" ?
«Sûr... vous avez le palais grand-ducal, non? Il y a des gardes devant. Vous avez le fait que le palais se trouve à côté de plusieurs bars. L'une des premières fois que j'y ai bu, nous avons tous dû prendre nos chaises et nous déplacer pour que le Grand-Duc puisse descendre la rue en voiture pour rentrer chez lui. Cela n'arriverait jamais à Londres.
Ou, vous savez, les rues pavées... regarder Clausen et le Grund quand vous êtes sur les casemates... aller dans un bar à vin niché au fond d'une ruelle... c'est charmant. Quand il fait beau. Mes enfants appellent le Luxembourg «Rainbourg», si vous voulez parler de météo.
Vous avez vécu dans de nombreux pays: comment le Luxembourg se distingue-t-il, notamment en matière de culture du travail?
«Je trouve que la culture du travail au Luxembourg offre un bon équilibre entre vie professionnelle et vie privée. On travaille dur en semaine, mais les week-ends sont vraiment préservés – j’apprécie beaucoup cela. Ce que je trouve remarquable aussi, c’est la diversité des profils : le pays attire de nombreux talents, et sa taille facilite leur fidélisation. Avec ma start-up, Partao, j’ai pu m’appuyer sur ces ressources pour faire grandir l’entreprise. Nous avons recruté des profils exceptionnels, portés par la richesse multiculturelle du Luxembourg.»
Ah bon? On entend pourtant souvent l’inverse: que le Luxembourg peine à attirer des profils pour des raisons strictement professionnelles.
«Je pense que cela dépend vraiment du moment de la vie où l’on se trouve. Au Luxembourg, les parents de jeunes enfants sont clairement les mieux servis. Je pourrais parler pendant des heures des avantages de la vie à Merl : nous avons une communauté locale incroyable, en pleine ville. J’accompagne mes enfants à l’école et je croise tous les autres parents dans la rue – c’est un esprit de quartier qu’on ne retrouve pas dans les grandes métropoles. J’aime ce côté pittoresque. Et je pense que c’est ce qui fait la force du pays : des talents venus du monde entier s’installent ici avec leurs enfants, et comme le Luxembourg est particulièrement accueillant pour les familles, cela favorise leur ancrage. Quand on recrute des profils entre 30 et 45 ans, c’est là qu’on trouve une vraie richesse de talents. Cela dit, oui, si vous cherchez à embaucher un directeur commercial, le Luxembourg n’est sans doute pas l’endroit rêvé: le marché est trop étroit.
Est-ce que vous avez une expérience de start-up en dehors du Luxembourg? Comment comparer?
«Oui. J’ai déjà aidé une start-up à s’implanter en Europe, mais dans ce cas-là, il n’y avait que du capital-risque, uniquement de l’argent institutionnel. Aucune aide publique, point final. C’est pareil aux États-Unis ou au Royaume-Uni. En Malaisie, tout passe en dehors des circuits gouvernementaux… tout y est un peu plus flou. Ici, au Luxembourg, on travaille avec la Chambre de commerce, avec des acteurs comme ProLuxembourg : c’est une approche collective, là où ailleurs on agit surtout dans une logique pro-capitaliste, pro-individuelle. Cette dynamique tire tout le monde vers le haut.
L’opportunité pour les start-up est vraiment exceptionnelle. Partao participe au programme Fit 4 Start, nous venons de déposer notre dossier pour le Fonds des jeunes innovateurs, et nous sommes accompagnés par la société de capital-risque locale Mangrove. Le soutien reçu – que ce soit de la part d’acteurs privés, de la Chambre de commerce, de Luxinnovation ou de Pulse – est unique. C’est une aide que nous n’aurions jamais eue ailleurs, surtout pas du côté des institutions publiques. Créer une start-up au Luxembourg est un vrai plaisir. J’en profite pleinement.
Vous disiez que le Luxembourg est particulièrement adapté aux enfants. Pouvez-vous nous en dire un peu plus?
«Bien sûr. En tant qu’Américaine, l’un des grands avantages de vivre en Europe, c’est que mes enfants apprennent des langues – ce que je n’ai jamais eu l’occasion de faire en grandissant. Dès notre arrivée, je les ai inscrits dans une crèche francophone (impossible d’obtenir une place en crèche luxembourgeoise sans avoir réservé cinq ans à l’avance !). Ma plus jeune a donc appris le français avant l’anglais. Ensuite, ils sont allés à l’école communale et ont appris le luxembourgeois. Aujourd’hui, ils le parlent avec tous leurs amis – et même entre eux à la maison. Quand je leur dis que j’apprends le luxembourgeois, ils me répondent en riant : ‘Alors on parlera français entre nous. Et si tu l’apprends, on passera à l’allemand. Et quand tu sauras ça, tu auras déjà oublié l’anglais !’ C’est adorable. J’aime qu’ils aient cette confiance, et qu’ils soient déjà meilleurs que moi.
Plus largement, ce que j’apprécie ici, c’est que, même si les familles viennent du monde entier, elles partagent des valeurs très similaires en matière d’éducation. C’est un vrai plaisir de voir ses enfants évoluer dans un environnement scolaire où les parents comme les enseignants sont investis. Tout le monde nous a réservé un accueil chaleureux. Bien sûr, il y a des expatriés qui cherchent à créer du lien et des Luxembourgeois un peu plus discrets, mais l’ouverture a été réelle. Les enseignants nous ont beaucoup soutenus. Je ne dirais pas que tout a été facile – il y a eu des hauts et des bas –, mais l’intégration s’est faite le plus sereinement possible. À mes yeux, le Luxembourg est probablement l’un des meilleurs endroits au monde pour s’installer avec des enfants.
Et côté démarches, comment s’est passée votre installation au Luxembourg?
«J’ai eu la chance d’être accompagnée par un agent de relocation fantastique, donc la recherche de logement s’est déroulée sans encombre. Ce que je recommanderais à toute personne qui s’installe ici, en revanche, c’est de penser à convertir son permis de conduire à temps [NDLR : pour les conducteurs titulaires d’un permis non européen, le Luxembourg permet une conversion dans l’année suivant l’arrivée].
Dans mon cas, c’était pendant la période Covid, les bureaux étaient fermés, et je n’ai pas pu faire la démarche. J’ai essayé de me battre contre la loi… mais la loi a gagné !
Oh non... vous avez donc dû repasser l’examen?
«Oui, je veux dire… je dois encore le faire ! Cela dit, au lieu de convertir mon permis et d’acheter une nouvelle voiture, j’ai opté pour le vélo – que j’adore utiliser. Et puis, les transports en commun sont gratuits et très pratiques. Même quand les enfants sont invités à un anniversaire à 40 minutes d’ici, il y a toujours plein d’autres enfants du quartier qui y vont aussi. On s’organise facilement.
Vous vous débrouillez sans voiture ?
«Je vais au travail en bus ou à vélo, tout le reste est accessible à pied... c'est facile. J'essaie de le faire. Cela fait cinq ans que je ne conduis pas. On verra bien.
Et est-ce que quelque chose vous a surpris dans la vie de tous les jours ici?
«Tondre sa pelouse le dimanche… Je ne connaissais pas cette règle jusqu’au jour où mes voisins m’ont crié dessus que c’était interdit!»
Cet article a été rédigé initialement en anglais et traduit et édité en français.