Marc Lauer a un objectif pour Foyer: «rester le premier assureur du Luxembourg et le premier choix pour tous ses clients». (Photo: Groupe Foyer)

Marc Lauer a un objectif pour Foyer: «rester le premier assureur du Luxembourg et le premier choix pour tous ses clients». (Photo: Groupe Foyer)

Alors que Foyer fête ses 100 ans ce jeudi 19 octobre, son directeur, Marc Lauer, a discuté avec Paperjam des perspectives de son groupe et des principaux défis qu’il va devoir affronter ces prochaines années.

a fait toute sa carrière dans le secteur de l’assurance. Il a rejoint le groupe Foyer en 2004 comme COO pour ensuite en prendre la direction en avril 2014. Il est également président du conseil d’administration de l’ACA, l’association des assureurs et réassureurs du Luxembourg.

Où voyiez-vous le groupe Foyer dans 100 ans?

Marc Lauer. – «100 ans, c’est loin. Je ne sais pas où nous serons, mais nous avons une ambition: rester le premier assureur du Luxembourg, le premier choix pour tous nos clients, particuliers comme entreprises. Tant dans nos activités d’assureurs, que dans nos activités patrimoniales.

Dans le temps, on faisait des stratégies à très long terme. Aujourd’hui, on se donne plutôt les moyens d’être agiles et de répondre rapidement, par rapport à un futur qui est très incertain. Il y a quand même des certitudes: le monde sera plus ‘tech-driven’, plus ESG et dans cet environnement, les clients de demain se comporteront différemment des clients d’aujourd’hui.

Justement, comment évoluent les besoins des clients?

«L’assurance à plusieurs missions. La première, c’est la protection du patrimoine. Et ce sera toujours le cas, même si les risques pouvant toucher un patrimoine peuvent évoluer. Demain, il y aura de nouveaux risques comme le cyberrisque qui s’ajouteront aux risques traditionnels, comme par exemple l’incendie.

L’autre volet, c’est la prévoyance. Contre les aléas de la vie, mais aussi pour financer sa retraite. Et même si les politiques n’aiment pas parler du ‘mur des retraites’ comme l’appelait Jean-Claude Juncker, ce mur est là. La prévoyance personnelle deviendra plus importante. Je ne dis pas que le premier pilier disparaîtra, il doit jouer son rôle social. Mais il y aura pour l’assurance privée un rôle de plus en plus important à jouer. Il est probable que toutes les promesses du système actuel des retraites publiques seront dures à honorer sans changements fondamentaux, soit au niveau des cotisations, soit au niveau des prestations. Tout est dit dans le dernier rapport de l’IGSS (Inspection Générale de la Sécurité Sociale).

On digitalise beaucoup en étant convaincu que le contact personnel dans certaines situations est extrêmement important.
Marc Lauer

Marc Lauer CEOFoyer

L’un des grands défis qui se posent aux assureurs est celui de l’évolution de la sinistralité, notamment avec la multiplication d’évènements climatiques de plus en plus graves. Qu’est-ce que cela implique pour vous en termes d’évolution de primes et de garanties d’assurances?

«Je crois d’abord que ces catastrophes naturelles rappellent l’importance de l’assurance. On a vu à quel point un évènement peut toucher fondamentalement votre patrimoine. C’est pour cela que nous avons proposé très largement à nos clients, depuis les inondations de 2019, des couvertures contre ce risque particulier.

Bien sûr, le cumul de tels épisodes à un coût. 230 millions pour les dernières tempêtes et inondations. C’est énorme. Pour y faire face, les assureurs doivent être bien capitalisés. C’est le cas du Foyer. Et ils ont recours aux services de réassureurs. Des réassureurs qui ont augmenté leurs primes. Et nous avons dû faire la même chose. Mais n’oublions pas que la prime catastrophe naturelle ne représente qu’un pourcentage très limité de votre prime totale.


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Les assurances catastrophes naturelles ne devraient-elles pas devenir obligatoires?

«Les rendre obligatoires? En Allemagne, on a un dicton qui dit ‘la propriété n’amène pas uniquement des droits, mais aussi des obligations’. Vous devez protéger votre patrimoine. C’est un choix personnel. Nous conseillons à nos clients de s’assurer. En 2021, entre 85% et 90% de nos clients avaient la couverture nécessaire pour être indemnisés.

Le secteur de l’assurance peut-il indéfiniment faire face à ces épisodes de catastrophes naturelles qui se répètent de plus en plus souvent? Où est la limite?

«Je crois qu’au Luxembourg, pour l’instant, si la sinistralité augmente, le secteur tiendra bon. Alors, évidemment, si tous les 15 jours nous avons un épisode de ce type, on atteint les limites de ce qui est assurable. Maintenant, si votre question est de savoir si dans cinq ans les assureurs – et le groupe Foyer – auront les moyens de faire face, je vous dis oui.

Depuis 2006, le siège du Foyer est installé au 12, rue Léon Laval à Leudelange. (Photo: Foyer)

Depuis 2006, le siège du Foyer est installé au 12, rue Léon Laval à Leudelange. (Photo: Foyer)

L’autre grand défi qui se pose aux assureurs est celui de l’impact de la digitalisation sur vos activités. Quelles sont la position et la stratégie de Foyer sur ce thème?

«C’est effectivement un grand défi opérationnel. Nous avons déployé une stratégie appelée la ‘distribution multicanal intermédiée’. Il y a deux mots importants: multicanal – on veut parler avec nos clients via tous les canaux qu’ils choisissent – et intermédiaire – on croit que le conseil personnalisé d’un professionnel est extrêmement important. Donc, on digitalise beaucoup en étant convaincu que le contact personnel dans certaines situations est extrêmement important. Nous avons une application qui s’appelle MyFoyer où le client peut consulter ses contrats, faire des démarches simples ou encore payer ses primes. Beaucoup de choses sont possibles, mais rien n’est obligatoire.

Personnellement, je ne crois pas à la relation client 100% désintermédiée. D’abord parce qu’un certain nombre de produits que nous offrons à nos clients ne sont pas si simples que cela et les engagent à long terme. Un conseil personnalisé peut aider. Ensuite, lorsque survient un sinistre, les clients ont besoin d’avoir un contact, d’être accompagnés et d’être rassurés.

Pour les banques, la digitalisation a des impacts directs sur le réseau des agences qui se réduit. La même évolution est-elle en train de se passer pour le secteur de l’assurance en général et pour Foyer en particulier?

«Nous avons un régime différent de celui des banques. Tous les agents sont nos mandataires. Ils font partie de la famille Foyer, mais pas de l’entité juridique. Ils sont économiquement indépendants. Tant qu’ils respectent les conditions de notre mandat – vendre exclusivement nos produits – et que leur activité est économiquement raisonnable, alors pourquoi pas.»