Les marchés privés sont-ils la solution aux vents contraires qui frappent de face les marchés boursiers mondiaux? La question a le mérite d’être posée au regard des 8.000 milliards d’euros d’actifs sous gestion au 21 décembre 2021, selon l’Alfi. Surtout que «nous avons également assisté à une diversification étendue des classes d’actifs, de la conception des produits, des mécanismes de liquidité et de l’horizon temporel», note , partner chez EY Luxembourg, en amont d’un panel de discussion lors de la Global Distribution Conference organisée le 20 septembre par l’Alfi.
Cette activité plus importante, plus variée et complexe sur les marchés privés semble donc répondre à un constat alarmant sur les marchés boursiers. «En 2022, il y a moins de la moitié du nombre de sociétés en bourse aux États-Unis, ce qui n’était plus le cas depuis longtemps», observe, quant à lui, Ed Venner, chief operating officer chez Franklin Templeton. Une aubaine donc pour les marchés privés? «Il y a fondamentalement plus d’opportunités de générer des rendements sur les marchés privés qu’il y a encore cinq ans», poursuit Ed Venner.
Vision court terme ou long terme?
Tout pousse donc les gestionnaires d’actifs à examiner les marchés privés en vue d’adapter leur offre à leur clientèle. C’est d’ailleurs l’une de leurs missions qui ressort de leur responsabilité fiduciaire. Malgré tout, les marchés privés restent difficiles d’accès pour les investisseurs particuliers.
«Les investisseurs particuliers attendent une certaine forme de liquidité mensuelle ou trimestrielle», indique pour sa part Joshua Stone, managing director chez EQT Fund Management. Et il ajoute: «Lorsque nous avons affaire à des investisseurs particuliers, ils envisagent d’acheter une voiture. Puis, cinq ans plus tard, ils envoient leurs enfants à l’université. Et ils prennent leur retraite… peut-être 20 ans après.» La recherche de rendement se trouve donc diamétralement opposée aux investisseurs institutionnels qui adoptent une vision long terme.
Pourtant, Joshua Stone se refuse d’être qualifié de pessimiste. Il nuance: «Je suis convaincu qu’il y a évidemment énormément d’opportunités, mais il faut les gérer correctement.» Pour ce faire, il souligne l’importance de l’éducation financière tant des investisseurs finaux que des conseillers financiers eux-mêmes. Les barrières à l’entrée des marchés, les restrictions sur les rachats, les frais de rachats et la liquidité parfois limitée constituent autant de raisons pour lesquelles les actifs privés ne correspondent pas aux attentes de l’entièreté de la clientèle particulière.
Des changements réglementaires
Si l’intérêt des particuliers a grandi pour les marchés privés, les législateurs ont également dû se pencher sur la question. «La montée de l’intérêt des investisseurs particuliers pour cette classe d’actifs a évidemment amené les autorités et les gouvernements à examiner comment leur en ouvrir les portes», explique , partner chez Linklaters. «Aux États-Unis, la Securities & Exchange Commission (SEC) s’est penchée sur la définition de l’investisseur qualifié et l’a élargie il y a quelques années. Nous assistons également à une augmentation des fonds d’investissement ouverts gérés aux États-Unis», précise-t-elle.
En Europe, la révision en cours de l’Eltif (European Long-term Investment fund regulation) devrait également porter sur un élargissement de la notion d’investisseur particulier. Ce changement s’adresse cependant davantage aux particuliers fortunés qu’aux clients particuliers classiques. La modification du cadre réglementaire ne supprime en aucun cas les barrières d’accès aux marchés. Ces dernières, principale cause d’illiquidité des actifs privés, pourraient bien disparaître avec l’émergence des .