Dans l’immobilier résidentiel, la concentration de la demande sur le segment locatif fait craindre à Robby Cluyssen de JLL Luxembourg une hausse des loyers et une pénurie de l’offre. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Dans l’immobilier résidentiel, la concentration de la demande sur le segment locatif fait craindre à Robby Cluyssen de JLL Luxembourg une hausse des loyers et une pénurie de l’offre. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Entre la baisse des livraisons et des prises en occupation des bureaux et celle des transactions immobilières sur le segment résidentiel, le marché luxembourgeois a vécu une année 2022 chahutée au dire de l’agent JLL Luxembourg, qui espère une amélioration en 2023.

L’année 2022 est tout sauf un bon souvenir pour le marché immobilier au Luxembourg. Sur le segment des bureaux, les livraisons ont fondu de 58% à 154.462m2, tandis que la prise en occupation s’est effondrée de 43%, atteignant 212.273m2.

«Cette année reste positive parce que malgré la baisse de volume, nous avons enregistré le même nombre de transactions que les années précédentes», a insisté mercredi 25 janvier Lotfi Behlouli, director office agency chez JLL Luxembourg.

L’agent immobilier a recensé 248 opérations l’an dernier, deux de plus qu’en 2021. Mais leur taille a chuté de 44% sur une année. Seule éclaircie à l’horizon, l’État luxembourgeois a confirmé son rôle de catalyseur avec 14 transactions pour 40.000m2, soit près de 20% du volume total.

L’offre en bureaux reste contenue

La disponibilité des bureaux s’est stabilisée à 3,5%, un taux parmi les plus bas en Europe. À Paris, par exemple, il pointe à 7,5%, selon JLL. Les loyers ont poursuivi leur ascension avec 53 euros/m2/mois/HTVA dans le quartier central de Luxembourg-ville, le plus cher du pays. Cette progression de 2% n’est rien en comparaison au bond de 11% des loyers au Kirchberg (42 euros/m2).

«Il s’agit d’une croissance continue, mais jamais exponentielle des loyers», a commenté Lotfi Behlouli pour qui l’évolution n’est pas dangereuse. Ses perspectives pour 2023 sont d’ailleurs positives, avec plusieurs transactions d’envergure dans le pipeline au premier semestre et une stabilisation des loyers attendue. 76.000m2 de surfaces spéculatives sont attendus cette année. «Nous avons une demande suffisamment soutenue pour combler le manque», a-t-il complété.

Les investissements en chute libre

L’optimisme s’est aussi frayé un chemin sur le marché de l’investissement, pour lequel Vincent Van Brée estime que «si 2022 restera une des années les plus faibles dans les volumes d’investissements, l’immobilier reste attractif à Luxembourg». Le head of capital markets chez JLL Luxembourg a mis en avant des prévisions de récession courte et légère, laissant présager une hausse des rendements et un redémarrage.

L’équipe de JLL Luxembourg a dressé le bilan de l’année écoulée avec de gauche à droite Lotfi Behlouli, Emna Rekik, Angélique Sabron, Vincent Van Brée et Robby Cluyssen. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

L’équipe de JLL Luxembourg a dressé le bilan de l’année écoulée avec de gauche à droite Lotfi Behlouli, Emna Rekik, Angélique Sabron, Vincent Van Brée et Robby Cluyssen. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

L’an dernier, le volume d’investissements a chuté de 34% à 836 millions d’euros, tandis que les rendements ont été affectés par la remontée des taux et sont passés de 3,25% à 3,9%. «Nous pensons que l’on est arrivé au plus bas et que les bonnes perspectives vont raffermir le moral des investisseurs», a-t-il pronostiqué.

Il n’empêche, ce contexte anxiogène et marqué par la remontée des taux d’intérêt freine les ardeurs des investisseurs, mais aussi des particuliers désireux d’accéder à la propriété. Entre décembre 2021 et juin 2022, l’agent a observé 16% de ventes en moins sur le résidentiel. La chute est particulièrement prononcée sur le neuf (-38% en six mois), alors que le nombre d’actes tend à se maintenir pour l’existant.

Le résidentiel broie du noir

«Pour 1% de hausse des taux d’intérêt, nous perdons 10% en pouvoir d’achat», a avancé Robby Cluyssen, director residential agency chez JLL Luxembourg. Celui-ci a admis que si les ventes – et donc la demande – diminuent, l’offre également: «Il y a une retenue des promoteurs.»

Pour l’agent, «la spéculation immobilière est à l’arrêt», entendez par là celle qui misait sur une hausse des prix de 10% à 15% par an. Toutefois, le pipeline s’alimente nettement moins, avec une chute de 27% des autorisations de bâtir octroyées entre janvier et septembre 2022 au Luxembourg.

Si les particuliers ne peuvent plus se permettre d’accéder à la propriété, comment font-ils pour se loger? JLL Luxembourg laisse entendre que la demande s’éloigne de la capitale et, parfois même, des frontières du pays.


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En revanche, un autre marché ne faiblit pas: celui de la location. Il représente 70% de la demande au dire de l’agent qui entrevoit un risque de hausse des loyers et de pénurie. Entre 2020 et 2021, les locations ont crû de 37% chez JLL Luxembourg, qui dit voir encore une croissance en 2022.

Mais le vote attendu cette année de fait craindre davantage de contraintes pour les propriétaires et, donc, moins d’attractivité pour cette classe d’actifs. D’autant que «le rendement de 3,5% en moyenne ne compense plus l’inflation de 6%», a illustré Robby Cluyssen.

Il prédit un ralentissement de la spéculation, un basculement du marché de l’investissement vers l’inactivité sans pour autant arriver à une baisse des prix, mais plutôt à une stabilisation. En coupant le robinet de l’offre face à la fermeture de celui de la demande, le marché semble trouver un nouveau point d’équilibre.