Malgré de vives oppositions, le projet de loi a bel et bien été voté. (Photo: Shutterstock)

Malgré de vives oppositions, le projet de loi a bel et bien été voté. (Photo: Shutterstock)

Les différents avis et communiqués des chambres professionnelles n’y auront rien fait, le projet de loi relatif à la protection contre le harcèlement moral à l’occasion des relations de travail a été voté ce jeudi 9 mars à la Chambre des députés.

«Il y a eu un dialogue social, il était bilatéral. À l’époque, pour le président de l’UEL, il était clair que le renversement de la charge de la preuve dans le cadre du harcèlement sexuel était exclu. J’ai eu la même discussion avec les syndicats: pour eux, le seul système faisable était d’introduire le renversement de la charge de la preuve. Un accord entre les deux n’était pas possible, tout simplement. On l’avait dans l’accord de coalition, j’ai fait la loi, c’est tout.» Dont acte, a répondu l’ancien ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Économie sociale et solidaire, (LSAP), et rapporteur du projet de loi relatif à la protection contre le harcèlement moral à l’occasion des relations de travail.

Le dialogue de sourds entre le gouvernement sur le sujet a donc été conclu par le vote de la loi ce jeudi 9 mars à la Chambre des députés. Pour Dan Kersch, «ceux qui ne pouvaient pas se mettre d’accord disent maintenant qu’il n’y avait pas de dialogue social. Mais ce n’est pas à cause de moi, c’est parce que les positions étaient si opposées que je savais dès le début que c’était impossible de trouver un accord.»

Un texte «pas assez précis»

Ce que réfutent de leur côté l’UEL et la Chambre des métiers, qui mettent en avant l’accord interprofessionnel «qui existe depuis 2009 et qui fonctionne très bien», explique , directeur général de la Chambre des métiers. «Nous dénonçons dans ce contexte l’insécurité juridique majeure pour les entreprises qui découlerait de la coexistence de deux régimes issus, l’un de la future loi, l’autre de la convention interprofessionnelle existante. Quelles failles a la convention pour avoir besoin d’une nouvelle loi?»

«Le ministre n’a consulté que les syndicats, mais nous, représentants des employeurs n’avons pas été consultés, et c’est en ça que le dialogue social a été bafoué. Nous avons écrit des lettres au ministre et même au Premier ministre (DP) mais elles sont restées sans réponse», confirme , directeur général de l’UEL.

Lors du vote de la loi à la Chambre des députés, le CSV et l’ADR se sont abstenus,  (CSV) argumentant que «nous soutenons l’initiative de cette loi mais on ne peut pas soutenir le texte en soi, le Conseil d’État et les différentes chambres professionnelles ont fait de nombreuses remarques qui n’ont pas été écoutées. Les personnes de devraient par exemple être intégrées à l’ITM. Le texte n’est pas assez précis et laisse trop de marges à l’interprétation juridique.»

Ce qu’on fait, ce n’est pas la révolution, on est loin des systèmes qui existent déjà dans d’autres pays. Moi j’ai fait ce qui était faisable.
Dan Kersch

Dan Kerschdéputé LSAP et ancien ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Économie sociale et solidaire

Même au sein des partis de la coalition, (DP) et (déi gréng) ont expliqué que des adaptations pourraient peut-être réalisées après l’entrée en vigueur du texte et l’analyse de cas pratiques. «Le mobbing est illégal, c’est ça le message le plus important de cette loi», a ajouté de son côté (Piratepartei). Une motion a d’ailleurs été adoptée après le vote invitant le gouvernement à réaliser «l’évaluation de la loi (…) deux ans après son entrée en vigueur afin de déterminer son efficacité et identifier les lacunes éventuelles qui doivent être comblées», explique le texte.

Pour Dan Kersch, «syndicats et UEL me disent que l’accord interprofessionnel ne va pas assez loin – il est de 2009, il n’est pas adapté au temps, il y a des lacunes. Et les deux sont incapables de trouver un nouvel accord. Alors il n’y a aucune autre possibilité que de légiférer. Maintenant, ce qu’on fait, ce n’est pas la révolution, on est loin des systèmes qui existent déjà dans d’autres pays. Moi j’ai fait ce qui était faisable», a-t-il répondu à Paperjam.

Désaccord entre syndicats et patronat

«Ce sont les syndicats qui pensent que l’accord interprofessionnel ne va pas assez loin, pour nous il fonctionne très bien», répond Jean-Paul Olinger. «Ce sont les syndicats qui ont estimé qu’une loi serait une meilleure solution, mais ce texte n’est pas assez précis, et au final on ne sait toujours pas, une fois la loi entrée en vigueur, quel sera le texte qui prévaudra sur l’autre en cas de dénonciation de harcèlement moral au travail? De notre côté nous ne dénoncerons pas l’accord interprofessionnel, mais la manière de faire du gouvernement va avoir un impact négatif sur l’avenir et sur le dialogue social.»

Pour le successeur de Dan Kersch, (LSAP), «ce que les chambres salariales et le patronat critiquent, c’est qu’il y a un accord interprofessionnel entre partenaires sociaux et qu’il ne faut pas de loi pour ça. Moi je trouve que premièrement une loi donne beaucoup plus d’importance à un tel sujet et beaucoup plus de sécurité dans ce domaine. En plus, maintenant, on a introduit le chemin par l’ITM, le chemin de contrôle et de négociateurs aussi dans ce domaine, et je trouve qu’avec cette loi on a beaucoup plus de sécurité dans le domaine du harcèlement moral.»