C’est un site à nul autre pareil, logé sur la presqu’île d’un petit village vosgien, Raon l’Étape, au croisement de la Lorraine, de l’Alsace et des Vosges. Il accueille un projet utopique du couple d’architectes franco-suisses Pascal Haüsermann (1936-2011) et Claude Costy (née en 1931), représentants de l’architecture organique et visionnaire des années 1960-70: des maisons bulles, conçues pour être exploitées en motel familial dans un écrin de verdure, en bordure de rivière.
Le site a connu de nombreuses péripéties, des périodes de succès… et d’oubli. Mais depuis juillet dernier, le propriétaire actuel, l’avocat d’affaires parisien Christophe Perchet, a relancé l’exploitation du motel, et a confié la gérance des neuf bulles à Lydia Lebreton.
Une histoire en plusieurs étapes
Pour bien comprendre ce projet, il faut revenir en arrière. Au milieu des années 1960, l’entrepreneur et hôtelier-restaurateur Maurice Thiery, déjà propriétaire de l’établissement «Le Lorraine Alsace» à Raon l’Étape, souhaite ouvrir une annexe à son établissement sur une presqu’île qu’il possède à Raon l’Étape. Il confie alors le projet à Pascal Haüsermann et Claude Costy qui se sont fait connaitre pour la réalisation de maisons bulles en autoconstruction, grâce à l’utilisation de la technique du voile de béton projeté sur des structures métalliques. Les architectes imaginent un motel composé de chambres bulles, en dialogue avec ce site naturel exceptionnel de 6.000 m2, une presqu’île enserrée par deux bras de la rivière Plaine reliée au bourg par un petit pont.
Après presque deux années de travaux, le motel ouvre en 1969. Une grande bulle d’accueil, sur deux niveaux, est positionnée à l’entrée du site pour recevoir les clients et héberger le gardien. Elle précède les neuf chambres bulles réparties en cercle, chacune orientée sans vis-à-vis et dont les grandes baies sont tournées vers les rives verdoyantes. Six bulles sont prévues pour deux personnes et trois pour quatre personnes. Le projet est un succès et connait une période très prospère. Il inspirera même le créateur des Barbapapa.
Une période plus tourmentée
Puis différents propriétaires vont se succéder entre 1981 et 2000, apportant au fil du temps des adaptations, des transformations… Le dernier hôtelier fait faillite en 1995, le motel tombe à l’abandon et les maisons bulles sont envahies par la végétation. En 2003, le motel devient une habitation privée et la grande bulle va connaître d’importantes modifications, dont l’ajout de lambris, d’une cheminée… Puis le site est de nouveau remis en vente.
À partir de 2006, un groupe de passionnés restaure l’ensemble avec respect et sensibilité, et relance l’activité hôtelière sous le nom de Museumotel, avec une décoration néo-seventies. Mais faire revivre et entretenir un tel lieu a un coût certain et l’activité s’arrête en 2015. Entretemps, en 2014, le site est classé aux Monuments historiques. Le motel est remis en vente.
Un rachat lié à des souvenirs d’enfance
C’est alors qu’un autre passionné, Christophe Perchet, rachète le site en 2019, dans une vente aux enchères pour un montant adjugé à 360.000 euros. Originaire des Vosges, cet avocat d’affaires, qui vit à Paris, connait bien ce site situé dans le village de sa grand-mère maternelle, et y a séjourné à plusieurs reprises en famille pendant ses vacances. Son idée est de perpétuer l’esprit du site, de respecter la conception initiale et ainsi de rouvrir L’Eau Vive pour un tourisme familial.
Après une nécessaire période de travaux, le motel a pu rouvrir ses portes en juillet de cette année. Les chambres disposent chacune d’une salle de douche, d’assises et d’une table, ainsi que d’une cafetière, d’une bouilloire et d’un mini frigo. Les petits déjeuners sont servis dans la grande bulle et l’île Haüsermann est désormais exclusivement piétonne, ce qui permet de profiter pleinement des espaces extérieurs et de la nature environnante. «Nous sommes ravis de pouvoir à nouveau accueillir les clients à L’Eau Vive, précise la gérante de l’établissement, Lydia Lebreton. Nous mettons un point d’honneur à bien accueillir chacun de nos hôtes pour qu’ils profitent pleinement de ce site exceptionnel.»
À l’avenir, Lydia Lebreton réfléchit à exploiter aussi le site pour des petits séminaires ou mariages, «ou pourquoi pas à travailler avec des associations de yoga pour des séjours relaxants en pleine nature».
, 13, rue Jean-Baptiste-Demenge Prolongée, F-88110 Raon l’Étape