La Lorraine rouvrira mercredi prochain. (Photo: Sarah Braun)

La Lorraine rouvrira mercredi prochain. (Photo: Sarah Braun)

Il y a deux ans, Louis Scholtès prenait les commandes du restaurant La Lorraine. L’institution iconique de la place d’Armes sera inaugurée en grande pompe le 20 mars. En attendant, la presse a été conviée à un «déjeuner de répétition» en compagnie du chef. Une belle introduction pour un nouveau chapitre qui s’annonce des plus prometteurs.

Ouverte en 1983, La Lorraine avait joui d’une belle réputation avant de se reposer un tantinet sur ses lauriers, ne perdant toutefois jamais de sa superbe. Si sa position stratégique au cœur du centre historique de la capitale a toujours joué en sa faveur, l’engouement s’était clairement essoufflé ces dernières années. En 2022, le chef franco-luxembourgeois Louis Scholtès décide de s’y intéresser de plus près, s’associant avec Louis-Hector Poitrinal, propriétaire de l’établissement depuis 2018. «J’avais envie de revenir au centre et, surtout, d’un nouveau challenge», explique Louis Scholtès, «la Lorraine a un vrai potentiel. Je trouvais dommage qu’il ne soit pas exploité.»

Le chef – formé à l’École Ferrandi et passé par de nombreuses brigades étoilées à l’instar des Crayères à Reims ou du Ritz à Paris – décide de prendre son temps. «Je savais exactement où je voulais aller. Pour autant, il n’était pas question de me précipiter. Il me fallait déjà être sûr que l’établissement puisse remonter la pente. Et puis, je ne voulais pas fermer entièrement le temps des travaux. Financièrement, cela aurait rendu les choses plus compliquées. On y est allé progressivement, de façon à améliorer la qualité et la régularité subrepticement», explique Louis Scholtès.

Quelle que soit l’heure. L’idée de Louis Scholtès est d’élargir les horaires pour aller du petit-déjeuner au dîner. (Photo: Sarah Braun)

Quelle que soit l’heure. L’idée de Louis Scholtès est d’élargir les horaires pour aller du petit-déjeuner au dîner. (Photo: Sarah Braun)

Un vrai travail d’orfèvre qui a pris tout son éclat les 15 derniers jours avec de conséquents travaux de rénovation, pendant lesquels tout le staff a jonglé pour continuer d’accueillir la clientèle comme il se doit.

Filant la métaphore marine à la perfection, Louis Scholtès a entièrement repensé la décoration, tout en élégance. «Je voulais faire quelque chose de résolument classe. J’ai choisi d’habiller les murs d’un bleu abysse, aussi profond que l’océan. Les banquettes, elles, sont en velours corail. J’y ai ajouté des touches de cuivre et de laiton, des matériaux que l’on retrouve souvent sur les navires. Les sols, enfin, ont été habillés d’un plancher pont de bateau en chêne.» Dernier détail singulier – et non des moindres – une vague de bois blond traverse la salle principale, dont les murs sont subtilement ornés de motifs qui évoquent les algues marines.

Redonner ses lettres de noblesse à l’esprit brasserie

La carte n’a pas échappé à ce sang neuf apporté par le chef, qui sera secondé dans sa tâche par Philippe Ismaili (ex-La Villa, ou encore Bonds).

Évidemment, l’âme marine des lieux demeure, comme en témoigne la poissonnerie qui trône toujours fièrement au cœur du rez-de-chaussée, augmenté d’un coin «épicerie de la mer». Les poissons et les fruits de mer viennent directement de la côte Atlantique, où le chef a gardé des attaches. Pour autant, Louis Scholtès a fait un pas de côté, jouant des influences brasserie plus «carnassières», à l’instar d’un cordon-bleu maison, élaboré à partir de poulet et jambon luxembourgeois et de munster AOP.

Quand on lui demande le plat qu’il choisirait, il répond sans hésiter: «Le bar en croûte de sel, un produit plutôt haut de gamme, puisqu’on est à 11 euros les 100 g, mais qui est absolument bluffant.»

Filant la métaphore marine à la perfection, Louis Scholtès a entièrement repensé la décoration, tout en élégance. (Photo: Sarah Braun)

Filant la métaphore marine à la perfection, Louis Scholtès a entièrement repensé la décoration, tout en élégance. (Photo: Sarah Braun)

Côté addition, justement, Louis Scholtès explique avoir réajusté les tarifs, pour être le plus juste possible. «Notre clientèle est variée, c’est un joyeux melting pot de touristes, de clients business, de frontaliers de la Grande Région. D’habitués aussi. Je veux que chacun puisse y venir aussi souvent qu’il le souhaite», confesse-t-il encore.

Et pour ce faire, quoi de plus ingénieux que d’élargir ses horaires? Louis Scholtès ne cache pas son ambition de faire de cette adresse un lieu iconique de la capitale, quelle que soit l’heure. On peut ainsi venir y prendre son café et son petit-déjeuner, pour y déguster des œufs Benedic, façon Escoffier. Et, surtout, le côté bar a été développé avec une carte de cocktails bien sentie, élaborée par Joao Russo (First Floor), à déguster dès l’apéritif jusque tard dans la soirée…

Le produit est roi

La visite du propriétaire achevée, Louis Scholtès nous a donné un petit aperçu de ses influences du moment en cuisine; la carte sera amenée à évoluer chaque nouvelle saison. Évidemment, le produit – dans toute sa noblesse – est roi et dicte le menu.

Le crémant Schmitt-Fohl ouvre le bal. Pour commencer les agapes, Louis Scholtès nous fait l’honneur du Plateau travaillé du chef, un plateau de fruits de mer totalement upgradé (qui évolue en fonction des arrivages): ici, l’huitre y est présentée en Tartare associée au veau et au caviar – une merveille – ou juste sublimée par des perles de vinaigre dont l’astringence subtile est un ravissement en bouche. On y trouve également un tartare de bonite de Bretagne et un tartare de poulpe, perles de citron et algues wakamé, tout en douceur, superbement équilibré en saveurs.

Suivent des gyozas poêlés, nageant dans un onctueux bouillon coco, dont les épices frôlent l’impertinence, et assaisonné d’une huile à la coriandre: une entrée aussi délicate et raffinée que généreuse. Le plat principal, lui, nous ramène les pieds sur terre: un magret de canard, dans son plus simple appareil, sur un lit de céleri, discrètement nappé d’une sauce miel luxembourgeois et kombawa. Enfin, le menu s’achève par une île flottante, vaporeuse à souhait, nappée de caramel au beurre salé, absolument régressif. L’accord mets-vins a entièrement été pensé avec la maison Ruppert: pinot blanc et pinot blanc «Barrique» pour la mer; pinot noir «Les Terrasses» pour la terre.

La Lorraine, 7 places d’Armes, Luxembourg (Ville-Haute),