Les clients qui ont pris le temps de finir leurs lectures inachevées pendant la crise sont venus renflouer leur bibliothèque lundi matin, selon Fernand Ernster. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Les clients qui ont pris le temps de finir leurs lectures inachevées pendant la crise sont venus renflouer leur bibliothèque lundi matin, selon Fernand Ernster. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Les Librairies Ernster ont rouvert leurs portes ce lundi. Un soulagement pour le directeur et les quelques clients. Malgré une forte demande en ligne pendant la crise, cela n’a pas servi à couvrir les frais de l’entreprise qui s’attend à une baisse de 10 à 20% de son chiffre d’affaires en 2020.

Nichée rue du Fossé, dans le centre de Luxembourg-ville, la librairie Ernster a ouvert grand sa porte d’entrée ce lundi 11 mai, dès 9h. La lumière de la boutique attire quelques visiteurs curieux, comme Michele qui sort sans achat. «Je me baladais et j’ai eu envie de rentrer. Cela fait plaisir de pouvoir de nouveau aller dans les magasins, tout le monde attendait cela», estime-t-il, masque sur la bouche. D’autres, comme Laetitia, avaient planifié leur venue: «Je devais acheter le cadeau d’anniversaire de ma mère», explique-t-elle, le livre «Né sous une bonne étoile» sous le bras. «On vient de me le conseiller», dit-elle en souriant sous son masque.

Les vendeurs portent aussi un masque ou un foulard Ernster pour se protéger. À l’entrée, un distributeur de gel hydroalcoolique invite les clients à se servir. Des vitres ont été mises aux caisses. Dans les passages les plus étroits, des flèches jaunes collées au sol indiquent un sens de passage.

Les ventes en ligne multipliées par dix

, directeur général de l’entreprise familiale, se réjouit de la réouverture tant attendue de ses huit librairies et de sa papeterie. «J’ai fait le tour, il y a plus de monde à la Belle Étoile», note-t-il. Ce qu’il justifie par une météo peu clémente et une clientèle toujours plus éparse dans le centre le lundi. Malgré tout, les allées et venues se poursuivent tranquillement au cours de la matinée.

«Nous n’avons pas arrêté de travailler» pendant la crise, rappelle-t-il d’ailleurs. Alors que la vente en ligne ne représentait que 5% de l’activité, elle a grimpé avec un volume de commandes multiplié par dix. La librairie a surtout vendu «des lectures scolaires, des fictions et des livres pour enfants», détaille Fernand Ernster.

«Un sacré défi logistique», témoigne-t-il. Quand les livreurs ne suffisaient pas pour satisfaire la demande, certains employés ont emmené eux-mêmes certains livres chez les clients en vélo. Le tout sans frais de port. L’arrêt de l’activité de certains éditeurs français a aussi causé quelques ruptures de stock sur ses 2,8 millions de références.

Près de 90 des 98 salariés ont été mis au chômage partiel au début de la crise. Aujourd’hui, un cinquième d’entre eux restent chez eux pour raisons familiales.

Ernster a également poursuivi son activité de grossiste en B2B pendant le confinement, qui représente 10% de l’activité.

Vers une amélioration du site

Tout cela n’a pas suffi à couvrir les frais de l’entreprise, d’autant que les ventes ont baissé de 70 à 80% durant le confinement. L’entreprise n’a pas pu compter par exemple sur les achats coup de cœur de clients qui se promènent d’habitude dans les rayons. Elle négocie encore l’annulation de certains loyers qui lui coûtent 100.000 euros chaque mois, sans compter d’autres frais fixes comme les charges patronales.

Pour 2020, Fernand Ernster s’attend donc à une baisse de 10 à 20% de son chiffre d’affaires, qui s’élevait à 20 millions d’euros en 2019. «Notre chance, c’est que le gros du chiffre se fait à partir de juillet, à la rentrée scolaire et en fin d’année», relativise-t-il.

Reste une question: «Comment les consommateurs vont-ils se comporter?», se demande-t-il. «Si nous arrivons à revenir à notre rythme de croisière, nous aurons beaucoup de chance.»

Faudra-t-il mettre en avant l’activité du site internet? «Nous allons apprendre de notre expérience pour parfaire notre service», répond-il. Ce qui pourrait passer par «une amélioration du logiciel, une réorganisation en interne, voire une remise en question du business model».