Le secteur bancaire luxembourgeois est resté résilient au cours des derniers trimestres, malgré une augmentation des prêts non performants (NPL) — des prêts qui ont fait défaut ou qui risquent de faire défaut — grâce à des positions de capital solides et à des réserves de liquidités importantes. Le ratio des prêts non productifs pour l’ensemble des prêts a augmenté pour atteindre 2,3% au quatrième trimestre 2024, atteignant son niveau le plus élevé depuis le premier trimestre 2017, selon des données récentes du Fonds monétaire international. Cette augmentation a été attribuée à une combinaison de facteurs, y compris le ralentissement économique plus large, la hausse des taux d’intérêt et les vulnérabilités spécifiques dans le secteur immobilier, en particulier au sein de l’immobilier commercial et de la construction, a expliqué la Banque centrale du Luxembourg (BCL).
Augmentation des NPL
«Au cours des dernières années, l’augmentation de l’inflation, la hausse des taux d’intérêt et les incertitudes géopolitiques accrues ont pesé sur la croissance économique tant dans la zone euro qu’au Luxembourg», a déclaré un représentant de la BCL. Pour le Luxembourg, ce ralentissement s’est surtout manifesté sur le marché immobilier et dans les flux de crédit bancaire, ce qui a contribué à une augmentation des faillites parmi les sociétés non financières (SNF), en particulier dans les secteurs de la construction et de l’immobilier.
La BCL surveille de près le risque de crédit dans les secteurs des ménages et des SNF. Le représentant a précisé que «pour les ménages, le ratio de NPL a augmenté de 0,1 point de pourcentage en glissement annuel pour atteindre 2,1% au 2024T4". Toutefois, l’augmentation dans le secteur des SNF a été plus prononcée, le ratio de NPL augmentant de 0,8 point de pourcentage pour atteindre 3,4%. «Pour les ménages et les SNF combinés, le ratio de créances irrécouvrables a augmenté de 0,5 point de pourcentage, atteignant 2,9% au T4 de 2024.»
Immobilier et PME
Notamment, l’augmentation des prêts non productifs dans le secteur des SNF est due aux vulnérabilités des industries cycliques telles que les petites et moyennes entreprises (PME) et l’immobilier commercial (CRE). Les ratios de NPL des PME et de l’immobilier commercial ont tous deux augmenté, atteignant respectivement 6,6% et 10,2% au quatrième trimestre 2024.
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Malgré ces augmentations, l’exposition des banques luxembourgeoises à ces secteurs reste limitée, ne représentant que 1,6% et 1,4% de leur bilan global au cours de la même période. Selon la BCL, «ces résultats indiquent que, malgré les augmentations récentes des ratios de NPL, la détérioration de la qualité des actifs reste gérable pour les banques luxembourgeoises.»
«L’augmentation des ratios de NPL dans le secteur privé non financier est actuellement gérable pour les banques luxembourgeoises, notamment en raison des niveaux élevés des ratios de solvabilité et de liquidité et des niveaux élevés de rentabilité», a déclaré la BCL. Au quatrième trimestre 2024, le ratio de capital total agrégé s’élevait à 19,9%, ou 22,6% en utilisant l’échantillon du FMI. Le ratio de couverture des liquidités et le ratio de financement stable net étaient tous deux bien supérieurs à l’exigence minimale de 100%, à 167,6% et 124,5%, respectivement.
Provisions pour créances douteuses
En référence aux provisions NPL des banques luxembourgeoises — les fonds mis de côté pour couvrir les pertes potentielles liées aux prêts peu susceptibles d’être remboursés — qui s’élèvent maintenant à 7,3% des fonds propres des banques, le niveau le plus élevé depuis 2017, le représentant de la banque centrale a précisé que «les banques luxembourgeoises les plus exposées au ralentissement cyclique du secteur immobilier ont augmenté leurs provisions par mesure de précaution» et que «les NPL pour les ménages et les SNF restent bien couverts en termes de provisions, de collatéraux et de garanties.»
«De telles augmentations des provisions reflètent des pratiques de gestion du risque de crédit plutôt saines», a souligné la BCL.
Rentabilité des banques
«L’augmentation du provisionnement n’a pas affecté négativement la rentabilité des banques luxembourgeoises,» a ajouté le représentant de la BCL. La rentabilité des banques, mesurée par le rendement global des fonds propres (RoE), a augmenté de 1,1 point de pourcentage, passant de 9,8% en 2023 à 10,9% en 2024. Si les revenus nets d’intérêts ont ralenti, n’augmentant que de 3,9%, on observe un rebond significatif des revenus nets de frais et commissions, qui ont augmenté de 10,3% en 2024.
Perspective des banques
Un représentant de l’Association des banques et banquiers du Luxembourg (ABBL) a également commenté la hausse des NPL, l’attribuant principalement au secteur de l’immobilier commercial. «En période de ralentissement économique, comme celle que nous connaissons actuellement, c’est toujours l’immobilier commercial, qui est une activité plus risquée, qui souffre en premier», ont-ils noté. Ils ont également souligné la stabilité des banques luxembourgeoises, en indiquant que leurs ratios de fonds propres sont bien supérieurs aux exigences réglementaires minimales et à la moyenne européenne. Ces réserves de capital «ont été constituées pour absorber une série de chocs, y compris ceux résultant des difficultés du marché de la construction».
Le représentant de l’ABBL a également souligné la prudence des politiques de prêt du Luxembourg, notant la double responsabilité des banques à l’égard de leurs clients et de leurs emprunteurs. «Les banques ont toujours poursuivi une politique de crédit prudente qui tient compte de leur double responsabilité: envers leurs clients qui leur ont confié des dépôts et qui ne doivent pas être mis en danger par des politiques de crédit risquées, et envers les personnes ou les entreprises auxquelles elles accordent des crédits et qui ne doivent pas être mises dans une situation où elles ne peuvent pas les rembourser», a déclaré le représentant de l’ABBL.
Dans l’ensemble, malgré la hausse des NPL, le secteur bancaire luxembourgeois reste bien capitalisé et capable de faire face à une nouvelle détérioration de la qualité des prêts, ont assuré la BCL et l’ABBL. Elles ont également affirmé que l’augmentation des NPL est actuellement gérable et que les banques luxembourgeoises sont bien équipées pour absorber d’éventuels nouveaux chocs.
Cet article a été et traduit et édité en français.