«Les jeunes ne savent pas ouvrir Word sur un ordinateur alors qu’ils savent utiliser TikTok, Instagram, reposter, faire des montages vidéo, etc. Ils sont consommateurs mais ne sont pas des experts en informatique», commente Florent Curtet. (Photo: Ioanna Schimizzi/Maison Moderne)

«Les jeunes ne savent pas ouvrir Word sur un ordinateur alors qu’ils savent utiliser TikTok, Instagram, reposter, faire des montages vidéo, etc. Ils sont consommateurs mais ne sont pas des experts en informatique», commente Florent Curtet. (Photo: Ioanna Schimizzi/Maison Moderne)

Florent Curtet, décrit par certains comme un hacker repenti, était présent ce jeudi 3 avril au Luxembourg à l’occasion de la première EschTechWeek. Avec l’ancien policier Pierre Penalba, ils ont expliqué aux adolescents présents dans la salle les erreurs à ne pas commettre.

Comment, à 17 ans, Florent Curtet était considéré par la CIA comme le chef de la cybercriminalité en France? Celui qui est aujourd’hui trentenaire a expliqué devant plus de 200 adolescents son parcours, à l’occasion de la première édition de la EschTechWeek. Sur la scène du Digital Learning Hub de Belval, aux côtés de Florent Curtet, se trouvait Pierre Penalba, ancien commandant de police français, à l’origine de l’arrestation de l’ancien hacker en 2006.

La troisième journée de la EschTechWeek – organisée par The Dots – était dédiée aux TN’Teens, les jeunes présents sont donc particulièrement concernés par le parcours du Français. «Ce type de conférence où je discute avec des adolescents me touche particulièrement parce que je me revois à leur âge. Je dirais que j’ai presque eu la chance de ne pas être dans cette hyperconsommation numérique. Ces gamins-là sont livrés à eux-mêmes face à leurs écrans et je pense que tout n’est pas la faute des parents, l’Éducation nationale a sa part à prendre», explique Florent Curtet à la sortie de la conférence.

«Au final, des jeunes de 14, 15 ou 16 ans ne savent pas ouvrir Word sur un ordinateur alors qu’ils savent utiliser TikTok, Instagram, reposter, faire des montages vidéo, etc.  Mais le vrai ordinateur, ils ne savent pas s’en servir, ils sont consommateurs mais ne sont pas des experts en informatique.» Aujourd’hui cofondateur de l’ONG Hackers without Boarders – environ 4.000 volontaires – et associé-dirigeant de la société High Jack, spécialisée dans les formations en cybersécurité, Florent Curtet a confié s’être fait griser par le dark web.

Fabrication de fausses cartes bancaires…

À 12 ans, il s'était déjà fait un nom dans le monde des pirates informatiques. «J’ai créé les premiers phishings, on avait hacké feu-Caramail au début des années 2000. J’ai fabriqué des fausses cartes bancaires, des faux billets, en one shot je me faisais 50.000€», dit celui qui avait été condamné à deux ans de prison avec sursis et 80.000 euros de dommages et intérêts par le tribunal des enfants des Hauts-de-Seine. «J'ai beaucoup de remords, surtout envers mes parents, mais ce qui est fait est fait. J’essaie à présent de montrer le positif et d’aider les jeunes.»

Après avoir repris ses études, commencé à travailler, il est désormais spécialisé dans la prévention des cyberattaques. Parmi ses clients, de grandes entreprises et des services de police ou de renseignements. Le trentenaire, auteur du livre «Hacke-moi si tu peux – Mémoires d'un cyberpirate repenti», paru en 2023 et qui fera l’objet d’un film et d’une série prochainement, s’est toutefois retrouvé, ces derniers mois, de nouveau dans le viseur de la justice en 2021.

Sur la scène du Digital Learning Hub de Belval, aux côtés de Florent Curtet (à droite) se trouvait Pierre Penalba, ancien commandant de police français, à l’origine de l’arrestation de l’ancien hacker en 2006. (Photo: Ioanna Schimizzi/Maison Moderne)

Sur la scène du Digital Learning Hub de Belval, aux côtés de Florent Curtet (à droite) se trouvait Pierre Penalba, ancien commandant de police français, à l’origine de l’arrestation de l’ancien hacker en 2006. (Photo: Ioanna Schimizzi/Maison Moderne)

«Le Français s’était positionné comme négociateur dans l’affaire dite Everest, qui avait conduit en 2021 à une fuite de données liées à l’instruction de l’attentat de Charlie Hebdo», relate Le Monde. Il a été reconnu coupable d’association de malfaiteurs et de complicité de tentative d’extorsion en décembre dernier, et condamné notamment à deux ans de prison avec sursis. Alors, informateur pour la DGSI ou complice de cybercriminels? «Je pense que c’était un procès d'exemple et je dirais même que c’est de l’acharnement. Je travaillais avec la DGSI, quand ils m'ont arrêté chez moi, j’étais en contact permanent avec Pierre (Penalba, ndlr) et j'avais un dossier où se trouvaient toutes les preuves de mon infiltration. Pierre a même témoigné en ma faveur à mon procès», répond Florent Curtet.

Le trentenaire n’a toutefois pas interjeté appel. «Mes parents étaient présents au procès et je ne voulais pas leur faire subir encore une fois cela. J'aurais toujours ça en regret, j'en rêve encore, mais heureusement cela ne m’a pas porté préjudice dans mon activité professionnelle. J'avais très peur d'avoir une vague de blacklist vis-à-vis de mes clients, mais ce ne fut pas le cas.»