Fredrik Skoglund, chief investment officer, Banque internationale à Luxembourg. (Photo: Bil)

Fredrik Skoglund, chief investment officer, Banque internationale à Luxembourg. (Photo: Bil)

Les consommateurs américains se sont montrés particulièrement peu dépensiers en décembre 2018. Pour Fredrik Skoglund, chief investment officer à la Bil, il ne faut peut-être pas s’inquiéter trop vite de ce ralentissement passager.

Notre scénario pour 2019 tablait sur une poursuite de la vigueur de l’économie américaine tout au long de l’année. Après le rendez-vous manqué de la St-Valentin, une journée marquée par la publication de chiffres de ventes au détail parmi les plus faibles depuis 2009, devons-nous continuer à croire en la solidité de l’économie américaine?

Les dépenses de consommation, qui représentent les deux tiers du PIB, constituent la pierre angulaire de l’économie américaine. Les données publiées le 14 février montrent qu’en décembre 2018, les ventes au détail dans le pays ont enregistré leur recul le plus marqué depuis 2009, avec une baisse de -1,2% en rythme mensuel, bien plus importante que les prévisions des analystes (-0,2%). L’indice des ventes au détail (dont sont exclus des éléments plus volatils comme l’essence), qui reflète la demande des consommateurs, a reculé de 1,7% en glissement mensuel, soit le résultat le plus mauvais depuis 2001. Par conséquent, les prévisions de croissance du PIB pour le quatrième trimestre 2018, qui tablaient précédemment sur une croissance modérée de 2%, ont été revues à la baisse. La Réserve fédérale a considérablement réduit ses prévisions, les ramenant à 1,5% à peine.

Cela doit-il inquiéter les investisseurs? Si l’on creuse un peu, il semblerait qu’il faille prendre ces chiffres avec prudence.

Il semblerait qu’il faille prendre ces chiffres avec prudence.

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Tout d’abord, certains facteurs ont entamé la confiance (et parfois le portefeuille) des consommateurs américains. En décembre, nous étions au beau milieu de la plus longue fermeture partielle («shutdown») de l’administration américaine de l’histoire, et près de 800.000 employés fédéraux n’étaient plus rémunérés. Ce shutdown a eu des répercussions financières, mais également psychologiques. La confiance des consommateurs a été ébranlée, mais comme l’a indiqué le Conference Board, think tank économique, cela est «plutôt dû à un choc temporaire, et n’augure pas d’un ralentissement significatif au cours des mois à venir».

La correction du marché des actions en décembre a ajouté de l’huile sur le feu. La volatilité des marchés financiers et la propension des consommateurs à dépenser sont certes liées, mais cela fonctionne dans les deux sens. On a observé que les cours élevés incitaient les consommateurs à dépenser, et le mois de janvier a été particulièrement remarquable à ce titre, le S&P 500 ayant réalisé son meilleur démarrage sur 30 jours depuis 1991.

Ensuite, le marché du travail américain est, et devrait demeurer, vigoureux, avec un taux de chômage de 4% en janvier. L’enquête mensuelle de janvier de l’Université du Michigan montre que le moral des ménages reste bon; la moitié d'entre eux indiquent que leur situation financière s’est améliorée. Interrogés au sujet de la hausse de salaires attendues en 2019, ils prévoient une progression de 2,2%, soit un niveau quasiment identique à l'augmentation moyenne constatée en 2018.

Il convient de ne pas accorder trop d’importance aux chiffres d’un seul mois.

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Enfin, un dernier élément permet de relativiser les données recueillies pendant le shutdown. Walmart, principale chaîne de grande distribution américaine, a indiqué avoir enregistré sa plus forte hausse des ventes en 15 ans pendant la période des fêtes.

En fin de compte, il semble prématuré de s’inquiéter d’une baisse de la consommation américaine. Comme l’a dit Lael Brainard, l'un des gouverneurs de la Réserve fédérale, il convient de ne pas accorder trop d’importance aux chiffres d’un seul mois, même s’il existe une tendance à un recul de la demande d’articles de sport chez les consommateurs américains. Contrairement au Royaume-Uni, où la tourte au porc a été retirée et le legging de sport ajouté au panier officiel de biens utilisés par l’Institut statistique britannique (Office for National Statistics – ONS) pour mesurer l’inflation, l’engouement pour le sport aux États-Unis semble se tasser. Les ventes d’articles de sport y sont en effet en recul depuis neuf mois consécutifs…