(Article mis à jour le 20 janvier avec la réponse du Parquet de la Sarre)
L’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne de 2021 a-t-il assez été pris au sérieux par les entreprises luxembourgeoises? Dans le cadre d’une affaire luxembourgo-allemande, la justice européenne avait décidé que la TVA d’une voiture de leasing au profit d’un employé devait être acquittée non plus dans le pays de travail de cet employé, mais dans son pays de résidence quand cet employé contribuait financièrement à cette mise à disposition.
Cette semaine, nous avons appris que des entreprises – le nombre est difficile à établir en raison du secret autour des questions fiscales et de la réticence des entreprises à se voir ainsi mises dans la lumière – ont reçu une convocation devant le tribunal de Sarrebruck. «No comment», disent les autorités judiciaires fédérales allemandes qui renvoient vers la justice du Land de Sarre, qui confirme ses démarches sans vouloir donner ni le nombre ni les entreprises visées par cette demande..
Selon nos informations, si ces entreprises ont bien compris qu’à partir de 2021, elles devaient payer la TVA de ces voitures en Allemagne et plus au Luxembourg, elles sont inquiétées pour les années 2013 à 2021. Pourquoi? Parce que le début de l’affaire portée devant la CJUE est en 2013 et que les autorités allemandes ont considéré que les entreprises concernées devraient se mettre en règle à partir de cette date, de manière rétroactive.
Les trois voisins ont fixé leurs règles
Le sujet était à l’ordre du jour d’un événement organisé le 13 décembre par la House of automobile «Quel avenir pour la voiture de société au Luxembourg? Mieux comprendre les enjeux des récents changements fiscaux et réglementaires». Dans leur présentation, un tax partner de BDO, Erwan Loquet, et une HR and payroll partner de BDO, Sandra Claro, ont montré un slide qui consolide les positions des gouvernements des trois pays autour de Luxembourg:
- au terme d’une circulaire qui devrait être remplacée cette année (en 2025), la Belgique a fixé une tolérance au 1er juillet 2021 et applique une base imposable calculée selon cette formule: valeur normale (loyer + frais soumis à la TVA belge assurances) x «pourcentage de récupération» x «pourcentage professionnel». Ex: 1.000 x (100%-35% PP) x PR;
– la France, dans un courrier du ministère des Finances, a fixé un délai de prescription de trois ans, cinq ans en cas de fraude, d’évasion ou de mauvaise foi, et utilise la valeur normale (loyer et frais accessoires) comme base imposable;
– et l’Allemagne prend 2013 comme référence, la date de la modification de la législation sur les lieux de prestation (en juin 2013) et utilise comme base imposable: 1% du prix catalogue brut (P) du véhicule + 0,03% de P par km entre le bureau et le domicile 0,002% pour les déplacements au domicile familial lorsque le salarié dispose de deux logements.
Vendredi soir, le député CSV a interpellé le ministre des Finances, (CSV), sur ce sujet. Interrogé par Paperjam, le député reste très prudent. «Je pose uniquement des questions. Ce n’est pas le moment de faire des déclarations! Et je me réserve, le cas échéant, le droit de revenir sur ce dossier en fonction des réponses du ministère.»
Quid du remboursement au Luxembourg?
Dans sa salve de six questions, le député pose un autre problème: celui de l’attitude de l’Administration de l’Enregistrement. Est-ce que l’Administration de l’Enregistrement informe systématiquement les entreprises, qui sont redevables de la TVA dans le pays du domicile de leurs employés et les invite le cas échéant à la régularisation de leur situation dans le pays de résidence de leurs employés? Et l’Administration procède-t-elle automatiquement au remboursement de la TVA payée dans l’hypothèse où l’entreprise assujettie aurait régularisé sa situation auprès des administrations fiscales du pays de domicile de leurs employés?
Interrogée jeudi soir sur le paiement de cette TVA au Luxembourg et sur un éventuel remboursement des entreprises qui auraient été amenées à la payer en Allemagne, en Belgique ou en France, l’Administration de l’Enregistrement n’était pas revenue vers nous à l’heure de publier cet article.
De combien de voitures potentiellement concernées et de combien d’argent ou de déchet fiscal pour le Luxembourg parle-t-on, difficile à dire. Le nombre de voitures de leasing potentiellement concernées «n’est pas une information disponible», dit le porte-parole de la House of automobile, . «Il s’agit de la très grande majorité des contrats.» Dans sa présentation, le 12 décembre, il disait cependant qu’«il est estimé qu’entre 40 et 50% des véhicules de sociétés (VP) sont utilisés par des frontaliers, ce qui représente annuellement entre 10.000 et 12.500 ventes de véhicules personnels.»
À fin décembre, selon une réponse parlementaire de la ministre de la Mobilité, (DP), il y avait 102.489 véhicules enregistrés par une personne morale, chiffre qui regroupe les voitures de fonction auxquelles le régime de l’avantage en nature s’applique et toutes celles qui sont enregistrées au nom d’une entreprise de location ou de leasing de véhicules.