Dans le collimateur de la commission du budget qui a rédigé cette résolution, l’actuel plafond de 1% du revenu national brut de l’UE-27 jugé insuffisant. Plafond qu’ils aimeraient voir augmenter, le cas échéant par le recours à l’endettement jugé comme une option viable. Un recours actuellement proscrit par les traités, mais auquel la Commission a recouru avec l’aval des pays membres lors de la crise du Covid.
Cette résolution, adoptée par 317 voix pour, 206 contre et 123 abstentions, est un acte politique qui n’est pas contraignant, mais qui ouvre en quelque sorte la négociation relative au cadre financier pluriannuel (CFP, ou MFF, en anglais, pour «multiannual financial framework») pour la période 2028-2034. Le CFP met en place les dispositions que le budget annuel de l’Union doit respecter, notamment les plafonds de dépenses pour les grandes catégories du budget. Des catégories que la commission du budget souhaiterait voir adapter afin de faire de la place aux deux priorités politiques actuelles que sont la défense et la compétitivité. Sans pour autant remettre en cause le financement des autres priorités de l’UE, comme la politique de cohésion et les dépenses sociales et environnementales.
La Commission européenne présentera ce 16 juillet ses propositions quant à l’évolution du CFP. Des propositions chiffrées celles-là. S’ouvriront alors les négociations avec les États membres.
La nécessaire augmentation des ressources propres
Si la majorité, formée par les quatre partis europhiles (PPE, S&D, Renew et Verts), demande une augmentation du volume du budget de l’UE au-delà de la limite historique de 1% du revenu national brut de l’Union, aucun chiffre n’a été avancé, signe de désaccords entre les députés. Cette augmentation du budget devra passer par la création de nouvelles ressources propres et possiblement par un recours à la dette.
(Verts/ALE) critique le vague de la résolution concernant les ressources propres. «Des ressources propres qui devront être augmentées pour renforcer dans les domaines du social, de la cohésion, de la sécurité alimentaire, de la lutte contre la pauvreté, du logement, de l’aide humanitaire, de la biodiversité et de la lutte contre le changement climatique l’Union européenne et faire face aux défis futurs.» Comment? Elle évoque la piste de la taxation des transactions financières. Corollaire de la hausse des ressources propres, le recours accru à l’emprunt. Un recours qui ne séduit pas l’eurodéputée, qui y voit un fort risque de justification de politique d’austérité pour l’avenir.
Pour (S&D), «la structure actuelle du CFP n’est plus adaptée aux défis posés par un monde en mutation nécessitant une réponse européenne commune forte». Il plaide pour une restructuration de ce cadre. Restructuration qui devra passer par la hausse du «seuil de dépenses auto-imposé et très restrictif de 1% du RNB de l’UE. Il faut également une simplification et une plus grande transparence dans le prochain CFP. Le CFP actuel a manqué de flexibilité et n’a donc pas pu s’adapter à l’évolution des priorités en matière de dépenses, et il faudrait ainsi progresser vers une flexibilité intégrée, et à une réforme des instruments spéciaux existants afin de garantir une réponse efficace et rapide de l’UE en termes de capacités.» Il plaide pour la création de nouvelles ressources propres pour l’Union et suggère des taxes sur les transactions financières, les bénéfices exceptionnels des entreprises, ou sur les grandes fortunes.
Le recours à la dette, ligne de fracture entre pro-européens et populistes
Pour ce qui est du recours à l’endettement, il estime que l’emprunt conjoint doit constituer une option pour garantir que l’Union dispose de ressources suffisantes pour répondre aux crises aiguës à l’échelle de l’Union, non seulement dans le domaine de la défense, mais aussi dans d’autres domaines prioritaires, tels que la transition verte. En outre, le Parlement européen devrait être pleinement impliqué dans le cas où de nouveaux emprunts conjoints sont envisagés, dans le plein respect de ses rôles de législateur, d’autorité budgétaire et d’autorité de décharge.
Le recours à l’emprunt, (PPE) ne n’exclut pas. Mais pour elle, le recours à la dette ne doit se faire qu’en considérant l’avenir et pour des raisons vitales, comme ce fut le cas lors de la pandémie de Covid-19 ou pour financer des projets tournés vers l’avenir (technologique, écologique), ou potentiellement pour la défense et la sécurité. Investir dans la défense est vital si nous voulons continuer à vivre librement et dans des démocraties. Pour ce qui est des ressources propres, elle se dit favorable à leur augmentation.
Pour (Renew), le plus grand problème du budget européen est «le manque de moyens et le manque d’ambition pour expliquer à notre opinion publique pourquoi le budget européen est indispensable. Ceux qui sont familiers du problème savent que les deniers investis à travers les budgets européens sont en principe beaucoup plus performants que ceux qui sont investis à l’échelle nationale.» Il se dit favorable à l’augmentation des ressources propres. «En l’absence de ressources propres suffisantes, le budget de l’Union européenne reste tributaire de la bonne volonté des États membres, parmi lesquels il y a beaucoup d’États frugaux, radins ou franchement anti-européens», détaille-t-il. Et, face aux besoins, notamment en matière de défense, il n’est pas hostile à un endettement à l’échelle européenne. Il juge même cela inévitable.
Pour (CRE), pas question de recourir à la dette pour financer le budget européen. «Ce n’est pas prévu par les traités. Ce que l’on a fait avec NextGenerationEU est totalement illégal. Il faut combattre cette tendance à contracter de plus en plus de dettes pour financer les politiques européennes.» Le député ADR va plus loin: «Je suis d’avis qu’il conviendrait de supprimer les ressources propres et mettre l’Union européenne et la Commission dans une dépendance totale vis-à-vis des États membres. La Commission doit demander aux États nationaux d’avoir des moyens pour des programmes que les États nationaux devraient alors accorder ou non.»