L’État poursuit l’examen des candidatures pour la concession de l’aire de Berchem, dans le sens France-Luxembourg, autrefois la station-service la plus fréquentée d’Europe en termes de ventes de carburant. (Photo: Matic Zorman / Maison Moderne / Archives)

L’État poursuit l’examen des candidatures pour la concession de l’aire de Berchem, dans le sens France-Luxembourg, autrefois la station-service la plus fréquentée d’Europe en termes de ventes de carburant. (Photo: Matic Zorman / Maison Moderne / Archives)

Le ministère des Transports étudie les sept offres reçues pour les deux concessions des stations-service les plus «bankables» d’Europe, situées sur l’autoroute à Berchem, pour une durée de quatre ans à partir du 1er mai. À peine les enveloppes étaient-elles arrivées au ministère, mi-janvier, que Q8 fanfaronnait déjà d’avoir remporté les deux.

L’État aurait pu publier les appels d’offres les plus «verts» de son histoire pour les deux concessions des stations-service de Berchem, situées de part et d’autre de l’autoroute menant à Dudelange ou en provenance de celle-ci, à partir du 1er mai et pour une durée de quatre ans. Mais il n’était pas prêt.

Face au constat politique dressé mi-janvier par la députée verte , le ministre de l’Économie, des PME, de l’Énergie et du Tourisme, (DP), a acquiescé à demi-mots. Dans sa réponse à la députée ce lundi, il rappelle que l’accord de coalition prévoit l’élaboration de «concepts visant à transformer progressivement les stations-service autoroutières classiques en hubs multi-énergies». Toutefois, étant donné que «les besoins des futurs clients autoroutiers restent incertains, les services concernés des ministères analysent actuellement la situation et étudient les différentes options».

Sans précipitation, le ministre souligne que «le Luxembourg a déjà atteint les objectifs fixés à l’horizon 2030» par le règlement européen de 2023 sur le déploiement d’infrastructures pour carburants alternatifs, notamment les bornes de recharge rapide et les stations de ravitaillement en hydrogène le long des autoroutes.

«Un nouveau contrat de concession est une opportunité pour mettre en œuvre des améliorations», insiste la députée, qui regrette néanmoins l’absence d’obligations précises en matière de bornes de recharge électrique. Le contrat prévoit toutefois que l’État peut installer ces infrastructures sans l’accord du concessionnaire, tout comme des panneaux photovoltaïques sur les ombrières. Elle souligne également le manque d’ambition en matière d’infrastructures sanitaires et d’économie circulaire.

260 millions de litres de carburant par an pour 25.000 clients quotidiens

Concernant les parkings pour les automobilistes, le ministre répond: «L’installation d’ombrières avec des panneaux photovoltaïques y serait réalisable, et des études de faisabilité en ce sens sont envisagées. Le contrat de concession prévoit déjà l’installation de panneaux photovoltaïques sur le toit des infrastructures, notamment celui du point de vente des carburants, du shop et du restaurant.»

Pour la députée déi Gréng, «l’aire de Berchem, avec ses utilisateurs internationaux, est une vitrine de l’image de marque du Luxembourg. Cela souligne l’importance de la qualité et du caractère innovant de ses services et infrastructures pour notre pays.»

Ce n’est pas faux. Selon les rares statistiques disponibles, la station Shell (direction Luxembourg) distribuerait 260 millions de litres de carburant par an à 25.000 clients quotidiens, un record, sinon mondial, du moins européen. En face, la station Aral (direction Dudelange) voit passer un million de véhicules par an, pour 850.000 clients et 165.000 poids lourds. Situées au cœur du flux quotidien des frontaliers et des déplacements logistiques entre le nord et le sud de l’Europe, ces stations restent stratégiques – du moins jusqu’à ce que les péages, la fiscalité carbone ou l’évolution des prix ne modifient une partie du trafic.

L’intérêt pour ces concessions reste fort: les deux appels d’offres, publiés en novembre, et pour lesquels les candidats avaient jusqu’au 15 janvier pour se positionner – soit la date de la question parlementaire de Mme Welfring – ont suscité quatre propositions pour la station en direction du Luxembourg et trois pour celle en direction de la France.

10 millions d’euros en moyenne par an et par station sur une autoroute

Même avec Shell contrainte de provisionner 4,5 millions d’euros en deux ans pour couvrir ses obligations de dépollution liées, en partie, à la fuite d’AdBlue en 2016, l’affaire demeure rentable. Une fois les 2,4 millions d’euros de droit d’entrée payés, les concessionnaires retenus devront s’acquitter d’une triple redevance annuelle d’au moins:

- 0,02 euro par litre de carburant vendu

– 7% des revenus du shop

– 7% des revenus du restaurant

dans les trois cas hors TVA.

Pour l’État, ces sept stations sur les autoroutes constituent une manne financière: elles lui rapportent environ 70 millions d’euros par an, soit 10 millions d’euros par station-service autoroutière, contre moins de 1% de ce montant consacré à leur entretien.

Bonne nouvelle pour le contribuable: les panneaux photovoltaïques installés par le concessionnaire dès le début de la concession deviendront, à terme, propriété de l’État.

À peine la période de dépôt des offres clôturée, Q8 claironnait déjà avoir remporté les deux concessions – alors que, selon le ministère des Transports, l’examen des sept candidatures est toujours en cours.

«Nous gérerons les deux stations de Berchem, y installerons une enseigne Panos, un Delhaize Shop&Go ainsi que des distributeurs automatiques Starbucks. Nous investirons également dans l’embellissement des bâtiments, la pose de panneaux solaires et le renforcement de la sécurité avec des caméras de surveillance. Enfin, nous procéderons à un rebranding complet des pompes, des auvents et de la signalétique afin d’offrir une apparence plus moderne et cohérente.» C’est en ces termes que le service de presse de Q8 s’est exprimé auprès de nos confrères de Virgule.