Après tout, on pouvait s’attendre à des rebondissements et à cette attitude dominante de la part de Donald Trump comme ce fut déjà le cas lors de son premier mandat. Mais l’ampleur de ces retournements, dont l’impact est mondial, dépasse l’entendement. Cela a d’ailleurs commencé à peser sérieusement sur le moral et la confiance des ménages, des entreprises et des investisseurs, tous abhorrant l’incertitude.
Mais plutôt que de parler du court terme et des droits de douane – tout et son contraire ont déjà été dits, ce qui est plutôt normal quand on pense à tous ces rebondissements – peut être devrions-nous regarder un peu plus loin. En tant que gestionnaire de fortune, surtout en temps d’incertitude élevée, il est bon de se concentrer sur les objectifs à long terme de rendement et de risque de nos clients. En effet, l’idée n’est pas d’apporter un jugement de valeur à la politique américaine, mais d’essayer d’anticiper quelles seront les prochaines décisions politiques, dans quelle mesure elles viendront et comment elles pourraient impacter les marchés et les portefeuilles.
Freiné par la dette
La mauvaise performance des actifs américains lors du premier trimestre 2025 s’explique en partie par le séquençage des annonces politiques et, contrairement à son premier mandat, Donald Trump a commencé par les mauvaises d’entre elles, c’est-à-dire l’augmentation des droits de douane. Malgré une énième pirouette, les droits de douane américains s’établissent à des niveaux jamais vus en un siècle. L’idée étant, d’après l’administration Trump, de collecter des milliards de dollars afin de financer des mesures de relance budgétaire.
On peut se dire que, dans un contexte de dette américaine qui s’envole, cela permettrait à Donald Trump d’éviter de connaître ce que Liz Truss, l’ancienne Première ministre anglaise, a vécu lors de la mini crise budgétaire en septembre 2022. En effet, financer des mesures de relance budgétaire entièrement par de nouvelles émissions de dette dans un contexte de taux d’intérêt élevés aurait pu faire paniquer le marché obligataire. C’est peut-être pour cela que Donald Trump a changé d’avis en réduisant, à l’exception de la Chine, du Canada et du Mexique, les droits de douane qu’il avait annoncés une semaine auparavant, car le marché obligataire américain commençait à montrer des signes de fébrilité.
Donald Trump à la relance
Ce qui nous laisse penser que l’administration Trump pourrait maintenant se concentrer sur ces fameuses mesures de relance budgétaire. La Chambre des représentants du Congrès américain a déjà approuvé le plan budgétaire de Donald Trump qui prévoit non seulement une réduction des dépenses, mais aussi des baisses d’impôts. D’un point de vue macroéconomique, ces baisses permettraient de soutenir la croissance et d’amortir le choc de stagflation (ralentissement de la croissance et hausse de l’inflation) provenant de l’augmentation globale des droits de douane. La dérégulation pourrait également permettre de soutenir la croissance en simplifiant les procédures administratives.
Néanmoins, la fébrilité sur les marchés persiste, notamment aux États-Unis. En effet, le pays est à l’épicentre de l’onde de choc et les investisseurs se posent des questions quant aux statuts de monnaie de réserve du dollar américain et de valeur de refuge des bons du Trésor américain. Quant aux actions, les risques sur la croissance continuent de peser sur les valeurs.
Portefeuilles neutres
Pour le moment, nous pensons que les risques sont symétriques. Les négociations commerciales et la relance budgétaire pourraient soulager les marchés. Mais les tensions sont maximales (nous venons de le voir avec la nouvelle escalade entre les États-Unis et la Chine) et les négociations pourraient être difficiles, prendre du temps et continuer d’attiser la peur sur les marchés. Étant donné ces risques, nous n’avons plus de biais tactique à court terme. Nous avons donc ramené les portefeuilles à leur point neutre, c’est-à-dire en ligne avec notre allocation stratégique à long terme.
Comme toujours, alors que les marchés réagissent rapidement aux nouvelles, nous nous efforçons d’éviter les réactions impulsives et de garder notre sang-froid. Nous anticipons les développements potentiels et alignons les portefeuilles sur les objectifs à long terme des clients, tout en tenant compte des considérations de risque et de rendement. Nous nous tenons également prêts à procéder aux ajustements nécessaires si les conditions économiques et de marché s’écartent sensiblement de nos prévisions de base.