La LCBI est une initiative de l’Association pour le développement du bâtiment bas carbone (BBCA), qui travaille depuis dix ans sur la décarbonation dans l’immobilier et dont le but est de faire avancer tout le secteur vers des pratiques plus vertueuses, à la fois à travers des labels bas carbone et la diffusion de bonnes pratiques dans le secteur.
Cette initiative a été lancée en 2022 pour répondre à un double problème: le premier concerne les acteurs de l’immobilier à l’échelle européenne, qu’ils soient investisseurs, gestionnaires de fonds ou promoteurs, et qui doivent faire face à un manque d’harmonisation dans la mesure de la performance carbone des bâtiments en Europe.
«Aujourd’hui, il est impossible de comparer l’empreinte carbone sur tout le cycle de vie du bâtiment entre un bien en Allemagne et un autre en France par exemple, parce que les méthodes de mesure sont différentes», assure Cécile Dap, directrice de la LCBI . «Les investisseurs ont besoin d’une méthode de comptage unique afin de pouvoir faire des comparatifs. Ce manque d’harmonisation freine et empêche l’investissement vers le bas carbone à l’échelle européenne.»
Le second problème est que les certifications qui sont connues et utilisées aujourd’hui à l’échelle internationale, comme Breeam ou Lead, sont peu exigeantes sur la partie carbone et donc peu pertinentes sur ce sujet. «C’est pour cela que nous avons créé la LCBI, qui est une méthode et une certification qui mesurent l’empreinte carbone d’un bâtiment sur tout son cycle de vie. Le label n’est accordé que si l’on respecte un certain seuil de performance carbone correspondant aux objectifs de décarbonation de la Commission européenne.»
Une initiative portée par les acteurs du secteur
Cette initiative a été portée et financée par une dizaine d’acteurs privés de l’immobilier, dont certains sont actifs au Luxembourg: BPI Real Estate, NSI, WO2, Icamap, Generali Real Estate, BNP Paribas Real Estate, Covivio, Ivanhoé Cambridge, Struan Robertson, Axa IM Alts, Bouygues Immobilier, NSI. «Pendant deux ans, un travail méthodologique a été développé», explique Cécile Dap. «Une commission technique indépendante a été montée avec des experts de différents pays. Une étude de marché a été réalisée sur les différentes certifications existantes, ainsi qu’un tour d’horizon des différentes réglementations dans les pays. Lors d’une deuxième phase, nous avons créé une première version de la méthodologie que nous avons par la suite testée et éprouvée pendant six mois sur une vingtaine de bâtiments dans sept pays d’Europe, dont le Luxembourg avec le pour avoir des retours d’experts locaux. Tout ce travail nous a permis d’élaborer une deuxième version de la méthodologie, plus robuste et avec des seuils plus clairs, que nous utilisons désormais. Nous ne réinventons pas la roue. Nos choix méthodologiques sont alignés sur ce qui est préconisé par la Commission européenne, avec les standards EN15804 et EN15978, et avec la méthode Level(s), ainsi que d’autres standards européens utilisés sur le marché, comme CRREM, RICS et la taxonomie européenne.»
Une vision complète du carbone
Cette méthodologie considère trois types de carbone: le carbone embarqué («embodied carbone»), c’est-à-dire ce qui vient de la construction, des matériaux; le carbone opérationnel, qui est le carbone émis lors de la durée de vie du bâtiment, et le carbone biogénique, qui est une capacité de stockage du carbone par certains matériaux, comme le bois ou d’autres matériaux biosourcés, comme la terre.
La certification délivrée par la suite se déploie sur trois niveaux (standard, performance, excellent). «La progression dans les niveaux est accordée d’une part en fonction de la performance carbone, et d’autre part en fonction de la complétude des données. Plus on va loin dans la mesure du carbone dans le bâtiment, plus on a de chance d’atteindre un niveau élevé», complète Cécile Dap.
Dans la méthodologie, il est possible d’utiliser les fiches spécifiques des produits mis en œuvre ou des fiches génériques, qui viennent pour le moment pallier le manque d’informations. «Nous sommes convaincus que pour s’améliorer dans ce secteur, on a besoin de données. Tous les producteurs doivent être transparents, mais pour pousser la création de données, soit il faut une réglementation qui n’existe pas encore, soit il faut une incitation. Les certifications comme la nôtre ont cette vertu d’inciter à produire ces données relatives au carbone.»
Un déploiement en cours
Aujourd’hui, la certification est prête pour le marché et est auditée par le bureau Veritas. Une dizaine de projets sont en cours de certification et les premiers résultats devraient arriver d’ici la fin de l’année. «Cette certification s’applique pour le moment uniquement aux projets d’immeubles de bureaux, hôtels et logements en construction», détaille Cécile Dap. «À l’avenir, l’objectif est d’adapter la certification pour l’appliquer aux bâtiments en rénovation, ce qui représente une grosse part du marché, et donc intéresse particulièrement les investisseurs.»
Si la méthodologie peut être utilisée dans toute l’Europe, la certification en elle-même est actuellement disponible dans huit pays, à savoir la France, le Royaume-Uni, le Luxembourg, la Belgique, les Pays-Bas, l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie. «Sur notre feuille de route, nous avons également l’objectif d’étendre les catégories d’immeubles qui peuvent être concernés par la LCBI, notamment pour la logistique.» Quant à l’extension géographique, elle se fera «en fonction des demandes».