La productivité du Luxembourg, bien qu’élevée, n’augmente plus depuis plusieurs années.  (Photo: Shutterstock)

La productivité du Luxembourg, bien qu’élevée, n’augmente plus depuis plusieurs années.  (Photo: Shutterstock)

Malgré un niveau de productivité parmi les plus élevés en Europe, le Luxembourg fait face à une stagnation préoccupante. En 2024, la croissance de la productivité du travail peine à redécoller, menaçant la compétitivité du pays à long terme.

Le Conseil national sur la productivité a dévoilé son rapport 2023-2024. Il constate une légère baisse de la productivité au Luxembourg entre 2022 et 2023 (2,57%) et propose des axes d’amélioration.

Depuis plus d’une décennie, la productivité du travail au Luxembourg affiche une croissance quasi nulle. En 2023, le PIB par heure travaillée atteignait 128,8 dollars en parité de pouvoir d’achat (PPA), un niveau supérieur à la Belgique (112,9 dollars), l’Allemagne (95 dollars) et la France (92,8 dollars). Toutefois, si le Luxembourg reste l’un des pays les plus productifs d’Europe (1,5 fois plus productif par heure travaillée que la moyenne des pays de la zone euro), son avantage comparatif se réduit progressivement.

La productivité réelle du travail par heure travaillée a stagné depuis 2010 au Luxembourg, avec une croissance moyenne annuelle négative de 0,2%. À titre de comparaison, sur la même période, elle a augmenté en France (+0,7% par an), en Allemagne (+0,9%) et en Belgique (+0,5%). Cette tendance s’est accentuée entre 2021 et 2023, où la productivité luxembourgeoise a chuté de plus de 3%, repassant sous son niveau de 2019.

Évolution de la productivité du travail, PIB par heure travaillée selon l’OCDE. (Graphique: CNP)

Évolution de la productivité du travail, PIB par heure travaillée selon l’OCDE. (Graphique: CNP)

Cette stagnation s’explique par plusieurs facteurs structurels. Tout d’abord, le temps de travail moyen par salarié diminue, sous l’effet d’une hausse du travail à temps partiel, (4,5% des heures travaillées en 2023) et de l’extension des congés légaux. Ensuite, le poids des services dans l’économie luxembourgeoise, en particulier la finance, limite les gains de productivité par rapport à des secteurs plus industrialisés. Enfin, la transition énergétique et la complexité administrative freinent l’investissement des entreprises dans l’innovation et l’optimisation des processus.

La question du ajoute une pression supplémentaire: avec un système largement tributaire de la croissance économique, la stagnation de la productivité pourrait à terme fragiliser le modèle social luxembourgeois.

Évolution de la productivité réelle du travail au Luxembourg, par heure travaillée et par personne employée selon le Statec. (Graphique: CNP)

Évolution de la productivité réelle du travail au Luxembourg, par heure travaillée et par personne employée selon le Statec. (Graphique: CNP)

Cinq pistes pour redynamiser la productivité 

Simplifier l’environnement administratif Le cadre réglementaire et les démarches administratives sont régulièrement pointés du doigt par les entreprises comme des freins à l’efficacité. La mise en place  – qui éviterait aux entreprises de fournir plusieurs fois les mêmes informations aux administrations – pourrait libérer des ressources précieuses.

Investir massivement dans l’innovation et la formation Le Luxembourg doit renforcer son attractivité pour les talents et les investissements en recherche et développement. Actuellement, les dépenses privées en R&D restent bien en dessous de la moyenne européenne. Adopter une approche de «fast follower», en intégrant rapidement les innovations développées ailleurs, pourrait aussi accélérer le gain de productivité.

Accélérer l’adoption de l’intelligence artificielle (IA) L’IA représente un levier majeur de productivité. Si le Luxembourg est bien positionné en matière de préparation technologique, l’utilisation de l’IA . Un plan stratégique national pourrait faciliter son adoption et en maximiser les bénéfices économiques.

Encourager la croissance des entreprises Le Luxembourg affiche une forte densité de start-up, mais celles-ci peinent à grandir. Favoriser leur passage à l’échelle (scale-up) via un meilleur accès au financement et aux marchés internationaux permettrait de stimuler la productivité globale du pays.

Améliorer les pratiques managériales Le pays souffre d’un déficit en compétences de gestion par rapport à d’autres économies avancées. Mieux former les dirigeants et promouvoir dans les entreprises et l’administration publique pourrait améliorer l’efficacité organisationnelle et la motivation des employés.