Aurélie Dardenne, Legal Advisor chez Brucher Thieltgen & Partners (Photo: Crossfire pour Maison Moderne)

Aurélie Dardenne, Legal Advisor chez Brucher Thieltgen & Partners (Photo: Crossfire pour Maison Moderne)

Depuis quelques années, le Luxembourg a mis en place un certain nombre d’initiatives visant à assurer une transformation «durable» de son secteur financier. Parmi celles-ci, il est possible de citer la création de la Luxembourg Sustainable Finance Initiative ayant vocation à soutenir les parties prenantes dans ce processus, ou encore le Luxembourg Green Exchange, première plateforme dédiée aux instruments financiers qualifiés de durables. Toutefois, force est de constater que les perspectives de la finance durable connaissent une nette remise en question ces derniers mois due à une multitude de facteurs.

L’augmentation des accusations d’écoblanchiment et les réponses réglementaires nécessaires

Ces deux dernières années ont été marquées par une forte intensification des accusations de greenwashing visant certains acteurs et imposant aux régulateurs une réponse ferme afin d’assurer la protection des investisseurs finaux et de regagner leur confiance.

En juin 2024, l’ESMA a publié son rapport final sur l’écoblanchiment visant à fournir des lignes directrices d’interprétation de cette notion aux autorités nationales compétentes. Il a été ainsi établi que le concept d’écoblanchiment doit être interprété de manière uniforme sur le sol européen, qu’il peut être intentionnel ou non, s’appliquer à tous les secteurs économiques et surtout être déclenché par des tiers et non uniquement par l’entité cible.

Ces deux dernières années ont été marquées par une forte intensification des accusations de greenwashing visant certains acteurs.
Aurélie Dardenne

Aurélie DardenneLegal AdvisorBrucher Thieltgen & Partners

Outre ces éléments de définition, l’ESMA a réaffirmé son intention d’encadrer l’utilisation des termes ESG ou durabilité dans l’appellation des fonds. Ainsi, les fonds d’investissement souhaitant utiliser ces dénominations doivent se conformer à des obligations en matière de détention d’investissements utilisés pour respecter les caractéristiques sociales et environnementales mises en avant.

En dépit de cette initiative, le greenwashing induit un climat de méfiance à l’égard des produits financiers dits durables.

Des produits encore méconnus et dont la crédibilité est remise en question

La défiance à l’égard des produits financiers dits durables est essentiellement due à deux facteurs, à savoir l’écoblanchiment précédemment mentionné, mais aussi une connaissance limitée de ces produits.

Le Climate Finance Label et le Green Bond Label, tous deux lancés par l’agence luxembourgeoise de labellisation et visant à promouvoir la transparence des investissements climatiques, restent encore méconnus et suscitent une confiance modérée.

En outre, une étude menée par le Forum pour l’investissement responsable (FIR) datant de 2021 a mis en lumière cette attractivité limitée des investissements durables puisque sur un échantillon de 1.000 personnes, seulement 13% aurait déjà réalisé un investissement responsable.

La défiance à l’égard des produits financiers dits durables est essentiellement due à deux facteurs, à savoir l’écoblanchiment précédemment mentionné, mais aussi une connaissance limitée de ces produits.
Aurélie Dardenne

Aurélie DardenneLegal AdvisorBrucher Thieltgen & Partners

Il est à craindre que les suspicions à l’égard de ce type de produits gagnent du terrain dans la mesure où, outre-Atlantique, les géants de Wall Street se sont récemment engagés dans une démarche prônant une limitation des normes ESG en matière financière. A titre d’illustration, cinq grands acteurs de la gestion d’actifs américains ont fait le choix au printemps dernier de se retirer du Climate Action 100+ alors même que cette coalition renforçait les obligations pesant sur les investisseurs et imposait aux entreprises davantage d’actions en faveur du climat.

Les incertitudes en matière de réglementation  

Enfin, le phénomène de stagnation de la finance durable peut également s’expliquer par une réglementation européenne parfois qualifiée de trop complexe pour les acteurs financiers. En effet, les différentes initiatives réglementaires européennes se sont multipliées ces dernières années donnant lieu à une impression de fragmentation.

La taxonomie, la Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR), la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) ou encore la Corporate Sustainability Due Diligence Directive (CS3D) sont autant de normes applicables au secteur financier mais qui parviennent difficilement à favoriser l’adoption de pratiques durables en raison des incertitudes qu’elles engendrent.

Ces incertitudes sont principalement liées au fait que les textes susmentionnés peinent à être transposés en droit interne. Par exemple, lors de la cérémonie des vœux de la Fedil, le Premier ministre Luc Frieden a annoncé un gel de la transposition de la directive CSRD.

En outre, les textes européens sont en perpétuelle révision. Ainsi, le 26 février dernier, la Commission européenne a présenté son projet de directive Omnibus visant à simplifier la réglementation européenne en la matière et à accroitre la compétitivité des entreprises européennes. Parmi les mesures phares, le champ d’application de la directive CSRD est restreint, entrainant une exclusion de 80% des entreprises initialement concernées, et les délais de transposition de transposition de la directive CS3D et des obligations de reporting sont repoussés.

Dès lors, les échéances à venir sont les suivantes:

·      Mise en place des obligations de reporting selon la directive CSRD dès 2027 avec une seconde vague en 2028,

·      Transposition de la directive CS3D sur le devoir de vigilance en juillet 2027 pour une application à compter de juillet 2028.

Ces différents obstacles ne doivent pas être perçus comme un recul inéluctable du processus de transformation durable du secteur financier mais plutôt comme une nécessité de développer une méthode rigoureuse permettant un accompagnement progressif des différents acteurs dans cette transition. En ce sens, les experts de Brucher, Thieltgen and Partners peuvent vous fournir un support juridique dans l’application des différentes réglementations en matière ESG ainsi que dans la mise en conformité de vos obligations de reporting.

Pour tout projet en matière de finance durable, ou, plus généralement, pour toute question relative à la législation/réglementation ESG, le cabinet Brucher Thieltgen & Partners est en mesure de vous accompagner. N’hésitez pas à vous rendre sur le site brucherlaw.lu ou à contacter directement nos experts:

Nicolas Thieltgen, Managing Partner:

Aurélie Dardenne, Legal Advisor: