Karin Schintgen est administratrice pour Oraxys, SnapSwap International, Microlux, Prairial et pour le Consel consultatif de la BCEE. (Montage: Maison Moderne)

Karin Schintgen est administratrice pour Oraxys, SnapSwap International, Microlux, Prairial et pour le Consel consultatif de la BCEE. (Montage: Maison Moderne)

Dans son numéro Women on board, Paperjam met en lumière plus de 100 profils de femmes prêtes à rejoindre un conseil d’administration. Découvrez divers profils de femmes ainsi que leurs points de vue et leurs idées pour un meilleur équilibre des genres dans les instances de décision.

a passé l’essentiel de sa carrière dans le secteur de la finance, d’abord à New York puis à Luxembourg. Sa carrière au sein de différents départements du monde bancaire fut enrichie par deux expériences, l’une comme diplomate au sein du ministère des Affaires étrangères et l’autre comme directrice de la communication du groupe RTL. Passionnée par la diversification économique, elle fonde le Lux Future Lab, premier incubateur créé par une banque en Europe. Elle en assure la direction jusqu’en 2017 avant de devenir CEO de la House of Startups jusqu’en 2019. Elle s’est aussi engagée dans les domaines de la responsabilité économique en créant une Summer School et en accompagnant la création de Microlux, première institution de microfinance du pays, dont elle est administratrice. En 2022, elle devient administratrice de SnapSwap.

Quels sont les principaux défis que vous avez rencontrés en tant que femme administratrice indépendante?

Karin Schintgen. – «Aucun sauf qu’accepter un poste d’administrateur indépendant requiert comme disent les Anglo-Saxons du ‘commitment’. Chaque administrateur, homme ou femme, doit faire un effort sérieux d’intégration, d’implication et de compréhension de l’entreprise en question et de ses activités. Un des défis – et pas le moindre – est aussi de continuer à se former et s’informer, notamment en matière de nouvelles technologies. Il faut se poser en permanence la question: quel est l’impact de ses nouvelles technologies ou de ses développements sur ‘mon’ entreprise?  Par contre, et ce malgré tous les développements récents, je reste convaincue que dans le monde du travail, les femmes doivent gérer en permanence un ensemble plus complexe de défis partagés entre leurs responsabilités familiales, professionnelles et sociales. Coordonner tout cela en même temps est un réel défi beaucoup plus pour les femmes que pour les hommes!

Comment gérez-vous les éventuelles résistances à votre égard?

«Avec si nécessaire (un effort) de patience et de l’humour.

Pensez-vous que l’égalité hommes-femmes progresse au sein des conseils d’administration?

«Je pense que l’égalité hommes-femmes progresse lentement. Difficile de dire à quoi cela tient – peut-être une question de disponibilité des femmes, peut-être que les hommes disposent souvent de plus de marge de manœuvre pour se concentrer sur leur carrière, peut-être les vieilles habitudes font qu’on ne pense pas toujours aux femmes quand on cherche un administrateur indépendant, notamment dans les grandes entreprises familiales?

Que pensez-vous des quotas pour les femmes dans les conseils? Sont-ils nécessaires ou contre-productifs selon vous?

«Personnellement je pensais en effet – il y a 15 ans – qu’on aurait dû avoir, pour une période transitoire, des quotas: aujourd’hui ce cap est passé, même si tous les objectifs ne sont pas encore atteints. 

En tant que femme administratrice, sentez-vous une responsabilité particulière de défendre les questions de parité et d’inclusion?

«Pas en tant que femme, mais en tant qu’administratrice oui! Dans le sens où je suis convaincue que chaque entreprise profite d’une plus grande diversité – mais pas seulement hommes-femmes. Je pense notamment aussi aux diversités ethniques, culturelles, sexuelles et d’éducations. Disposer au sein d’un conseil d’administration d’un vaste réservoir d’expériences professionnelles et de back-grounds différents ne peut être que bénéfique. J’en suis d’autant plus convaincue qu’un bon administrateur peut/doit apporter à l’entreprise, à côté de son devoir de contrôle et d’analyse, un regard ouvert et innovateur. Et en cela, la contribution des femmes est particulièrement précieuse. Nombre d’études ont montré que les femmes y apportent une intelligence émotionnelle, des ‘soft skills’, une créativité et un esprit de collaboration différent de leurs collègues masculins sans oublier le fait qu’elles représentent après tout la moitié du marché! Alors peut-on en tant qu’entreprise moderne ignorer tout cela? Je ne pense pas et je dois dire qu’une des choses qui me font dresser les cheveux sur la tête est quand j’entends dire: ‘Ah oui on voudrait bien, mais on ne trouve pas’, alors qu’il y a aujourd’hui plus de femmes graduées au top des meilleures universités que d’hommes!

Selon vous, comment la diversité influence-t-elle la performance d’un conseil d’administration?

«La diversité génère toujours une certaine dynamique, ce regard nouveau dont j’ai parlé, peut-être aussi une remise en question de certains modus operandi. La diversité apporte des idées nouvelles et en cela – et les statistiques l’ont totalement prouvé – elle est profitable pour l’entreprise.

Quel conseil donneriez-vous à une femme qui hésiterait à se lancer? 

«Je lui dirais d’y aller! C’est justement ces hésitations qui nous retiennent. Vous savez, en règle générale, les hommes sont moins compliqués – ils se demandent simplement deux choses: est-ce que cela m’apporte plus de pouvoir et/ou plus d’argent? Évidemment je lui demanderais aussi si elle s’intéresse vraiment au devenir de cette boîte et si elle a envie de contribuer à son succès car il faut absolument vouloir s’investir! Et surtout il faut réaliser qu’on a en tant qu’administrateur une réelle responsabilité. Mais je dirais la même chose aussi à un homme.»