«Je suis le dossier depuis des années et je manque de vocabulaire pour qualifier l’atrocité de la situation des salariés de Liberty Steel à Dudelange. L’usine est au bord du précipice et cela concrétise la crainte que l’on avait depuis la reprise en 2019.» Le constat est de Robert Fornieri, secrétaire général adjoint du LCGB. Les 150 salariés accusent actuellement un retard de paiement de leurs salaires du mois d’octobre et le mois de novembre s’achevant ce samedi, tout porte à craindre qu’ils ne seront pas payés non plus pour cette période.
Ce 25 novembre, le ministre du Travail, (CSV), et des représentants du ministère de l’Économie ( étant en mission économique en Chine) ont reçu les syndicats OGBL et LCGB ainsi que la délégation du personnel pour discuter de la situation actuelle, de l’avenir de Liberty Steel à Dudelange et du non-paiement des salaires. «Le ministre du Travail (…) a assuré aux syndicats et à la délégation du personnel que son ministère veillerait à rechercher des solutions pour éviter une détérioration supplémentaire», explique le communiqué du ministère.
Une «obstination insensée» pour le LCGB
Mais deux cas de figure semblent se profiler à l’horizon: la cessation de paiement et la faillite, ou le transfert d’activité à de potentiels repreneurs. «Mais quelle entreprise voudrait reprendre des sites endettés?» interroge Stefano Araujo, secrétaire central de l’OGBL. «Si l’entreprise se déclarait en faillite, un curateur serait nommé et un cadre légal permettrait aux salariés d’être payés le temps de trouver un ou des repreneurs.»
Car des repreneurs potentiels pour les sites de Liberty Steel (Dudelange et Liège notamment) se sont déjà manifestés, «Mais le groupe n’a au final jamais concrétisé ces appels du pied et nous n’avons jamais compris pourquoi, et maintenant ils font du chantage à l’emploi», poursuit Stefano Araujo. Et Robert Fornieri de renchérir: «Les dirigeants de Liberty Steel ont fait preuve d’une obstination insensée pour ne pas revendre, leur attitude est incompréhensible et inexplicable. Était-ce une obstination par orgueil? Ils ont tout fait pour ne pas voir aboutir les demandes des repreneurs, et sans avoir aucun projet industriel pour le site de Dudelange pour autant.»
Car de l’aveu même des syndicats, le site luxembourgeois «possède un savoir-faire et des produits très demandés, le marché est là. Mais personne ne fait confiance à Liberty Steel pour signer des contrats. Ce ne sont pas des industriels mais des traders à la base.» «Et les dirigeants locaux de l’usine sont dans le même bateau que les salariés, ils sont autant abandonnés par le groupe», appuie Robert Fornieri.
Deux entreprises intéressées par le site belge
«À l’été dernier, Liberty Steel s’était engagée auprès des syndicats et des salariés à mettre en vente le site pour permettre sa reprise et la relance des activités. Cet engagement, présenté comme une lueur d’espoir pour les travailleurs, reste à ce jour concrètement sans suite (…). Aujourd’hui, les syndicats OGBL et LCGB interpellent la Commission européenne et les États membres, et donc aussi le Luxembourg, en vue d’une intervention urgente. Face à un groupe qui laisse couler ses entités en Europe les unes après les autres, il est impératif de protéger les salariés de Dudelange et d’assurer l’avenir du site. La Commission et les États doivent agir pour écarter Liberty et permettre à d’autres acteurs de reprendre les activités», ont commenté cette semaine les syndicats dans un communiqué commun.
Et encore ce lundi 25 novembre, côté belge, les syndicats ont appris lors d’un conseil d’entreprise extraordinaire qu’une entreprise américaine et une italienne étaient intéressées par la reprise des sites liégeois de Liberty Steel. L’avenir dira si le site dudelangeois serait aussi concerné.