Ivan Zilic confirme qu’il a acquis le groupe Cenaro le 23 janvier. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Ivan Zilic confirme qu’il a acquis le groupe Cenaro le 23 janvier. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

L’ancien ingénieur de Ford résidant au Luxembourg, Ivan Zilic, revendique être le propriétaire de Cenaro Group, qu’il a acheté le 23 janvier pour un euro symbolique et la prise en charge des 150 millions d’euros de dettes. Sauf que…

La faillite du groupe immobilier Cenaro pourrait-elle rebondir? Ce vendredi 17 février, sollicité par Paperjam, Ivan Zilic confirme qu’il a acquis le groupe Cenaro pour un euro symbolique et la prise en charge des 150 millions de dettes. Selon le double du contrat qu’il nous a envoyé, la vente a été signée sous seing privé et les deux signatures ont été légalisées par le notaire Edouard Delosch le 23 janvier 2023. Son calcul est simple: «La réalisation des projets rapportera plus de 650 millions d’euros de chiffre d’affaires», explique-t-il ce lundi 20 février.

À ce moment précis, chaque date compte. Après des mois à essayer de trouver des financements pour faire face à ses échéances, . Ce qu’il finit par faire le vendredi 20 janvier.

La vente du groupe intervient donc trois jours plus tard, avant que la faillite ne soit officiellement prononcée par le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, le mercredi 25 janvier, lequel tribunal confie la gestion de la faillite à deux curateurs, Mes Marguerite Ries et Yann Baden.


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Le dimanche 29 janvier, en plein milieu de l’après-midi, M. Chevalier envoie un mail pour dire que le groupe va pouvoir payer «la totalité des dettes du groupe Cenaro, y compris envers l’État, grâce à l’offre de reprise de faillite de M. Zilic (…) qui a été communiquée au curateur vendredi dernier.»

Ce qui lui vaut une mise au point directe de l’ancien ingénieur de Ford, trois heures plus tard, et toujours par mail: «Je voudrais vous préciser que je ne vous ai fait aucune offre. Nous – monsieur Christophe Chevallier (vendeur) et monsieur Ivan Zilic (acheteur) – avons signé un contrat de vente devant notaire et le groupe Cenaro m’appartient depuis le 23 janvier. Les administrateurs provisoires de l’insolvabilité ont accepté le contrat d’achat. Il est donc clair que les administrateurs provisoires de l’insolvabilité doivent indemniser tous les créanciers de manière régulière.»

Aucun des deux curateurs n’a accepté votre contrat de vente avec M. Chevallier.

Maître Yann BadenCurateur de la faillite du groupe Cenaro

C’est ce mail, adressé aussi aux curateurs, qui vaudra à son tour à M. Zilic une mise au point de Me Yann Baden, le lendemain matin, lundi 30 janvier. Le Luxembourg ne prévoit pas d’administrateurs provisoires, mais des administrateurs définitifs, relève d’abord le curateur. «Aucun des deux curateurs n’a accepté votre contrat de vente avec M. Chevallier. Nous venons d’en prendre note. En dehors de cela, le contrat de vente est en dehors de la procédure de faillite, car celle-ci ne porte pas sur les actions de la société, mais uniquement sur le ‘contenu’ de la société, c’est-à-dire le fonds de commerce et les actifs. Vous pouvez donc être le propriétaire de l’entreprise et la faillite couvrira l’ensemble des activités et des actifs de l’entreprise.»

Le curateur invite le nouvel acquéreur à être attentif aux délais de recours dans ce cas. L’article 472 du Code de commerce prévoit que «l’opposition ne sera recevable que si elle est formée par le failli dans la huitaine, et par toute autre partie intéressée dans la quinzaine de l’insertion de ces jugements dans celui des journaux mentionnés à l’article 472 qui s’imprime dans le lieu le plus voisin de leur domicile.»

Maître Baden «aura besoin d’un avocat!»

Mais, dans un mail adressé à Me Baden ce dimanche 19 février, le nouveau propriétaire l’avertit: «Puisque vous avez pris connaissance du contrat, j’espère que vous l’avez également mis à la disposition du tribunal de l’insolvabilité. L’insolvabilité aurait dû être suspendue pour le moment. Ce qui est certain, c’est que si vous avez refusé le contrat de vente au tribunal de l’insolvabilité, il s’agit d’un acte criminel conscient et intentionnel.»

Puis, ce lundi, il répond à Paperjam que tout ce qu’il peut dire sur la proposition du curateur, «c’est qu’il aura bientôt besoin d’un avocat!»

Le jeudi 2 février, la police perquisitionnait le siège de Cenaro Group et son CEO était placé en détention préventive.

M. Zilic est relativement discret au Luxembourg. Il s’est fait connaître en 2014, alors que des médias autrichiens recherchaient des informations sur cet ancien ingénieur de Ford, qui a fait fortune, explique-t-il, à partir d’un brevet révolutionnaire dans le soudage de pièces métalliques, utilisé par quelques constructeurs automobiles ou encore Black & Decker. Le dernier bilan disponible de sa société, U&V Consulting, en Allemagne, fait état de 24,239 milliards d’euros d’actifs. Ce bilan déposé en 2016 porte sur l’année 2012. Il n’a répondu à aucune de nos questions en dehors de celles qui ont trait au groupe Cenaro.

Qu’est-ce que ce coup de théâtre changerait? Les chefs d’inculpation contre M. Chevallier n’en seraient pas abandonnés pour autant, mais le groupe pourrait poursuivre le développement des projets immobiliers et son développement tout court.