Pascal Blanqué prédit un retour structurel de l’inflation. (Photo: Amundi)

Pascal Blanqué prédit un retour structurel de l’inflation. (Photo: Amundi)

Pour Pascal Blanqué, directeur des investissements chez Amundi, le risque d’inflation est actuellement sous-estimé. Mieux, il considère que nous sommes à un moment d’envie d’inflation qui sent bon les années 70.

L’inflation s’impose toujours plus comme le sujet du moment. Controversé.

Pour sa part, Pascal Blanqué ne partage pas le consensus actuel selon lequel le sursaut de l’inflation auquel nous sommes confrontés ne serait que temporaire et que, sous la surveillance et le total contrôle des banques centrales, l’activité va croître alors que l’inflation va de nouveau s’orienter à la baisse, tout comme les taux d’intérêt. «Un scénario de conte de fées.»

Dans son analyse, il pense que nous sommes à la veille d’un basculement qui va balayer «l’actuel consensus et ses narratifs» et que l’on se dirige vers une situation proche de celles des années 70 dans laquelle ce sont l’inflation et la stagflation qui dictaient les politiques économiques. Une période qui a pris fin au début des années 80 avec l’arrivée de Paul Volcker à la tête de la Réserve fédérale américaine. Paul Volcker, qui incarna le boom des politiques monétaristes et de la désinflation comme conséquence. «L’histoire montre que les économies avancées et leurs marchés financiers connaissent périodiquement des bouleversements. Cela se produit lorsque les conséquences du régime financier existant ne sont plus tolérées par la société au sens large.» Dont l’austérité.

Le grand basculement

Les signes «conjoncturels» de ce basculement, il les voit dans les hausses des anticipations en matière d’inflation, dans la corrélation positive entre obligations et actions et dans la rotation des actions vers les titres «value». «Tout le monde va dans le même sens», constate-t-il. Ce qui est rarement une bonne chose sur les marchés boursiers.

Et surtout, il sent «un désir d’inflation». «Une première depuis 30 ans.» Un désir qu’il voit se concrétiser d’autant plus sûrement que «tous les éléments sont réunis devant nous».

Pour lui, la demande est là, renforcée par l’actuel excédent d’épargne.

Et du côté de l’offre, il estime que l’héritage de ces 30 dernières années – «la perception que les capacités de production sont là et que tout est disponible en abondance» – est dilapidé et que les goulots d’étranglement et la rareté deviennent la règle. Et c’est moins la faute du Covid que celle des sous-investissements de ces dernières années dans plusieurs secteurs de l’économie.

Déglobalisation

De plus, il estime que l’actuelle réorganisation des chaînes de valeur plus régionalisées sera synonyme de hausse des prix des biens et des services. La mondialisation, qui a joué un rôle important dans la modération des prix durant ces dernières décennies, perd du terrain. Qu’elle aura du mal à récupérer. «Une reprise de l’activité n’est pas synonyme d’un rebond équivalent du commerce international.»

Enfin, il constate que le partage de la valeur ajoutée commence à se rééquilibrer au profit des salaires et non plus du capital.

Et dernière brique: l’action des banques centrales qui monétisent progressivement la dette publique ravive les anticipations d’inflation. Des anticipations autoréalisatrices. Pour lui, en ce qui concerne l’inflation, «le temporaire est un concept fuyant».

Quelles seront les conséquences de ce grand basculement pour les marchés?

Pascal Blanqué s’attend à une hausse des taux d’intérêt, de l’inflation et de la volatilité. «La fin du système de grande modération sur lequel on a vécu ces trois dernières décennies.» Ce qui induit des conséquences majeures sur le risque, la volatilité, les rendements et la hiérarchie des classes d’actifs. Voire une reconnexion à l’économie réelle.