1. Les origines de la fondation
Depuis le milieu des années 2000, les acteurs de la gestion de fortune luxembourgeois développent un intérêt croissant pour la philanthropie. «Avant cette période, le sujet n’était que rarement discuté au niveau de la sphère financière. Quelques institutions bancaires, en particulier la Banque de Luxembourg, ont émis l’idée que le Luxembourg devrait plus s’impliquer dans ce domaine», explique la directrice de la Fondation de Luxembourg, . Ces acteurs ont rapidement été entendus. En 2008, le Premier ministre de l’époque, Jean-Claude Juncker, a annoncé : «Les deux premières mesures étaient relatives au cadre légal, d’une part pour simplifier les dons et d’autre part pour doubler la déductibilité des dons, de 10 à 20% du total des revenus imposables. La troisième mesure concernait la création de la Fondation de Luxembourg, afin de faciliter l’engagement philanthropique au travers d’une fondation», poursuit Mme Hirdman.
2. Une prise de conscience rapide
Dans un premier temps, la majorité du secteur bancaire, notamment au niveau du wealth management, s’est montrée hésitante face à la philanthropie, malgré une demande croissante de la clientèle. «Au cours des premières années, nous avons fait un travail de sensibilisation important, surtout auprès des banques privées, afin de faire comprendre l’intérêt de la philanthropie et la nécessité d’en parler à leurs clients. Les institutions bancaires se sont interrogées sur ce qui pouvait lier le wealth management et la philanthropie», explique Tonika Hirdman. «Les banques les plus réactives ont vite compris l’intérêt de cette pratique, de pouvoir offrir un accompagnement en la matière et, en même temps, d’approfondir leurs relations avec les clients. Actuellement, toutes les banques de la place financière ont inclus le conseil en philanthropie dans leur offre.»
Un pont entre les acteurs
Le rôle de la Fondation de Luxembourg est d’établir les liens entre, d’une part, le secteur financier et les donateurs et, d’autre part, le monde caritatif, comme les ONG, les centres de recherche et les institutions culturelles. «Ce sont des univers totalement différents qui communiquent avec des vocabulaires propres à chacun. Un de nos rôles est de communiquer avec les acteurs de la finance et d’accompagner les donateurs s’engageant dans une démarche philanthropique», développe Tonika Hirdman. «Nous accompagnons la démarche de création, en structurant le projet, en définissant l’objet et en mettant en place une gouvernance. Nous veillons aussi à la gestion et au suivi administratif de la fondation.»
Les entreprises sont de plus en plus nombreuses à vouloir impliquer leurs collaborateurs dans un projet philanthropique, aligné sur les valeurs de la société.
4. Les philanthropes
On peut distinguer quatre grandes catégories de donateurs. «La première concerne des personnes plus âgées, qui souhaitent voir leur engagement continuer après leur décès», explique Tonika Hirdman. «Il y a également des hommes et des femmes d’affaires, dont la carrière a été couronnée de succès, et qui souhaitent rendre une partie de leur réussite à la société. Cette catégorie de donateurs augmente.» Ces personnes, exigeantes dans leur démarche, ont tendance à appliquer une vision entrepreneuriale au niveau de la gestion de leur fondation. La troisième catégorie concerne les familles fortunées souhaitant sensibiliser leurs enfants et transmettre leurs valeurs. «La dernière catégorie est composée d’entreprises. Elles sont de plus en plus nombreuses à vouloir impliquer leurs collaborateurs dans un projet philanthropique, aligné sur les valeurs de la société», complète la directrice générale.
5. Choisir des causes durables
Lors de la création de la Fondation de Luxembourg, il y a rapidement eu une prise de conscience concernant la nécessité de développer une stratégie en faveur des investissements ESG. «La philanthropie et l’ESG sont fortement liés. Les donateurs veulent avoir un impact positif aussi au travers de leurs investissements», déclare la directrice. Dans ce contexte, les donateurs sont encouragés à appliquer la stratégie ESG développée par la Fondation de Luxembourg, pour les investissements de leur propre fondation. «Certains d’entre eux souhaitent aller encore plus loin en renforçant leur soutien à travers des investissements dans les fonds d’impact ou la microfinance, par exemple», développe Tonika Hirdman.
6. Des causes plus soutenues
L’engouement pour la philanthropie se confirme au fil du temps. «Nous avons observé une forte croissance des dons dans les domaines de la santé et de la recherche. Ce sont d’ailleurs les domaines qui mobilisent les volumes d’actifs les plus importants», développe Tonika Hirdman. «Nous avons aussi constaté d’importants flux en faveur de causes et de projets liés à l’éducation. L’idée poursuivie par nos donateurs est que, en finançant l’éducation, ils contribuent non seulement au développement d’un individu, mais aussi à celui de sa famille, et, par conséquent, les effets positifs du don se répercutent sur toute la société.» Le domaine culturel a également vu les actifs dont il bénéficie augmenter.
Le fait que le Luxembourg soit positionné comme un des centres financiers les plus importants au monde est un facteur d’attractivité.
7. Un impact positif
La philanthropie est un moyen d’avoir un impact positif sur la société. «Aujourd’hui, nous faisons face à des enjeux importants, tels que, par exemple, le changement climatique, la sécurité alimentaire, et même la santé…», commence à expliquer Tonika Hirdman. «Le gouvernement ne peut pas traiter l’ensemble de ces problématiques. Les donateurs peuvent, à leur échelle, s’engager dans cette recherche au travers de leur fondation et prendre des risques financiers. Nous avons déjà vu des causes, soutenues dans un premier temps uniquement par une fondation, devenir un véritable sujet pour les décideurs et, par la suite, recevoir d’autres sources de financement.»
8. L’importance de la sensibilisation
Depuis la création de la Fondation de Luxembourg, il y a 15 ans, d’importants efforts ont été réalisés afin de sensibiliser les acteurs de la gestion de fortune et leurs clients à l’intérêt de la philanthropie. «Nous organisons régulièrement des tables rondes et des présentations avec les banques privées, des cabinets d’avocats et des family offices», explique la directrice générale. La Fondation de Luxembourg entend aussi contribuer à la formation des gestionnaires de fortune de demain. Pour cela, elle prend part au cursus proposé aux étudiants du master en wealth management de l’Université du Luxembourg. Des conférences sont régulièrement organisées sur cette thématique.
9. Les actifs
Les montants mobilisés dans le cadre d’une démarche philanthropique sont transmis sous la forme d’actifs liquides ou de portefeuilles d’investissement. «Chaque fondation créée sous notre égide dispose de son propre compte en banque, hébergé dans l’institution bancaire choisie par le donateur. Une fois la banque choisie, c’est nous qui gérons ces actifs avec la banque en question», explique Tonika Hirdman. Avec la nouvelle loi qui succède à celle de 1928, relative aux associations et aux fondations, les actifs immobiliers peuvent maintenant être gérés au sein d’une fondation.
10. Le Luxembourg et la philanthropie
Le pays dispose d’atouts non négligeables pour les donateurs souhaitant créer une fondation. «Deux aspects sont importants pour ceux qui souhaitent engager une telle démarche au départ du Luxembourg: la stabilité économique, d’une part, et la constance au niveau des politiques menées, d’autre part. Le fait que le Luxembourg soit positionné comme un des centres financiers les plus importants au monde, notamment en ce qui concerne le domaine des banques privées, est également un facteur d’attractivité», affirme Tonika Hirdman.
Cet article a été rédigé pour le supplément ESG de l’édition de parue le 25 octobre 2023. Le contenu du magazine est produit en exclusivité pour le magazine. Il est publié sur le site pour contribuer aux archives complètes de Paperjam.
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