Philippe Ledent nous parle d’un début d’année «financièrement fascinant». (Photo: Maison Moderne)

Philippe Ledent nous parle d’un début d’année «financièrement fascinant». (Photo: Maison Moderne)

Dans sa première chronique de l’année, Philippe Ledent, expert economist chez ING Belux, s’étonne de l’enthousiasme boursier, qu’aucun des événements de ces premiers jours de rentrée ne parvient à atténuer.

Au moins trois événements auraient pu créer des remous importants dans les marchés financiers cette semaine. Mais finalement, ces derniers ont préféré, encore et encore, ne retenir que les bonnes nouvelles et laisser de côté les signaux d’alarme.

Primo, la victoire des deux candidats démocrates à l’élection sénatoriale américaine donne les pleins pouvoirs au parti de Joe Biden, et ce au moins pour deux ans. Cela évitera de trop longues discussions et des blocages dans certains dossiers (on pense évidemment aux mesures de relance additionnelles), ce qui est plutôt une bonne nouvelle. Ceci étant, cela donne aussi le champ libre à l’administration Biden pour appliquer certaines mesures qui ne plaisaient pas nécessairement aux investisseurs. On pense notamment à la promesse d’augmenter la taxation des bénéfices des entreprises. Mais, finalement, les marchés semblent s’en accommoder, préférant ne retenir que la cohérence entre les institutions américaines.

Secundo, comment ne pas évoquer l’insurrection temporaire du Capitole intervenue cette semaine. N’oublions quand même pas que, pour beaucoup d’observateurs, l’expression par la violence du refus d’une victoire de Joe Biden par les partisans de Donald Trump était vue, avant l’élection présidentielle, comme le scénario du pire. Mais encore une fois, les marchés sont restés de marbre.

Mais voilà, nous ne vivons pas des temps normaux.
Philippe Ledent

Philippe Ledentexpert economistING Belux

Tertio, ce vendredi, le Bureau of Labor Statistics américain a publié un très mauvais rapport sur l’emploi en décembre. Alors que le consensus de marché s’attendait à une hausse nette (certes, modeste) de l’ordre de 70.000 emplois, le rapport fait état d’une contraction de 140.000 emplois, avec en particulier une contraction de 95.000 emplois du secteur privé. Certes, le chiffre de novembre a été assez nettement révisé à la hausse. Mais le chiffre de décembre montre que l’économie a du mal à se relever du choc de la pandémie: par rapport au niveau d’avant la crise, il manque toujours 10 millions d’emplois à l’appel! En temps normal, cela aurait créé une forte déception sur les marchés financiers. Mais voilà, nous ne vivons pas des temps normaux. Ce chiffre confortera encore davantage l’administration démocrate qu’un plan de relance bien plus ambitieux que celui décidé jusqu’à présent est nécessaire. Dans le même temps, la politique monétaire n’en restera que plus accommodante. Les politiques budgétaire et monétaire soutiendront l’économie, ce qui est bon pour les marchés. Entre la mauvaise nouvelle économique et les bonnes nouvelles qu’elle entraîne, les marchés financiers auront, une fois de plus, vite choisi. La fête ne serait pas complète si tout le monde ne s’extasiait pas devant les nouveaux records atteints par le bitcoin, qui, je vous le rappelle, est un actif ne reposant sur… rien. Bref, ce début d’année est financièrement fascinant.