Pour Marc Hengen et l’Aca, les pandémies sont inassurables. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Pour Marc Hengen et l’Aca, les pandémies sont inassurables. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Les assurances sont des victimes méconnues de la pandémie. On parle de pertes prévisibles de l’ordre de 250 milliards d’euros pour le secteur. Et d’une image dégradée.

Les assureurs ont-ils fait preuve d’un manque de solidarité collective? C’est une critique qui s’entend. Une critique qui se cristallise sur la question de l’indemnisation des pertes d’exploitation. Les contentieux se multiplient sur le sujet en France avec des fortunes variées. Ce n’est pas le cas pour l’instant au Luxembourg. Si quelques demandes ont pu être déposées, elles ont toutes été déclinées et ne semblent pas avoir donné lieu à contentieux.

Au Luxembourg, les contrats couvrant les pertes d’exploitation sont expressément limités aux trois cas d’ouvertures suivants: l’incendie, la tempête ou le dégât des eaux. Ce qui exclut juridiquement les pandémies et les mesures de fermeture administrative, font remarquer AXA Luxembourg et Foyer. Franck Marchand, directeur des opérations de Foyer au Luxembourg, donne une explication fondamentale à cette non-couverture: les compagnies luxembourgeoises n’ont simplement pas les moyens de faire face. «La fermeture administrative est un événement qui touche tout un pays, et nous n’avons pas la solidité pour couvrir un événement de cette taille. C’est a priori quelque chose qui ne peut être que pris en charge par l’État.»

Groupe de travail pandémie

Ce discours a été porté par l’Aca, l’association professionnelle des assureurs luxembourgeois, auprès du gouvernement, explique , l’administrateur délégué. «Nous avons dit au ministre des Finances que, pour les assureurs, les pandémies sont inassurables.» Les deux parties ont convenu de réfléchir à un mécanisme pouvant contribuer au financement des risques liés aux pandémies. «Ces réflexions existent dans l’ensemble des pays touchés par le Covid-19, surtout en Europe, où la prise en charge a été différente selon les pays», détaille Marc Hengen. Un groupe de travail s’est mis en place au sein de l’Aca pour répondre à ce défi pour les pandémies futures.

Si les travaux de ce groupe de réflexion sont encore en phase de démarrage, c’est le système français d’indemnisation des catastrophes naturelles en France qui fait figure de modèle. Ce système s’apparente à une fusée à trois étages. L’assureur intervient d’abord puis, si nécessaire, le relais est pris par un fonds financé par la solidarité interassureur, et en dernier recours par l’État.

Sinistralité déplacée

L’autre grand sujet à l’agenda des compagnies est l’évolution de la sinistralité.

On pouvait imaginer que les confinements successifs et la chute de l’activité avaient fait baisser le nombre de sinistres. Et donc accru les réserves des compagnies. «Ce n’est pas le cas», indique Franck Marchand, pour qui la sinistralité s’est simplement déplacée. «Les gens sont restés chez eux. Il y a eu donc moins de vols. Mais dans le même temps, l’usage plus important des appareils électriques a occasionné plus de dégâts. On peut faire une constatation similaire en matière de circulation. Il y a effectivement eu moins de voitures sur les routes, mais les chiffres de la sécurité routière rapportent plus d’accidents corporels en 2020 par rapport aux années précédentes. Les routes étaient dégagées et les gens ont roulé plus vite. À grande vitesse, les accidents sont toujours plus graves.»

À quels effets doit-on s’attendre pour l’évolution des primes? «Nous n’avons pas encore suffisamment de recul pour mesurer l’impact de ces évolutions», indique Franck Marchand.


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Sur le front des assurances-santé, la question du niveau de couverture et de l’évolution des primes se pose.

Tension sur les assurances-santé

«Il faut savoir que la ratification des assurances-santé est soumise à un encadrement prudentiel très strict. Il n’est notamment pas possible d’exclure un assuré après la survenance d’un sinistre», explique Marc Hengen. Tout client en bonne santé souscrivant aujourd’hui un contrat de ce type sera couvert en cas d’apparition de symptômes et en cas d’hospitalisation.

Mais dans le cas d’une personne ayant déjà contracté le Covid, «si un refus d’assurance est à exclure» – étant entendu qu’il existe toujours une période de carence entre le moment où un contrat est conclu et où il commence à s’appliquer –, rassure Franck Marchand, «il faut s’attendre à une hausse probable des primes». Et de poursuivre: «Il faut savoir que chez les gens qui ont développé le Covid, il y a une proportion importante de personnes présentant des séquelles de différents ordres par la suite. Avec les questionnaires de santé, nous allons regarder quelles sont ces séquelles. Si elles nécessitent des soins récurrents, ceux-ci viendront enchérir la prime.»

Un surcoût qui sera encadré, précise Marc Hengen: «Toute hausse des primes doit pouvoir être justifiée par rapport à une hausse scientifiquement démontrée sur le long terme.»

Combien de gens pourraient être concernés? À la date du 12 décembre, on comptait 48.372 cas de Covid déclarés au Luxembourg. 5% à 15% d’entre eux, selon l’Organisation mondiale de la santé, sont susceptibles de développer des maladies graves.