«La situation internationale dans son ensemble, la crise énergétique, la guerre, récemment la mobilisation militaire par exemple, affectent la situation bien davantage que ne le pourraient le faire les mesures du gouvernement», explique l’économiste Christos Koulovatianos. (Photo: Université du Luxembourg)

«La situation internationale dans son ensemble, la crise énergétique, la guerre, récemment la mobilisation militaire par exemple, affectent la situation bien davantage que ne le pourraient le faire les mesures du gouvernement», explique l’économiste Christos Koulovatianos. (Photo: Université du Luxembourg)

Les moyens annoncés pour réduire l’inflation vont dans le bon sens, selon l’économiste Christos Koulovatianos, même si celle-ci reste très difficile à contrôler et que de nombreux facteurs pourraient bien davantage l’affecter. Le marché immobilier, «talon d’Achille» du pays, doit en outre être sécurisé, prévient l’économiste.

«Toutes choses étant égales par ailleurs, ce sont de très bonnes mesures», commente le professeur Christos Koulovatianos, économiste à l’Université du Luxembourg, à propos des mesures contenues dans , qui vise en priorité à réguler l’inflation en tentant de stabiliser les prix de l’énergie.

Mais le «toutes choses étant égales par ailleurs» est ici essentiel. Car l’inflation est un phénomène complexe, lié à de très nombreux facteurs, qui le rendent justement extrêmement difficile à contrôler. «La politique du gouvernement réduirait l’inflation si nous étions dans un monde paisible et stable», ajoute l’économiste. «Malheureusement, la situation internationale dans son ensemble, la crise énergétique, la guerre, la récente mobilisation militaire en Russie par exemple, affectent la situation bien plus que ne pourraient le faire les mesures du gouvernement.»

La situation internationale dans son ensemble, la crise énergétique, la guerre, la récente mobilisation militaire par exemple, affectent la situation bien plus que ne pourraient le faire les mesures du gouvernement.»
Christos Koulovatianos

Christos Koulovatianosprofesseur d’économie à l’Université du Luxembourg

Cela dit, «les décisions politiques du gouvernement sont bonnes, j’étais soulagé», insiste Christos Koulovatianos. «C’est bien pour le consommateur ainsi que pour les personnes les plus précaires, car il y a un risque de perte d’emplois. Nous pouvons espérer une inflation réduite du fait de cette politique, même si on ne peut pas prédire si l’inflation augmentera ou non du fait de la guerre – c’est tout le problème.»

De bonnes décisions, mais dont on ne peut pas prévoir l’efficacité? La réponse peut paraître ambivalente. «Ma réponse est très claire, mais le monde est ambivalent», rétorque l’économiste. «Il n’existe pas de bouton magique avec l’inflation. Il y a des choses sur lesquelles on peut agir au Luxembourg, d’autres sur lesquelles on ne peut pas, comme les décisions de Vladimir Poutine ou celles de la Banque centrale européenne (BCE). Comment peut-on agir au Luxembourg? Avec des décisions telles que celles que le gouvernement a prises. Et je suis très content de la direction prise.»

Bulle sur le marché immobilier

L’inflation n’est pour autant pas le seul problème auquel doit prendre garde le gouvernement. Avec la hausse des taux par la BCE, justement pour lutter contre l’inflation, les taux d’intérêt hypothécaires sont sous pression. «Des taux à 8% ou 10%, même si je ne dis pas que cela va arriver, ne seraient pas une surprise totale d’ici quelques mois», estime Christos Koulovatianos.

Or, du fait des prix très élevés de l’immobilier au Luxembourg, une telle hypothèse pourrait poser des difficultés de remboursement d’emprunts pour de nombreux ménages, qui devraient alors vendre. L’étendue du problème découle bien sûr du nombre de personnes concernées par un emprunt à taux variable, ainsi que d’autres facteurs liés aux particularités du Luxembourg, ce qui rend la situation très imprévisible, mais le fait est que l’éclatement d’une bulle est un risque non négligeable dans le pays.

Le «talon d’Achille» du pays

Une bulle que le gouvernement doit faire en sorte de dégonfler sans attendre, en tentant de sécuriser le marché de l’immobilier et les prêts hypothécaires. «Le gouvernement pourrait augmenter les surfaces disponibles pour créer des opportunités de construire de nouvelles habitations, ou convaincre autant de personnes que possible de se convertir à un taux d’intérêt fixe», considère l’économiste.

De futures indexations pourraient aussi augmenter la «pression sur le marché immobilier», selon Christos Koulovatianos, qui reste cependant modérément inquiet du fait du comportement prudent de la BCE. «Je ne me sens pas trop nerveux concernant le marché immobilier, mais le problème existe, et il peut s’aggraver en cas de mauvaise passe politique en Europe cet hiver», prévient l’économiste. Le marché immobilier reste le «talon d’Achille» du Luxembourg, rappelle Christos Koulovatianos, qui prévient: «Le gouvernement doit prendre garde au fait que le problème n’est pas seulement l’inflation, mais aussi, à plus long terme, le marché immobilier.»