David Wagner: «L ’Europe empêche en réalité autre chose qu’une politique néo-libérale. » (Photo: Maison Moderne / Archives)

David Wagner: «L ’Europe empêche en réalité autre chose qu’une politique néo-libérale. » (Photo: Maison Moderne / Archives)

Dix partis présenteront des listes au Luxembourg. Tous nourrissent de grandes ambitions, mais les différences sont grandes entre ceux qui veulent plus d’Europe, ceux qui veulent la restructurer et ceux qui veulent la faire disparaître. Cette série se poursuit avec David Wagner, candidat Déi Lénk.

Que représentent les élections européennes pour Déi Lénk?

.- «C’est un moment important, car tout scrutin est important. Nous n’avons pas encore de député. Et avec seulement six élus luxembourgeois, le défi est de taille pour en avoir un, on le sait. L’enjeu est de convaincre que donner sa voix à Déi Lénk, ce n’est pas ne rien en faire.

Vous êtes un parti européen?

«Le Parlement européen est un peu un parlement ‘croupion’ et les députés ne savent pas facilement s’adresser à leur électorat. Nous faisons partie de ceux qui remettent les traités en question. Nous avions d’ailleurs appelé à voter contre en 2005. Les Luxembourgeois avaient d’ailleurs dit non à 43% à la constitution pour l’Europe.

Mais ce qui avait été chassé par la porte est revenu par la fenêtre. Les traités rendent impossible toute vraie politique de gauche. Cela s’est vu en Grèce avec Syriza, qui avait un vrai programme de rupture mais qui a été contraint de ne pas l’appliquer. L’Europe empêche en réalité autre chose qu’une politique néo-libérale.

Ce n’est pas avec un député que vous changerez les choses...

«Mais il ne sera pas seul au sein du Parlement et nous aurons des alliés, évidemment. Ce qui compte, c’est d’être utile afin de lutter contre le pouvoir des multinationales. Et contre les aspects antisociaux des traités.

Quel est votre idéal économique?

«Une économie fondée sur les besoins réels des gens et pas sur ceux du marché. Attention: ce qui est planifié par un État rigide ne marche pas non plus, car ce n’est pas démocratique. On ne veut pas nationaliser la petite épicerie de quartier, hein! Mais on veut plus de service public, plus d’intervention de l’État et moins de liberté pour les grands groupes.

Conditionner les aides au développement, à la gestion de l’immigration, c’est à nos yeux une idée catastrophique.
David Wagner

David WagnercandidatDéi Lénk

Et inclure les citoyens?

«Oui, un groupe public peut être cogéré par les citoyens.

Les migrations seront encore un grand enjeu demain?

«Et il y a une grande hypocrisie derrière cela, notamment de la part de la France. Nous avons une double obligation morale, car ces gens sont d’une part en danger et d’autre part, c’est sans doute un peu de notre faute. Conditionner les aides au développement, à la gestion de l’immigration, c’est à nos yeux une idée catastrophique.

Vous craignez les populismes?

«Je n’aime pas le mot, car on parle aussi de populisme de gauche. Mais oui, je suis inquiet, car cela va à l’encontre du progrès social. Quand on commence à croire que l’ennemi, c’est l’autre, on ne s’engage plus pour d’autres causes. Mais je ne veux pas être pessimiste. Quand un monde meurt, un autre naît. Mais il faut être attentif, car des monstres peuvent aussi voir le jour.

Les jeunes dans la rue, les «gilets jaunes», cela vous interpelle?

«Les citoyens se mobilisent pour l’environnement et les inégalités sociales grandissantes. Cela démontre que tout le monde a compris que le système économique actuel détruit la planète. On nous dit que le progrès est là. Mais ce n’est pas parce qu’on a la télé qu’on vit mieux.

Et on découvre le phénomène des travailleurs pauvres?

«Travailler beaucoup et ne pas savoir si c’est tout de même assez, c’est terrible! Être un travailleur pauvre, c’est très insécurisant. On peut être un esclave moderne, avec un CDI.

Nous sommes outsiders et dans la bagarre.
David Wagner

David WagnercandidatDéi Lénk

Il faut mieux former les gens?

«Si les gens sont sans un métier, c’est souvent un choix et une formation. On sent maintenant presque une volonté de former les gens selon les besoins de l’économie. Cela ne va pas. Chacun a aussi besoin de calme.

Vous êtes un Européen?

«Je suis un internationaliste. L’Europe est un peu étroite à mes yeux. Je suis pour des collaborations plus larges.

Vous avez enchaîné les élections en quelques années. N’est-ce pas trop?

«Cela fait trois fois que je suis candidat en trois ans, c’est beaucoup. Et je suis de fait un peu fatigué. Cela demande aussi beaucoup de concentration et empêche parfois de faire d’autres choses. Nous avions créé un groupe ‘élections’ au sein du parti il y a 4 ans... et nous n’avons jamais eu l’occasion de le dissoudre, car les événements se sont succédé. Nous sommes outsiders et dans la bagarre.

Est-ce compliqué d’être de gauche au Luxembourg?

«Ce n’est pas un problème. C’est sur le mouvement ouvrier que l’État moderne s’est construit. Il n’est pas infamant d’être de gauche, socialiste ou communiste, même au Luxembourg.»