Créée au Canada, poursuit l’objectif de réconcilier l’humain avec la nature. Son approche est «positive», explique Hubert Mansion, son fondateur, dans une interview à Paperjam: elle consiste à montrer les apports de la nature sur la santé physique et mentale de l’être humain. Avec l’idée que réapprendre à aimer et à s’identifier à la nature est la manière la plus efficace d’amener les individus à contribuer à la transition écologique. Des parcours pédagogiques en forêt sont ainsi organisés dans ce but, notamment au Luxembourg.
Deux conférences organisées par l’Université dans la nature auront lieu cette semaine au Luxembourg. Hubert Mansion présentera huit pistes pour parler aux jeunes de la nature, sachant que les jeunes générations sont les premières victimes de l’écoanxiété. , il expliquera comment amener la nature dans les bâtiments lors d’une conférence sur le «biophilic design».
Quel est le travail de l’Université dans la nature?
Hubert Mansion. – «L’Université dans la nature propose une nouvelle pédagogie pour la transition écologique. Le problème actuel de la transition écologique est que l’approche est très négative: nous parlons toujours de l’impact de l’humain sur la dégradation de la nature. C’est une perspective. Mais il y en a une autre, la nôtre: c’est ce que la nature fait à l’humain. Nous avons une approche de la nature qui est beaucoup plus positive.
Les gens protègent ce qu’ils aiment, donc c’est d’abord cela qu’il faut faire: rétablir le contact sensible avec la nature.
Vous avez développé un principe, le «réconcilisme»…
«Il s’agit d’augmenter l’affect par rapport à la nature. C’est une chose d’augmenter les connaissances sur la manière dont la nature fonctionne ou sur l’impact de l’activité humaine sur la nature. Mais c’en est une autre de développer un affect, un véritable amour de la nature. Les gens protègent ce qu’ils aiment, donc c’est d’abord cela qu’il faut faire: rétablir le contact sensible avec la nature, et pas seulement un contact de nature scientifique et problématique.
Comment réalisez-vous cette réconciliation?
«Nous avons créé une activité qui s’appelle (Re)connexion Nature. Nous emmenons des groupes dans une forêt pendant trois heures. Et nous leur expliquons comment la nature est en train d’agir sur eux. L’activité a été . Des chercheurs ont suivi ce qui se passe dans le corps des participants lors de l’activité, minute par minute, pendant trois heures.
Je ne suis pas, comme la culture occidentale l’a prétendu pendant deux millénaires, différent des autres vivants.
C’est une activité qui a un vrai impact sur le corps, mais aussi sur notre relation avec la nature. Ce qu’on entend le plus souvent après l’activité, c’est: ‘Je ne regarderai plus jamais la nature de la même manière’. Quand on entend cela, le but est atteint. Car voir la nature pour ce qu’elle est et non pas pour ce qu’on croit qu’elle est développe ce que nous appelons ‘l’identité environnementale’. Or, la plupart des recherches en psychologie environnementale démontrent que la clé des comportements durables est le fait de ne pas se considérer différent de son environnement naturel. Et, de fait, il y a beaucoup de ressemblances entre les végétaux, les animaux et moi. Je ne suis pas, comme la culture occidentale l’a prétendu pendant deux millénaires, différent des autres vivants.
Vous devez aussi former vos guides…
«Nous donnons également des cours. D’une part, pour former les guides qui accompagnent par la suite ces gens en forêt. Et, d’autre part, pour accompagner la transition écologique, en expliquant en détail les aspects philosophiques, historiques, anthropologiques de notre déconnexion à la nature. Car il est important de commencer par comprendre pourquoi on en est arrivé là avant de passer à poser des gestes. C’est en réalité notre culture occidentale qui nous a déconnectés de la nature.
Mais la nature est le berceau de l’humanité: l’humain est né dans la nature et il a passé 99,9% de son évolution historique dans la nature. Il est fait par et pour la nature. Et quand il retrouve la nature, il se passe quelque chose de très profond.
L’humain est né dans la nature et il a passé 99,9% de son évolution historique dans la nature. Il est fait par et pour la nature. Et quand il retrouve la nature, il se passe quelque chose de très profond.
Pouvez-vous donner des exemples de l’impact de la nature sur l’être humain?
«L’impact de la nature en ville a été beaucoup étudié depuis les années 2000. L’épidémiologie a ainsi démontré que les gens qui habitent dans un environnement plus ‘vert’ bénéficient, par exemple, d’une meilleure santé cardiovasculaire que ceux qui habitent dans un environnement plus ‘gris’.
Ils sont aussi moins affectés par des problèmes de santé mentale que les autres. Ceci a été beaucoup démontré lors de la pandémie: pendant le confinement, les gens qui avaient accès à un espace vert avaient moins de problèmes de santé mentale que les autres.
Et, au-delà de la nature en ville, quel est l’impact de la forêt sur l’individu?
«Par exemple, deux promenades de deux heures consécutives en forêt augmentent le nombre et l’activité des cellules anticancéreuses, respectivement de 50% et de 56%. Ce qui est encore mesurable une semaine après. Et une promenade en forêt de 90 minutes diminue les risques d’anxiété et de dépression, ce qui n’est pas le cas pour les gens qui, dans le cadre de la même étude, se promenaient en ville.
Pendant le confinement, les gens qui avaient accès à un espace vert avaient moins de problèmes de santé mentale que les autres.
Vous assurez que la science est au cœur de votre approche…
«Nous avons un positionnement qui est exclusivement scientifique. Nous nous appuyons sur notre base de données scientifique, qui est, je pense, la plus grosse base de données au monde sur l’impact de la nature sur l’être humain. Nous avons des milliers d’études qui concernent aussi bien la santé physique que psychologique, cognitive et sociale. C’est notre base de travail.
Beaucoup de gens pensent que prendre du bon air et faire de l’exercice est bon pour la santé. Mais la recherche scientifique va aujourd’hui beaucoup plus loin que cela. Depuis les années 80, elle démontre, de semaine en semaine, un impact incroyable sur toute une série de pathologies, aussi bien physiologiques que psychologiques.»