Au Château d’Urspelt, depuis la crise sanitaire, la clientèle est quasi exclusivement européenne et particulièrement centrée sur le Luxembourg et les pays limitrophes, indique Yannick Ruth, le general manager. (Photo: Chateau d’Urspelt)

Au Château d’Urspelt, depuis la crise sanitaire, la clientèle est quasi exclusivement européenne et particulièrement centrée sur le Luxembourg et les pays limitrophes, indique Yannick Ruth, le general manager. (Photo: Chateau d’Urspelt)

Les vacances bien-être ont le vent en poupe et la tendance se vérifie au Luxembourg. Les professionnels du secteur n’hésitent pas à investir pour profiter du filon.

Ils sont plus de 140.000 résidents et frontaliers à avoir utilisé leur bon de 50 euros entre l’été 2020 et la mi-septembre 2021. Soit un coupon sur cinq émis par le gouvernement et à valoir sur une nuit d’hôtel pour soutenir le tourisme local touché par la pandémie. Un autre enseignement ressort de cette initiative: les trois établissements les plus visités sont, selon la fédération Horesca, le Château d’Urspelt, le Mondorf Parc Hôtel et le Leweck Resort. Leur point commun? Ils sont tous dotés d’infrastructures wellness.

Piscine, sauna, hammam, jacuzzi, cabine de soins ou encore salle de fitness: les équipements de bien-être constituent désormais un atout supplémentaire pour permettre aux hôteliers de se distinguer sur un marché concurrentiel et en pleine mutation. 

D’un côté, la pandémie de Covid-19 et le recours accru aux outils de vidéoconférence ont mis un sévère coup de frein au tourisme d’affaires, un segment sur lequel le Luxembourg ambitionne d’intégrer le top 50 des destinations mondiales les plus prisées. De l’autre côté, le tourisme de proximité a décollé: le nombre de nuitées touristiques réalisées par des résidents a été multiplié par six entre 2019 et 2020, selon le Statec. 

Quant aux visiteurs étrangers, le trio de tête reste identique avec les Pays-Bas (408.243 nuitées) en tête devant la Belgique (244.745) et l’Allemagne (151.266). Le nombre de touristes issus de pays tiers s’est par contre effondré de 46% à près de 713.000 nuitées.

Un resserrement de la zone de chalandise

Une tendance confirmée au Château d’Urspelt où, depuis la crise sanitaire, la clientèle est quasi exclusivement européenne et particulièrement centrée sur le Luxembourg et les pays limitrophes tandis qu’avant 2020 le patchwork de visiteurs s’élargissait à d’autres pays d’Europe, à l’Asie et à l’Amérique du Nord. «Notre approche globale est de miser sur des moments inoubliables pour nos visiteurs, en leur offrant des expériences hôtelières, gustatives et de bien-être différentes», commente Yannick Ruth, general manager du Château d’Urspelt.

L’hôtel d’une soixantaine de chambres, situé non loin de Clervaux, a réalisé des travaux d’aménagement d’un spa au printemps 2020, au moment où toute l’activité était au point mort. Depuis le début 2021, l’hôtel propose en exclusivité pour le Grand-Duché un centre de soins avec les produits de la marque française Nuxe. Des saunas, hammams, salle de relaxation et bassins, dont une piscine au décor de grotte immergée, ont également vu le jour. 

«Depuis l’ouverture du spa Nuxe en janvier 2021, le principal impact sur les activités hôtelières est le lissage de la saisonnalité de la demande, avec une activité hivernale clairement renforcée», détaille le directeur. Celui-ci évoque aussi un impact positif sur l’attractivité, la dépense moyenne et la zone de chalandise. L’entrepreneur ne compte pas s’arrêter là puisqu’il prépare cette année deux nouveautés: une piscine extérieure dotée d’un «pool bar» et un deuxième spa thématique situé au cœur du château et avec la particularité d’être privatif.

«Notre approche globale est de miser sur des moments inoubliables pour nos visiteurs, en leur offrant des expériences hôtelières, gustatives et de bien-être différentes.
Yannick Ruth  

Yannick Ruth  General managerChâteau d’Urspelt

«Les infrastructures de bien-être peuvent être très intéressantes pour attirer la clientèle touristique, par contre moins pour le segment d’affaires», commente Alain Rix, conseiller et formateur à la fédération Horesca. Du côté des atouts, celui qui est également en charge de la classification des établissements évoque la montée en gamme que procure une infrastructure wellness. «C’est un aspect très important, d’autant plus quand des poids lourds comme Booking.com assurent que la première chose que les clients regardent, ce sont les étoiles.» 

Mais pareilles infrastructures mobilisent de l’espace et engendrent des frais non négligeables pour les tenanciers, surtout à l’heure où le coût des charges (salariales, mais aussi d’électricité) bondit et où les préoccupations environnementales gagnent du terrain. «Un projet de loi prévoit de rendre accessibles toutes les zones des hôtels ouvertes aux personnes handicapées, cela nécessitera une adaptation des infrastructures et des coûts en conséquence», note Alain Rix. 

Pas certain donc que tous les hôteliers suivent le mouvement et puissent se permettre des travaux d’envergure. Il existe néanmoins des solutions moins gourmandes en trésorerie, comme la création d’espaces de soins dans lesquels des prestataires externes peuvent venir exercer. Dans ce schéma, l’hôtelier propose un service à sa clientèle tout en externalisant la majorité des coûts. 

Le tourisme wellness, un moteur

Force est de constater que, chez les particuliers, l’envie de se faire plaisir n’a jamais été aussi prononcée que depuis la fin des restrictions sanitaires sévères appliquées au plus fort de la crise sanitaire. Parmi les secteurs à bénéficier de ce report de dépenses, le wellness tire son épingle du jeu. Entre 2020 et 2025, le lobby Global Wellness Institute table sur une croissance annuelle moyenne du secteur de 9,9%, contre 6,6% avant 2020.

Dans le détail, les segments du tourisme wellness, des thermes et des spas sont ceux qui affichent les projections les plus fortes, allant de 17% à presque 21%. «L’importance relative du wellness a nettement augmenté ces dernières années au Luxembourg», observe Luxembourg for Tourisme (LFT) dans une note. Selon le GIE, ses adeptes sont des touristes de proximité, en provenance à nouveau des pays frontaliers. Pourtant, le marché du bien-être reste à ce jour marginal avec une part de 3% de l’ensemble des voyages au Luxembourg, selon LFT.

  Source: Global Wellness Institute

  Source: Global Wellness Institute

Quelques nuances s’imposent toutefois: une part plus importante des clients des hôtels sont tentés par leurs infrastructures wellness, faisant grimper leur usage à 12% des hôtes du pays en 2021 contre 10% en 2018. Le Vieux Continent fait office de première destination mondiale en matière de tourisme wellness, avec 37% des voyages réalisés sur ce segment en 2020 (36% en 2019) devant l’Asie-Pacifique (35%) et l’Amérique du Nord (21%).

Le voyage bien-être revêt donc une dimension locale importante. «En termes de communication, le Luxembourg reste notre marché principal, mais nous accentuons toujours notre présence dans les trois pays frontaliers», confirme Paul Hammelmann, président du conseil d’administration de Mondorf Domaine Thermal. En 2020, le Mondorf Parc Hôtel a enregistré 17.120 nuitées, avec un taux d’occupation de 37,9% pour les résidents, 29% pour les Belges, 25,7% pour les Français et 2,5% pour les Allemands. Les hôtes en provenance d’autres pays représentaient 4,9% de l’ensemble, précise encore l’établissement public.

Jusqu’au printemps 2020, l’organisme participait à des foires B2B et B2C au Grand-Duché et dans les pays frontaliers, avec un effet palpable dans sa fréquentation: «Même si le résident est en haut du panier, la France et la Belgique peuvent aujourd’hui se disputer la deuxième marche, toutes activités confondues (hébergement, spa, wellness, fitness, restauration).» Les visiteurs venus des pays frontaliers ont donc un rôle clé à jouer dans la croissance du tourisme de bien-être au Luxembourg. La volonté de ce secteur de s’ouvrir à ces publics et le niveau de qualité de ses infrastructures sont autant d’ingrédients qui devraient lui permettre de se distinguer sur un marché résolument dynamique et à la dimension de proximité prononcée. 

 Cet article a été rédigé pour  parue le 23 février 2022. Le contenu du magazine est produit en exclusivité pour le magazine. Il est publié sur le site pour contribuer aux archives complètes de Paperjam. 

 

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