Thierry Hoscheit et les autres membres du conseil d’administration de l’Alia aimeraient lancer un grand débat sur l’audiovisuel au Luxembourg. (Photo : Sebastien Goossens/Archives Maison Moderne)

Thierry Hoscheit et les autres membres du conseil d’administration de l’Alia aimeraient lancer un grand débat sur l’audiovisuel au Luxembourg. (Photo : Sebastien Goossens/Archives Maison Moderne)

L’Alia (Autorité luxembourgeoise indépendante de l’audiovisuel) organisait une conférence de presse ce lundi afin de présenter son avis sur la transposition de la cinquième directive européenne en matière d’audiovisuel. L’occasion d’en discuter avec son président, Thierry Hoscheit.

Pouvez-vous nous rappeler ce qu’introduit cette directive européenne?

Thierry Hoscheit. – «Elle est une extension de la surveillance des plateformes de partage vidéo par les régulateurs. Elle comporte beaucoup de petits détails. De manière plus concrète, elle impose ainsi à une plateforme comme Youtube, par exemple, de respecter des règles en matière de protection des mineurs, de non-discrimination… Mais aussi la mise en place de mécanismes permettant de solutionner rapidement les éventuels problèmes qui peuvent survenir.

À côté de ça, cette directive demande également à chaque État d’investiguer sur son territoire afin de déterminer quelles sont les différentes plateformes actives chez lui. Et de les signaler. Et puis, elle formalise la présence d’Erga (pour l’European Regulators Group for Audiovisual Media Services), le regroupement des organes régulateurs dont nous faisons partie. Avec des compétences propres et des groupes de travail afin d’aider la commission à trouver les meilleures règles possibles.

Dans la transposition telle que rédigée par le SMC (le Service des médias et des communications), les plateformes sont soumises à un régime différent des médias traditionnels. Normal?

«Un média traditionnel sait ce qui va être diffusé sur ses antennes. Une plateforme de partage vidéo, pas forcément. Ce qui est diffusé n’est pas de la responsabilité directe du gestionnaire de celle-ci. Il y a donc une différence dans la nature de ces médias. Ce qui explique des règles différentes. Après, sur le contenu proprement dit, les règles sont, elles, les mêmes. Pas d’incitation à la violence, à la haine…

Les médias d’aujourd’hui ne sont pas ceux d’il y a 30 ans.

Thierry HoscheitprésidentAlia

Vous auriez aimé profiter de cette transposition afin de réformer la «loi sur les médias électroniques de 1991»…

«Oui. Le projet de loi qui transpose cette directive va changer celle-ci sur certains points. Comme d’autres directives l’ont fait avant elle. Notre objectif était de creuser plus en profondeur que ce qui est prévu. D’en profiter pour effectuer des changements plus fondamentaux. Remettre au goût du jour une loi d’un autre temps et qui, désormais, est insatisfaisante et insuffisante. Parce que les médias d’aujourd’hui ne sont pas ceux d’il y a 30 ans. Et l’objectif de la conférence de presse tenue ce matin était d’essayer de lancer un débat public sur le sujet. De lancer une réflexion sur le contenu d’une possible future loi. En donnant notre sentiment, mais aussi en laissant la porte ouverte à d’autres avis.

Vous aimeriez notamment voir se créer une autorité indépendante unique gérant toutes les missions du régulateur audiovisuel…

«Il existe une dissociation au niveau de l’accès au marché. L’autorisation est donnée par le ministère pour certaines choses. Par nous pour d’autres. Et derrière, c’est à nous de contrôler. Nous pensons effectivement que ce serait bien de regrouper toutes les compétences. De manière à pouvoir réagir au mieux aux évolutions du marché.

Dans les pays qui nous entourent, le domaine de l’audiovisuel est géré par une autorité apolitique.

Thierry HoscheitprésidentAlia

Comme cela existe ailleurs, avec le CSA en France et en Belgique ou la DLM en Allemagne. C’est un souhait que l’Alia a depuis un petit temps…

«Nous n’existons que depuis six ans, cela ne peut donc pas faire si longtemps que ça. Nous avions été créés parce qu’une autre directive européenne l’imposait… Nous avons déjà eu l’occasion de présenter notre requête auprès du ministère des Médias. On m’a posé la question ce lundi de savoir qu’elle avait été leur réaction. Et j’ai répondu qu’il n’y avait pas vraiment eu de réaction. Ni positive ni négative. Ils ont plutôt eu l’air dans la réflexion.

Après, effectivement, dans les pays qui nous entourent, le domaine de l’audiovisuel est géré par une autorité apolitique. Ce qui me semble mieux quand on touche à un monde comme celui des médias. Et puis, une centralisation des compétences éviterait également de connaître le petit décalage que nous pouvons parfois vivre avec nos confrères lors des réunions de l’Erga.»