Frédéric Rollin, conseiller en stratégie d’investissement, Pictet Asset Management. (Photo: Maison Moderne/archives)

Frédéric Rollin, conseiller en stratégie d’investissement, Pictet Asset Management. (Photo: Maison Moderne/archives)

Après une telle performance, que peut-on attendre des marchés actions? Où investir alors? Quelle est la meilleure région? Quel est le meilleur secteur?

Depuis deux ans, l’épidémie fait rage. Pourtant, les marchés vivent une histoire merveilleuse. Les pénuries paralysent nos chaînes de production? Les actions s’envolent! L’inflation surgit du placard? Même pas peur! La colombe Powell se transforme en faucon? C’est l’enthousiasme! Hélas, même les plus belles histoires ont une fin. Verrons-nous celle-ci en 2022?

L’inflation: premiers signes de reflux aux États-Unis

Les tensions sur les chaînes de production et de logistique semblent se réduire progressivement. Dans certaines régions, les prix du transport maritime ont entamé un reflux. Les entreprises ont de plus en plus de facilité à obtenir des semi-conducteurs. Ce phénomène se propage progressivement dans les indicateurs avancés de l’inflation américaine. Les délais de livraison, tels que publiés dans les enquêtes auprès des entreprises, ont tendance à se réduire. Ils restent encore sur des niveaux élevés, mais sont loin des pics de tension du troisième trimestre de l’année 2021. C’est un signe avant-coureur d’une baisse de l’inflation. La Fed doit malgré tout ajuster sa politique monétaire, beaucoup trop accommodante en regard de l’activité économique. Les annonces touchent les marchés obligataires, qui tanguent. Mais nous ne devrions pas assister à un revirement brutal de sa politique. La baisse anticipée des pressions inflationnistes et la composition plutôt accommodante du comité de politique monétaire – avec deux nominations de colombes à venir – laisse penser que la Fed restera amicale.

Le manège des ménages

Partout dans le monde développé, les ménages sont plutôt en bonne forme. Le chômage a fortement reflué. Les hausses de salaire accélèrent aux États-Unis. L’épargne constituée grâce à la baisse de la consommation lors des confinements, et avec l’apport des subventions, représente des sommes astronomiques. La demande devrait donc rester forte. Et les entreprises, fortes d’une croissance bénéficiaire exceptionnelle en 2021, devraient investir en 2022. Les chiffres de croissance bénéficiaire devraient donc être solides. Au total, nous devrions obtenir une progression des résultats de l’ordre de 15%. Mais nous n’aurons probablement pas 15% de performance boursière, compte tenu du resserrement monétaire qui pèsera sur les valorisations. La performance totale des marchés actions devrait, quoiqu’il en soit, être très supérieure à celle des obligations.

Marchés actions: Europe plutôt qu’États-Unis

Nous pensons que les marchés actions européens devraient surperformer leurs homologues américains. Les valorisations des actions américaines sont effectivement plus tendues que celles des européennes. De plus, la BCE ne devrait pas resserrer sa politique monétaire. Les hausses de salaire sont très modérées dans la zone, et le risque d’un emballement de l’inflation est en conséquence quasi nul. En revanche, les résultats des entreprises européennes devraient largement bénéficier de la croissance mondiale.

Actions chinoises: encore un moment, s’il vous plaît

L’économie chinoise ralentit fortement. L’activité immobilière, si cruciale pour ce pays, est en train de s’effondrer. De nombreux promoteurs importants sont au bord de la faillite. Le ralentissement pourrait donc durer encore quelques mois. Mais des signes de rebond apparaissent. Poussé par une politique monétaire légèrement plus accommodante, le crédit a progressé au cours des six derniers mois. Modestement certes, mais c’est un premier signe. Certaines enquêtes auprès des entreprises sont plus encourageantes. À ce stade, nous attendons confirmation d’un réel revirement de la politique monétaire locale – jusque-là encore un peu timide – et des signes plus patents de reprise pour revenir sur les actions chinoises. Sur une longue période, ce marché reste pour nous un des meilleurs. À plus court terme, il risque d’être volatile.

Énergies propres et environnement

Les entreprises actives dans la préservation de l’environnement conservent notre préférence. Les années 2020 et 2021 ont vu l’attention des populations et des politiques se focaliser sur leurs activités. Les résultats de la COP26 sont certes insuffisants pour remplir les objectifs, mais ils vont dans la bonne direction. Des budgets ambitieux ont été votés par la plupart des grandes nations. L’innovation des entreprises est extrêmement dynamique. Des progrès importants se font jour dans la mobilité électrique, désormais directe concurrente des véhicules classiques, même sans l’apport de subventions. Ces stratégies ont de beaux jours devant elles. L’essentiel à retenir: — Les actions devraient bien performer en 2022. — Nous conservons notre préférence pour les actions européennes. — Les stratégies environnementales devraient tirer leur épingle du jeu.