La hausse des taux directeurs réduit la demande, mais ne peut que difficilement s’attaquer à un choc de l’offre. (Photo: Shutterstock)

La hausse des taux directeurs réduit la demande, mais ne peut que difficilement s’attaquer à un choc de l’offre. (Photo: Shutterstock)

La politique monétaire de la BCE ne peut pas influer sur les causes réelles de l’inflation. La hausse des taux ne pourrait donc être que cosmétique. La raison est aussi simple que la théorie de l’offre et de la demande.

Pour la première fois depuis 11 ans, la Banque centrale européenne (BCE) , le 27 juillet dernier, à hauteur de 0,5%. Un fait historique pour contrer un chiffre historique. En juin, le taux de l’inflation de la zone euro avait atteint son plus haut niveau, soit +8,6% sur un an.

Alors que l’une des missions de la BCE est de maintenir la stabilité des prix, jouer sur les niveaux des taux directeurs permet d’alléger la pression inflationniste. Pour rappel, les taux directeurs constituent le cœur de la politique monétaire de la BCE – et des autres banques centrales.

Parmi les taux directeurs se trouve le taux de refinancement qui n’est autre que le taux d’intérêt des liquidités empruntées par les banques commerciales auprès de la BCE. Il y a aussi le taux de refinancement des dépôts qui détermine le taux d’intérêt auquel sont rémunérées les réserves obligatoires des banques – ces dernières sont obligées de garder un certain montant de réserves sur leur compte courant auprès de la BCE. Outre ces deux taux directeurs, il existe également le taux du prêt marginal qui régit le taux d’intérêt auquel les banques empruntent des liquidités en échange de garanties telles que des titres financiers. Si le taux du prêt marginal est le plus élevé des trois taux directeurs, il est cependant celui qui permet aux banques commerciales d’emprunter autant de liquidités qu’elles le souhaitent auprès de la BCE.


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Le prix de l’argent

De façon plus générale, les taux directeurs définissent le coût d’un emprunt d’une banque commerciale auprès de la BCE. De la sorte, étant la pièce maîtresse de la politique monétaire, les taux directeurs sont communément assimilés au «prix de l’argent». Les taux directeurs fixés par la BCE ont donc une incidence sur les taux d’intérêt proposés par les banques commerciales à leurs clients.

Ainsi, en rehaussant ses taux directeurs, la BCE a augmenté le coût de ses prêts aux banques commerciales. Ce qui a un impact sur l’ensemble des particuliers et des entreprises. En cas de demande de prêt à leur banque, ils se verront offrir des taux d’intérêt moins avantageux, rendant plus difficiles les conditions d’accès aux crédits.

À l’inverse, la hausse des taux de la BCE devrait rendre l’épargne quelque peu plus attractive.

Deux réalités économiques

La difficulté des crédits combinée à une épargne relativement plus avantageuse a pour conséquence de diminuer la demande économique. Ce qui n’est rien d’autre que l’effet final recherché d’une telle politique monétaire. Si la demande diminue, le prix diminue.

En toute logique, pareille politique monétaire de la BCE a tout pour réussir, à la seule exception que l’inflation de la zone euro résulte d’un choc de l’offre. Avec une inflation des prix énergétiques de +39,7% en juin, les producteurs de la zone euro paient plus cher une partie de leurs matières premières ainsi que leurs coûts de transformation et font face à des risques de pénurie. Une série de coûts qui se répercutent sur les prix payés par les consommateurs. Or, la BCE n’est pas en mesure d’influer sur ces facteurs inflationnistes externes, relevant de la géopolitique.

Aux États-Unis, l’inflation à hauteur de 9,1% est, quant à elle, due à un choc de la demande, matérialisé par une hausse de cette dernière. Il s’agit d’une tout autre réalité économique qui permet dès lors à la Réserve fédérale américaine (Fed) d’adopter que la BCE. Rien que depuis le début de l’année, la Fed a entrepris de relever ses taux directeurs à quatre reprises.


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Un effet psychologique

Malgré tout, la hausse des taux directeurs de la BCE n’est pas dénuée de tout intérêt si elle comporte un volet psychologique. En effet, en communiquant sur ses objectifs de diminution de l’inflation, la BCE affecte le comportement des travailleurs et des entreprises. D’une part, les travailleurs devraient atténuer leurs demandes d’augmentation salariale et, d’autre part, les entreprises pourraient freiner leurs hausses de prix. Ainsi, la BCE entend éviter .

Dans tous les cas, le choc de l’offre en parallèle d’une baisse provoquée de la demande ne peut que se solder par une contraction de l’activité économique.  affluent d’ailleurs déjà en ce sens et les prévisions de croissance économique pour le second semestre 2022 sont désormais . Au-delà du choc de l’offre, caractéristique première de l’inflation européenne, l’incertitude quant à l’issue de la guerre en Ukraine reste la principale préoccupation des banquiers centraux. Plus longtemps le processus de paix prendra, plus l’inflation s’envolera et la croissance économique plongera.