La Cour d’appel doit déterminer si l’État a signé un contrat avec Guy Rollinger ou avec sa société. (Photo: Archives/Maison Moderne)

La Cour d’appel doit déterminer si l’État a signé un contrat avec Guy Rollinger ou avec sa société. (Photo: Archives/Maison Moderne)

Le promoteur a intenté une action en responsabilité devant la justice civile afin d’obtenir des dommages et intérêts à la suite de l’abandon du projet commercial de Wickrange.

Livange-Wickrange. Deux noms de communes que l’on n’avait plus entendu prononcés à la suite depuis plusieurs années. Mais, comme souvent, les affaires les plus brûlantes ne meurent jamais vraiment et revivent devant les tribunaux.

La première chambre de la Cour d’appel écoutait ce mercredi les plaidoiries des avocats de deux parties concernant l’action en responsabilité civile contractuelle menée par Guy Rollinger à l’encontre de l’État luxembourgeois. Le promoteur estime que ce dernier a failli à ses obligations – qui consistaient à «chercher et à trouver un terrain» voué à accueillir le projet de centre commercial du promoteur initialement prévu à Wickrange.

Au printemps 2009, deux projets de centres commerciaux d’envergure se profilaient au Grand-Duché: celui de Guy Rollinger à Wickrange, avec une «autorisation grande surface» reçue dès 2007 du ministre Fernand Boden, et celui du .

«L’État a voulu privilégier celui de M. Becca au détriment de celui de M. Rollinger», affirme Me Isabelle Homo, avocat de M. Rollinger, mentionnant la signée du Premier ministre de l’époque, Jean-Claude Juncker (CSV), et des ministres de l’Économie, Jeannot Krecké (LSAP), et de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire, Jean-Marie Halsdorf (CSV), par laquelle ils indiquaient que «le gouvernement soutient fermement la réalisation d’un projet d’ensemble sur ce site [de Livange, ndlr] autour d’un stade national de football avec les infrastructures commerciales nécessaires à la viabilité financière du projet du stade, comprenant, entre autres, un ‘outlet mall’ d’importance nationale».

Quand M. Rollinger a compris que son projet était mort-né, il a accepté de l’abandonner.

M e Isabelle Homoreprésentant Guy Rollinger

«Quand M. Rollinger a compris que son projet était mort-né, il a accepté de l’abandonner.» Il obtenait en contrepartie des parts dans le projet développé par Promobe SA – sauf qu’en fin de compte celui-ci , le stade étant .

Guy Rollinger a fini par revendre les terrains acquis au Groupe Giorgetti,  un point de vente pour les marques Ferrari, McLaren et Rolls-Royce, sur un site où seraient également aménagés des logements, deux restaurants, un hôtel et une maison de soins.

Le tribunal d’arrondissement de Luxembourg siégeant en matière civile avait considéré en première instance en avril 2016 que la demande de M. Rollinger n’était pas fondée et avait donc débouté le promoteur de sa réclamation de 196.843.000 euros.

Il avait suivi le raisonnement de l’État qui avait mis en avant le fait que les courriers échangés entre le gouvernement et le promoteur l’étaient au nom du Groupe Guy Rollinger ou de ses sociétés, et non pas au nom du promoteur lui-même. «Il faut mettre en doute qu’un projet commercial de l’envergure de celui des projets ‘Wickrange Shopping-Center’ ou ‘Livange’ soit à l’heure actuelle mené et assuré par une personne physique agissant en son nom personnel», avait considéré le tribunal.

Ce sont toujours les sociétés du groupe Rollinger [qui sont citées dans les courriers].

M e Claude Schmartzreprésentant de l’État

Guy Rollinger a interjeté appel de ce jugement et obtenu la tenue d’un procès en appel après deux ans de digressions procédurales soulevées par l’État – l’appel a en effet été adressé à la «Cour supérieure de justice siégeant en matière d’appel», une dénomination que l’État a considérée comme une «mention erronée de la juridiction compétente» et donc à frapper de nullité. Ce qui n’avait pas manqué de faire du bruit à la Cité judiciaire.

«C’est une ligne de défense inhabituelle et singulière» que présente l’État, souligne Me Homo, puisque ce dernier ne conteste pas avoir signé un contrat en bonne et due forme, mais refuse à M. Rollinger la qualité de cocontractant. Alors même que celui-ci apparaît comme destinataire des différents courriers envoyés par l’un ou l’autre ministère.

«Ce sont toujours les sociétés du groupe Rollinger» qui sont citées dans les courriers, rétorque succinctement Me Claude Schmartz, mandaté par l’État, «même si cela n’arrange pas la partie adverse qui a lancé l'action au nom de M. Rollinger».

Il revient à la Cour d’appel de se prononcer. La présidente de la 1re chambre a placé la décision en délibéré au 18 décembre.