Ce matin-là, les nuages traînent leur carcasse grise dans le ciel de Grevenmacher. Comme s’ils allaient poser leurs valises de pluie – ô sacrilège! – sur la route du Vin. Le camping s’étire avec douceur en attendant que la piscine municipale, collée au camping, ouvre.
«Tous les Belges ont annulé. Tous les Allemands ont annulé. Nous avons encore des réservations pour demain [samedi, ndlr], mais nous ne savons pas au juste qui viendra.» Le vice-président du Syndicat d’initiative, Alain Goedert, ne semble pas plus atteint que cela par ces défections dues aux mauvais chiffres des infections des derniers jours au Luxembourg. «Tout était réservé… mais comme nous avons 90 des 130 places qui sont louées à l’année, des Luxembourgeois ou des Belges qui ont installé leur mobil-home, nous allons faire avec!»
«Vous savez», reprend-il, «les Luxembourgeois qui viennent ici habitent souvent dans la capitale ou dans le sud dans de très petits appartements, et ils ont ici comme un air de vacances.»
Tandis que Serge Schumacher et son épouse s’occupent du bureau et du petit snack, à droite, en entrant, M. Goedert salue la politique menée par le gouvernement face au Covid-19. «Je pense qu’ils ont pris les bonnes décisions. Maintenant, les chiffres semblent moins bons, mais il faut les expliquer mieux.»
À quatre, les deux gérants et deux employés de l’Adem, plus une personne de l’Entente touristique qui s’occupe du secrétariat administratif depuis le bureau du Marie-Astrid, le camping dorlote ses fidèles et une clientèle plutôt de passage, dans quatre petites cabanes en bois imposées par le développement du glamping ou dans quelques appartements, en plus des emplacements pour les tentes.
«Dans le temps», explique le vice-président du Syndicat d’initiative, «les Belges et les Allemands venaient toucher leurs coupons à la banque et dépensaient cet argent au Luxembourg, soit au restaurant, soit dans les hôtels ou structures d’hébergement. Aujourd’hui, soit ils ne viennent plus, soit ils vont plus dans le sud, où le soleil est davantage présent. Les Hollandais, qui continuent de venir, viennent pour le vin et pour la région d’Echternach. À l’époque, ils arrivaient en bus, une fois par semaine, dans l’unique hôtel du coin. Toutes les semaines. Un bus rempli», dit-il avec nostalgie.
Presque aussi au milieu du village que l’église, le camping est idéalement placé, entre le Kulturhuef, le jardin des papillons, la piscine et la piste cyclable des trois rivières, à deux pas des Caves Bernard-Massard et de la rôtisserie du quai.
La concurrence est quasiment absente. Il n’y a pas d’hôtel ici. «Juste» des gîtes chez les vignerons allemands, à Nittel, du côté allemand. «L’an dernier, ils ont attiré 80.000 nuitées! Mais ils sont moins chers, et leurs vins sont moins chers. Et comme les gens regardent ce qu’ils ont dans le portefeuille, et de plus en plus, ça compte. Nous, on a un certain charme. Et heureusement que le ministère de l’Économie et la Commune continuent de nous aider à pouvoir investir pour nous moderniser. Sinon…»
Pour rattraper le temps perdu, le camping, qui ouvre normalement du 1er avril à fin septembre, sera ouvert cette année de mai à fin octobre. À condition que les nouvelles du coronavirus soient meilleures… et que les nuages aillent voir ailleurs.