Le Lux Golf Center, à un coup de swing de la capitale, permet de pratiquer son sport sans y perdre la journée. (Photo: Lux Golf Center)

Le Lux Golf Center, à un coup de swing de la capitale, permet de pratiquer son sport sans y perdre la journée. (Photo: Lux Golf Center)

Avec cinq clubs et 6.000 pratiquants, le golf reste un sport prisé dans les milieux d’affaires. Mais la stagnation des adhérents et le manque d’espace poussent le secteur à se réinventer et à s’ouvrir à d’autres publics.

Ancien professionnel du circuit, champion de France de golf en 1995, Franck Navarro a déposé son sac et ses clubs au Luxembourg il y a plus de 10 ans. Dans la zone de Kockelscheuer, à un jet de pierre du futur stade de foot, il a développé le Lux Golf Center.

Une infrastructure de cinq hectares qui permet aux amateurs de perfectionner leur swing et aux curieux de s’initier à un sport encore souvent jugé élitiste.

Le site, qui abrite la Franck Navarro Golf Academy, a été ouvert en 2012. Il propose désormais six zones d’entraînement (zones herbeuses, bunkers, etc.) et accueille à l’année 450 membres, dont une centaine de juniors.

La proximité des terrains par rapport aux grandes agglomérations joue un rôle.

Christian SchockprésidentFédération luxembourgeoise de golf

«Je voulais me lancer dans l’enseignement du golf et je considère qu’une structure comme celle-ci représente l’avenir de ce sport. Elle est la clé de voûte de sa démocratisation», estime le fondateur, qui note d’ailleurs une progression des chiffres de 15% par an.

Contrairement à un club où l’accès est généralement réservé aux membres, prêts à payer parfois cher pour obtenir le sésame, le Lux Golf Center propose à ses membres un accès libre à l’année, pour une cotisation de 450 euros par an. «Celui qui veut juste s’y essayer peut aussi profiter d’un forfait de 15 euros la journée.»

Tentant! D’autant plus que ce terrain compact n’est qu’à un quart d’heure du centre-ville de la capitale et répond donc à un autre souci rencontré par les golfeurs: le côté chronophage.

«C’est un des grands facteurs de la stagnation du golf un peu partout en Europe», admet , président de la Fédération luxembourgeoise de golf. «La proximité des terrains par rapport aux grandes agglomérations joue un rôle. Si vous comptez qu’un parcours de 18 trous peut prendre entre 4 et 5 heures, on peut très vite y passer la journée.»

On commence à se sentir à l’étroit sur le territoire.

Barbara ForzyfondatriceGolf Planet Events

Saturation en vue

Selon ses chiffres, la fédération compte 3.500 membres. 350 en dessous de 21 ans, mais 2.000 parmi les 50 ans et plus. Un état des lieux qui, selon Barbara Forzy, fondatrice de Golf Planet Events, n’est pas tout à fait représentatif de la pratique.

En comptant les résidents non inscrits dans un club, elle estime le nombre de pratiquants à 6.000. «On peut donc considérer que 1% des résidents luxembourgeois pratiquent le golf alors que la moyenne européenne est de 0,5%.»

Avec sa structure événementielle greffée au magasin Golf Planet, ouvert par son mari Ludovic Forzy il y a une quinzaine d’années à Strassen, Mme Forzy organise annuellement une cinquantaine de manifestations liées au golf.

Bien au fait de la situation de ce sport dans le pays, elle estime que si la pratique est aujourd’hui stationnaire, «c’est aussi parce qu’on commence à se sentir à l’étroit sur le territoire». Depuis la fermeture du golf de la Gaichel, à la frontière belge, en janvier 2016, le Luxembourg compte cinq golfs, dont certains ont déjà atteint leur point de saturation.

Un golf exige effectivement de gros travaux d’entretien.

Patrick PlatzdirecteurKikuoka Country Club

Certains n’hésitent donc pas à franchir la frontière française pour taper la petite balle blanche sur les greens du golf de Preisch. «Il y a de la place pour une structure supplémentaire au Luxembourg, poursuit Barbara Forzy. Le problème est que maintenir rentable une telle entreprise n’est pas aussi évident qu’on pourrait l’imaginer.»

La première cause – évidente –, c’est la surface nécessaire. Un parcours de 18 trous exige un terrain d’une superficie proche d’une centaine d’hectares. Mais une fois les travaux effectués, il faudra encore entretenir cet exigeant gazon anglais.

Situé à Canach, en Moselle luxembourgeoise, le Kikuoka Country Club a ouvert ses portes en 1991 sur un domaine de 120 hectares. Il a été repris par le promoteur immobilier Arend & Fisch bach à sa fondatrice japonaise en 2002.

Quatre ans avant, elle a pris la décision de créer une centaine de golfs compacts urbains pour développer la discipline.

Franck NavarrodirecteurLux Golf Center

«Un golf exige effectivement de gros travaux d’entretien», convient son directeur Patrick Platz. «Sur les 17 personnes que nous employons, 10 sont destinées au jardinage. Et, après le poste des salaires, qui est le plus important, viennent l’achat et l’entretien des machines destinées à maintenir le gazon en état et à des hauteurs de coupe différentes.»

Des greens plus compacts

Le golf de Kikuoka ne pose toutefois pas de problème de rentabilité, selon son directeur. «La situation est bonne. Ceci dit, il est clair que vous ne pouvez pas devenir extrêmement riche en tant que propriétaire d’un golf.» Le club n’est pas non plus tout à fait saturé. Avec une liste d’environ 750 membres, il précise qu’il reste de la place pour accueillir «quelques nouveaux membres».

Mais les acteurs du secteur se montrent toutefois unanimes pour dire que la solution en vogue pour relancer le golf est la création de golfs «compacts», de plus petite dimension et qui peuvent donc trouver leur place à proximité de grandes agglomérations.

Je me bats contre ces stéréotypes.

Barbara ForzyfondatriceGolf Planet Events

C’est notamment la politique qu’a suivie la fédération française en marge de l’organisation de la Ryder Cup sur son territoire en septembre 2018. La compétition, qui oppose les 12 meilleurs joueurs européens aux 12 meilleurs golfeurs américains, a été perçue par la France comme la meilleure vitrine possible pour ce sport.

«Quatre ans avant, elle a pris la décision de créer une centaine de golfs compacts urbains pour développer la discipline», explique Franck Navarro, ambassadeur de ce modèle.

Des clichés à la vie dure

Un autre problème de fond à résoudre pour améliorer son attractivité, ce sont les clichés qui collent à la peau du golf: «sport de riches», «sport de vieux», «un sport, vraiment?». «Je me bats contre ces stéréotypes», commente Barbara Forzy, de Golf Planet Events. «La cotisation coûte entre 1.500 et 3.500 euros, mais pour 250 euros, vous pouvez déjà vous équiper sérieusement pour débuter.»

Au niveau de la fédération, la volonté est de faire connaître le sport à travers les écoles, afin d’amener les plus jeunes générations vers la discipline. «Notre objectif est de montrer que le golf est un vrai sport», explique Christian Schock.

«Nous menons depuis trois ans des actions dans les écoles avec du matériel adapté. Nous observons que les enseignants sont tout à fait réceptifs. Par contre, les parents se montrent beaucoup plus réticents, craignant de voir leurs enfants orientés vers un sport particulièrement coûteux.»

Des stéréotypes à la vie dure? Peut-être. Mais pour Franck Navarro, il existe effectivement des barrières à l’entrée dans les grands clubs sous la forme de paiement d’un membership annuel, qui permet de ne pas perdre son droit d’entrée lorsqu’on est parvenu à entrer dans un golf particulièrement prestigieux – parfois par cooptation. C’est que, même s’il s’est démocratisé, ce sport reste encore très apprécié des milieux d’affaires pour les relations qu’il permet de nouer le long des greens.