Le glyphosate bénéficie d’une autorisation dérogatoire jusqu’au 15 décembre 2023 au niveau de l’UE, dans l’attente de la conclusion de l’EFSA en juillet 2023 et de la fin du processus d’évaluation. (Photo: Shutterstock)

Le glyphosate bénéficie d’une autorisation dérogatoire jusqu’au 15 décembre 2023 au niveau de l’UE, dans l’attente de la conclusion de l’EFSA en juillet 2023 et de la fin du processus d’évaluation. (Photo: Shutterstock)

L’interdiction du glyphosate décrétée sur le territoire du Luxembourg violait le droit européen, a décidé la Cour administrative d’appel le 30 mars dernier. Désormais, le gouvernement doit attendre un potentiel non-renouvellement de l’autorisation du produit par l’UE à la fin de l’année 2023.

Après avoir des produits phytopharmaceutiques à base de glyphosate, Sans surprise, Bayer, qui commercialise différents produits à base de glyphosate, dont le Round up, avait annoncé attaquer cette décision en justice.

Le géant allemand de la chimie a finalement remporté le bras de fer judiciaire. Et à deux reprises, la justice luxembourgeoise lui a donné raison – le 15 juillet 2022, puis Motif: le retrait des autorisations de mise sur le marché par le Luxembourg viole le droit européen.

Intense controverse

De fait, le glyphosate bénéficie d’une autorisation de mise sur le marché dans l’UE, au moins jusqu’au 15 décembre 2023. Le renouvellement de celle-ci fait d’ailleurs l’objet d’une intense controverse au sein de l’UE. Le glyphosate est en effet classé depuis 2015 comme «cancérogène probable» par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), qui dépend de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Au contraire, les deux agences européennes chargées de l’évaluation du glyphosate – l’autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et l’agence européenne des produits chimiques (ECHA) – ont toutes deux rendu un avis jugeant le glyphosate non cancérogène, entrainant le renouvellement de l’autorisation en 2017 pour cinq ans, malgré l’avis contraire du Parlement européen.

Cette autorisation devait arriver à échéance le 15 décembre 2022. Dans cette perspective, des expertises de l’ECHA et de l’EFSA devaient être rendues dans le courant du second semestre 2022. Mais, publié en juin 2021, le rapport préliminaire de l’expertise européenne, qui considère que le glyphosate ne remplit aucun des critères d’interdiction, a provoqué un tel nombre de commentaires critiques que l’EFSA a finalement décidé de reporter ses conclusions à juillet 2023.

Tout faire pour une interdiction européenne

Depuis lors, l’ECHA a rendu publique, le 30 mai 2022, la conclusion de son évaluation: comme en 2017, l’agence considère que le glyphosate n’est pas cancérogène. Le glyphosate a ensuite bénéficié, en décembre dernier, d’une autorisation dérogatoire jusqu’au 15 décembre 2023, dans l’attente de la conclusion de l’EFSA en juillet 2023 et de la fin du processus d’évaluation.

Le Luxembourg est donc désormais dépendant de la décision européenne. Le ministre de l’Agriculture, (LSAP), a insisté sur le fait que le gouvernement Mais, depuis le 30 mars, le glyphosate est à nouveau autorisé au Luxembourg, et ce au moins jusqu’au 15 décembre 2023.

Renoncement volontaire

Le ministre a bien lancé «un appel chaleureux à l’ensemble du secteur – agriculteurs, viticulteurs et producteurs de fruits et légumes – pour qu’ils n’utilisent pas le glyphosate», arguant que celui-ci «a fonctionné ces deux dernières années sans son utilisation». Mais l’opposition dénonce l’absence d’aides aux agriculteurs pour les inciter à y renoncer, comme cela existait avant la mise en place de l’interdiction. Une motion du CSV en ce sens a été rejetée par la majorité le 18 avril dernier.

Le gouvernement a pourtant proposé une prime de 70 euros par hectare en cas de renoncement aux «big movers», dont le glyphosate. Mais la députée (CSV) souligne que cette interdiction est bien plus contraignante qu’il n’y paraît: «Il faut renoncer à tous les “big movers” sur toute la surface de l’exploitation, et pas seulement au glyphosate pour bénéficier de la prime», remarque-t-elle, appelant à une prime qui vise spécifiquement le glyphosate.

Nouvelle interdiction nationale?

Claude Haagen a également annoncé étudier, en collaboration avec un partenaire de recherche, une nouvelle possibilité de retirer la mise sur le marché du produit et d’en interdire l’utilisation. Et vouloir renforcer les interdictions du glyphosate déjà en place (espaces publics, zones protégées d’intérêt national, zones de protection immédiate) en les élargissant aux zones de protection rapprochée et aux zones de protection éloignée (dès l’annonce le 7 avril) et en les interdisant pour les non-professionnels dès le 1er janvier 2024.

Le gouvernement peut en tout cas se reposer sur un taux de renoncement qui était déjà relativement élevé avant même la mise en place de l’interdiction en 2021: plus de la moitié des exploitations agricoles du pays ne l’utilisaient plus et l’ensemble du secteur viticole s’était engagé à ne plus l’utiliser.

Cet article a été rédigé pour la newsletter Paperjam Green, le rendez-vous mensuel pour suivre l’actualité en matière d’environnement, de climat, de mobilité, de RSE et de green finance. .