Au Luxembourg, le marché du gaz dépend totalement de l’importation, et les réserves de l’Allemagne et de la Belgique sont pleines. Le gouvernement a mis en place des mesures pour contenir la flambée des prix, et les particuliers font des efforts pour réduire leur consommation, sans pour autant constater le prix de ces efforts sur la facture.  (Photos: Shutterstock/Montage: Maison Moderne)

Au Luxembourg, le marché du gaz dépend totalement de l’importation, et les réserves de l’Allemagne et de la Belgique sont pleines. Le gouvernement a mis en place des mesures pour contenir la flambée des prix, et les particuliers font des efforts pour réduire leur consommation, sans pour autant constater le prix de ces efforts sur la facture.  (Photos: Shutterstock/Montage: Maison Moderne)

L’Union européenne s’était fixé pour objectif de remplir au maximum ses stocks de gaz avant l’hiver, de façon à sécuriser l’approvisionnement sur le Vieux Continent. C’est chose faite. Dans le même temps, les pays maintiennent leurs efforts pour réduire leur consommation, en particulier le Luxembourg qui fait figure de bon élève. Pour autant, les prix ne baissent pas encore… 

L’hiver arrive. Un geste devient banal: tourner le thermostat pour augmenter le chauffage. Alors que la guerre en Ukraine a menacé la sécurité des approvisionnements dans l’UE l’hiver dernier, le risque de pénurie est aujourd’hui limité, l’UE ayant atteint son objectif: assurer des réserves conséquentes, d’au moins 90%, avant le 1er novembre, en vertu de la réglementation adoptée en juin par le Conseil de l’UE. 

Pour le Luxembourg, le cas de figure est un peu différent. «Nous n’avons pas et nous n’aurons jamais de stockage de gaz sur notre territoire parce que notre géologie ne nous le permet pas», a déjà indiqué, à plusieurs reprises, le ministre de l’Énergie,  (déi Gréng). À l’inverse, d’autres États membres, comme l’Allemagne, l’Italie, la France, les Pays-Bas et l’Autriche, possèdent sur leur territoire un peu plus de deux tiers de la capacité totale de stockage de l’UE. 

Le gaz naturel consommé ici est importé par des conduites à haute pression en provenance de la Belgique et de l’Allemagne. «En 2022, la quasi-totalité du gaz naturel consommé au Luxembourg a été importée depuis la Belgique», a récemment confirmé le ministère de l’Énergie, alors dirigé par Claude Turmes. À noter tout de même que si le pays ne dispose pas de stock local, il produit de façon marginale du biogaz via la méthanisation, injecté localement dans le réseau, mais qui ne saurait évidemment suffire à répondre aux besoins en consommation de la population (48GWh produits en 2022). En vertu du règlement européen, les pays qui ne disposent pas d’installation de stockage doivent stocker 15% de leur consommation nationale annuelle dans les stocks d’autres États membres. 

Des réserves pleines chez nos voisins

Et ces réserves en Belgique et en Allemagne sont pleines, à 96,35% en Belgique au 22 novembre et à 113,75% pour celles d’Enovos en Allemagne à la même date. C’est ce que montre l’, consultable en ligne, qui répertorie les niveaux de stocks dans l’UE et les pays voisins. Pas de quoi, visiblement, s’inquiéter d’une pénurie cet hiver. 

D’autant que le Luxembourg fait toujours figure de bon élève en matière d’économies d’énergie. En avril dernier, alors que l’UE avait fixé un objectif de réduction de 15% de la consommation de gaz, le Luxembourg l’avait réduite de 26,3%. En octobre, le ministère indiquait une réduction de 33,5% par rapport à la période 2017-2022. C’était aussi -40,9% en septembre, -33,4% en août ou encore -20,5% en mars, -22,4% en février, -25,5% en janvier.  

Des mesures gouvernementales pour limiter la facture

Avant d’arriver au consommateur final se trouvent les gestionnaires de réseaux et les fournisseurs de gaz. «En 2022, le client résidentiel moyen a payé 87,2€/MWh pour la fourniture intégrée de gaz naturel», note l’Institut luxembourgeois de régulation (ILR). En comparant ses données, on constate qu’entre 2021 et 2022, la facture annuelle a augmenté de 1.057 euros environ. En 2021, un particulier payait 52,6€/MWh pour une consommation moyenne de 30.556kWh, soit une charge annuelle de 1.607€.

Sans les deux mesures mises en place par l’État, à savoir la prise en charge des frais d’utilisation du réseau ainsi que la contribution visant à limiter la hausse du prix en octobre 2022, le coût serait passé de 87,2€/MWh à 106,9€/MWh, détaille l’ILR. Les deux mesures sont en vigueur jusqu’à fin 2024.  Une facture classique comprend le coût de fourniture (environ 40% du montant final), les contributions et taxes (environ 47%) et les coûts d’infrastructures ou frais de réseaux (environ 13%).

Prenons d’abord le coût de fourniture, qui, comme son nom l’indique, revient au fournisseur. Selon l’ILR, au Luxembourg, 12 fournisseurs de gaz naturel sont titulaires de l’autorisation de fourniture. Seulement six sont actifs sur le marché non résidentiel, et cinq approvisionnent les particuliers (marché résidentiel). Parmi ces fournisseurs: Enovos, dont nous prenons l’exemple. Le fournisseur fait partie du groupe Encevo, qui est aussi la maison mère du gestionnaire de réseau Creos. Enovos évoque plusieurs critères impactant le prix du gaz: «Les facteurs habituels qui ont une influence sur le prix du gaz sont les températures – en cas d’hiver froid, la demande augmente et donc aussi le prix – et le développement économique mondial.» La stratégie du fournisseur consiste à ne pas acheter les quantités nécessaires en une seule fois, «mais en continu, afin d’amortir les fortes fluctuations des prix du marché. C’est pourquoi les augmentations des prix de gros ne se sont jamais répercutées dans la même mesure sur les clients finaux. Pour la même raison, les baisses de prix ne se répercutent pas immédiatement. Ainsi, le gaz naturel actuellement consommé a déjà été acheté au cours des derniers mois aux prix alors en vigueur.»

Un décalage pour le consommateur final

La mesure, mise en place en décembre 2022, puis reconduite l’été dernier jusqu’à fin 2024, englobe aussi les contributions et taxes, qui représentent, elles, environ 47% de la facture. Si le prix global de cette dernière pour le consommateur n’a pas explosé, c’est bien grâce à la mesure mise en place par l’État et qui limite à une hausse de 15% les prix du gaz naturel pour le consommateur. Une mesure en place jusqu’en 2024. 

Viennent enfin les coûts d’infrastructures ou frais de réseaux. Concrètement, l’approvisionnement se faisant par des pipelines de la Norvège vers la Belgique via le terminal LNG de Zeebrugge, puis par des réseaux jusqu’au Luxembourg, cet acheminement a un coût.  «Au Luxembourg, Creos est à la fois gestionnaire de réseau de distribution et le seul gestionnaire de réseau de transport. En plus de Creos, il existe deux autres gestionnaires de réseaux de distribution, à savoir SUDenergie et la Ville de Dudelange», détaille l’Institut luxembourgeois de régulation dans sa . «Tous les tarifs appliqués par Creos sont établis de manière à refléter les coûts réels des activités de l’entreprise», indique le gestionnaire de réseau. 

Et Encevo d’ajouter: «Nos tarifs sont basés sur nos coûts d’achat moyens. Toutefois, la facture que la majorité de nos clients reçoivent actuellement est nettement moins élevée en raison des mesures gouvernementales. Si la baisse actuelle des prix se poursuit, elle aura également des répercussions sur nos tarifs», annonce le fournisseur. Pour constater un impact sur le porte-monnaie, il faudra attendre encore un peu… À condition que l’hiver ne soit pas trop froid et que les températures ne contribuent pas à augmenter la demande et donc les prix. 

Pour comparer les prix, l’ILR et e-Control ont lancé un comparateur des offres de gaz et d’électricité. Après avoir renseigné son code postal, sa consommation annuelle moyenne et d’autres champs optionnels, l’ génère une comparaison exhaustive des offres.